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En Turquie, le président Erdogan en difficulté sur plusieurs fronts à six semaines des élections

Le séisme et la crise économique ont entamé la popularité du chef de l’Etat, avant les élections présidentielle et législatives du 14 mai. Sur la scène internationale, sa politique d’équilibriste face aux Etats-Unis et à la Russie semble atteindre ses limites.

 

Quelque chose est en train de changer en Turquie. Quelque chose qui n’est pas, ou pas encore, la fin des vingt ans de règne de Recep Tayyip Erdogan, qui n’est pas non plus la nature du régime politique devenu de plus en plus autoritaire, mais qui définit déjà le climat dans lequel se déroule la vie publique du pays. A l’approche d’élections cruciales, présidentielle et législatives, le 14 mai, la machine de l’Etat semble peiner à se mettre en mouvement, freinée par la lourdeur de ses contraintes autant que par une opposition requinquée. Freinée aussi par l’étroitesse de ses marges de manœuvre, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de ses frontières.

Frappé par la catastrophe du tremblement de terre du 6 février, par une crise financière qui n’en finit pas et par un manque de liquidités étrangères, le pouvoir du président Erdogan et de son Parti de la justice et du développement (AKP) enregistre, jour après jour, des résultats en net recul dans les enquêtes d’opinion.

Depuis le séisme, les sondages donnent quasi unanimement une même tendance favorable à une alternance politique, où le candidat de l’opposition, Kemal Kiliçdaroglu, devance de 3 à 6 points le chef de l’Etat, voire l’emporterait dès le premier tour. Chose inimaginable il y a encore à peine deux mois. « Le tremblement de terre a changé la donne, affirme le politiste Berk Esen, professeur à l’université Sabanci, à Istanbul, parce qu’il a consolidé le soutien à Kiliçdaroglu et démontré l’incompétence du gouvernement. »

Mais ce n’est pas tout. Cette catastrophe est, selon l’essayiste et économiste Mehmet Altan, « un événement charnière dans notre histoire ». « Elle a révélé aux yeux du monde le pouvoir turc tel qu’il est, c’est-à-dire l’autorité d’un seul homme, n’agissant que pour sa propre survie à la tête du pays, souligne-t-il. Vu le résultat, la politique d’équilibriste du président semble avoir atteint ses limites, tant en Turquie que sur la scène internationale. »

Une « neutralité prorusse »

En quelques semaines, le chef de l’Etat a vu s’accumuler les nuages. D’abord avec les Etats-Unis et la visite du secrétaire d’Etat, Antony Blinken, à Ankara, le 20 février. Peu d’éléments ont filtré lors de la rencontre avec son homologue turc, Mevlüt Çavusoglu, mais on a appris, quinze jours plus tard, que la Turquie avait subitement cessé tout transit ou acheminement vers la Russie de biens et de marchandises soumis aux sanctions contre la Russie. Une décision prise sans communiqué officiel ni déclaration des autorités. L’annoncer serait « admettre une part de culpabilité », a expliqué au journal russe Izvestia, le 10 mars, un logisticien du commerce maritime.

 

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