Au terme d’âpres négociations, le Comité national pour le salut du peuple (CNSP) et les syndicats signataires du 15 octobre ont trouvé un accord pour sauver l’année scolaire. Alors que certaine voix émergent pour appeler à sacrifier pour sauver l’école en décrétant une année blanche.
Le 16 juin 2020, après plusieurs mois sans cours, l’ancien président de la République, Ibrahim Boubacar Keita ordonnait à son premier ministre Boubou Cissé de procéder à l’application immédiate de l’article 39. Après cette annonce, les syndicats de l’éducation signataires du 15 octobre 2016 n’ont pas tardé à distribuer des lettres de reconnaissance ou de remerciements çà et là. Toutes choses qui ont suscité de l’espoir dans les rangs des enseignants. Le personnel enseignant a cru que c’était la fin de la lutte. Mais c’était loin d’être le cas.
Alors que les examens étaient programmés pour le mois de septembre, les enseignants ont haussé encore le ton. Ils ont dénoncé ce qu’ils considèrent comme étant du « vagabondage juridique et administratif » du gouvernement. En d’autres termes, les syndicats grévistes disaient craindre une tentative de modification et de tripatouillage du procès-verbal de conciliation du 17 juin 2020. Ainsi, le problème de l’article 39 sur le statut particulier des enseignants refait surface.
« Le CNSP ne peut pas appliquer l’article 39 »
Son application immédiate à laquelle les enseignants tiennent mordicus n’a pu être effective jusqu’au coup de force du 18 août, qui a contraint Ibrahim Boubacar Keïta à la démission. Les enseignants restent radicalement opposés à tout retour en classe sans son application pure et simple. Les échanges entre les syndicats et les nouvelles autorités du pays ont abouti, le vendredi 12 septembre, à un accord de conciliation dont l’application s’étendra jusqu’au mois de mars 2021. Les cours devraient reprendre ce lundi 14 septembre.
Pour Bréhima Mamadou Koné, chercheur, doctorant en science politique et intervenant dans beaucoup d’universités à Bamako, nous devons sortir des raccourcis et des analyses parcellaires sur les questions d’intérêt national comme l’éducation. « Pour le moment, le CNSP ne peut pas appliquer l’article 39, sans la mise en place de la feuille de route de la transition, des organes de transition et le gouvernement de transition », explique-il. Avant de poursuivre : « Il serait difficile que sous cette transition, l’État puisse mobiliser les ressources nécessaires, ayant une incidence financière de 55 milliards de nos francs pour appliquer cet article. »
Discrédit sur le système éducatif
Au regard de tout ce qui s’est passé durant cette année scolaire, beaucoup d’observateurs pensent qu’il convient de décréter une année blanche pour préparer la prochaine rentrée. Dans un sondage en ligne réalisé à travers Google Forms sur l’éventualité d’une année blanche, 63,6% des répondants sont favorables contre 36,4% pour la poursuite de l’année scolaire.
Décréter une année blanche et reprendre les cours pour l’année scolaire et universitaire 2020-2021 à partir du 1er octobre pour régulariser la situation de l’école, c’est l’avis du chercheur Bréhima M. Koné. « Vouloir forcer les choses ou faire passer les élèves et étudiants sans l’achèvement des programmes, c’est hypothéquer leur avenir. Nous devons sortir de la gestion des réponses pour anticiper les crises scolaires, qui jettent du discret sur notre système éducatif», estime-t-il.
315 300 élèves privés d’école
Pour moi, les nouvelles autorités du pays doivent officiellement sacrifier l’année scolaire en cours. Cette décision permettra de remédier aux problèmes récurrents pour lesquels il n’y a eu que des solutions parcellaires jusque-là.
En début d’année scolaire 2019-2020, des milliers d’enfants étaient privés d’école. Selon un rapport du Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA), 1 051 écoles étaient fermées lors de la rentrée, touchant 315 300 enfants particulièrement au Nord et Centre du pays.
Source : Benbere