Pendant que certains Maliens, ayant pignon sur rue, se font concurrence dans le pillage du pays pour investir dans d’autres pays, de dignes fils du pays investissent lourdement dans nos villes et villages permettant ainsi au pays d’avoir la tête hors de l’eau.
Une famille Sarakolé, les Traoré de Dagassanou (région de Kayes) installés au Canada, vient de construire un hôpital ultra moderne à Bongourou, ville située à 70 km de la ville de Kayes. L’eau potable du château d’eau de l’hôpital alimente aussi le village de Bongourou. Et par reconnaissance à Maraka Balla, dans le passé l’hôte leur père, la famille Traoré du Canada a confié la gestion à sa famille. Coût d’investissement : plus de 4 milliards de franc CFA.
Ces expatriés ont la modestie de dire simplement qu’ils font cela pour soulager la souffrance de leurs parents, et apporter leur contribution au développement de leur terroir.
Pourquoi ont-ils évité de confier aux autorités locales officielles ?
Cet évènement qu’on aurait pu ranger dans le registre des faits divers, ouvre la voie à une réflexion globale sur ce télescopage économique entre les Maliens qui apportent au pays, à l’exemple de cette famille Sarakolé, et ceux qui pillent sans état d’âme.
En effet, il demeure que dans le même temps, d’autres Maliens, souvent fonctionnaires ou opérateurs économiques sulfureux, engoncés dans leur vision nombriliste, non pas simplement de prédateurs, mais de fossoyeurs, happent le denier public avec une avidité morbide pour faire bombance au Mali et à l’étranger. Leur fierté est de parader avec l’argent volé au pays.
Certains construisent l’édifice, d’autres s’acharnent à le saper ou ouvrir des brèches dans lesquelles s’engouffrent des ennemis. Ces ennemis ont compris qu’ils peuvent être difficilement mis en accusation lorsque des locaux se font complices des basses besognes, les idiots utiles.
Il est établi selon les données du réseau de l’entreprise en Afrique de l’Ouest (REAO-Mali), publié dans “L’Essor” ce qui suit :
” Le taux de déperdition est de 49% au Mali en moyenne, à cause de la surfacturation, des problèmes de gouvernance, a-t-il ajouté. Pour sa part, l’expert-comptable Moussa Mara a confirmé qu’une majeure partie des fonds bi et multilatéraux vont dans les poches des travailleurs publics ou leurs partenaires.”
Selon le représentant résident du FMI au Mali, René Tapsoba, la moyenne de la déperdition pour l’Afrique est de 40%.
Moralité, notre pays fait partie des champions toutes catégories confondues pour les détournements de deniers publics et de l’impunité des acteurs. Dans ce bal des gros voleurs, certains ont réussi le tour de force de piller plus vite que leurs ombres: j’appelle Karim Keïta, son frère, sa maman Ami Maïga et tout cet aréopage de Rapetou, ces personnages de fiction formant une bande de voleurs organisés appartenant à une même famille, qui gravitaient autour d’eux.
Encore plus terrible pour notre pays, l’apport de la Diaspora malienne dépasse l’aide publique au développement dont bénéficie le pays.
Sous la plume de Paul Lorgerie le 15 décembre 2019, voilà ce que rapportait “Lemonde” :
“La diaspora contribuait, en 2018, par ses envois d’argent, à près de 7 % du PIB malien. Une manne qui permet de maintenir la consommation et un taux de croissance de près de 5 %, malgré l’insécurité qui persiste depuis 2012.”
Avec ces paramètres, il devient une évidence que le Mali peut se passer du larbinisme qu’impose la posture du quémandeur.
Si les impôts et autres taxes sont normalement perçus et utilisés, conjugués aux transferts de la diaspora, le Mali n’aura plus besoin de jouer dans la catégorie des mendiants de la planète instrumentalisés par les grandes structures financières inféodés et appartenant aux “maîtres du monde”.
L’âme du malien est la générosité, sa fierté est d’avoir et de faire pour soi et les autres dans le cadre le plus strict de la notion de respect. Ces bases de la culture malienne sont allées à vau-l’eau avec la décrépitude de tout le système éducatif dans les écoles et surtout dans les familles.
Yamadou Traoré
Analyste politique
Source: Journal l’Aube-Mali