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Cameroun: portrait des neuf prétendants à la présidentielle 2018

Ils seront donc neuf à briguer la magistrature suprême en octobre prochain. Vendredi 17 août, le Conseil constitutionnel camerounais a rejeté les douze recours des candidats recalés. Entre nouveaux visages et habitués des joutes électorales, qui sont ces neuf aspirants au fauteuil présidentiel ?

Les électeurs camerounais iront aux urnes, le 7 octobre prochain, pour choisir leur président de la République pour les sept années à venir. Face au président sortant Paul Biya, huit opposants espèrent l’emporter dans les urnes.

♦ Akere Muna, le monsieur anticorruption

Agé de 66 ans, Akere Muna a été investi pour la présidentielle par le Front populaire pour le développement (FPD), un parti politique basé dans le nord du Cameroun. Originaire de la région anglophone du Nord-Ouest, il est le fils de Salomon Tandeng Muna, l’ancien Premier ministre du Cameroun anglophone et l’un des acteurs de la réunification de février 1961. Akere Muna a mené une longue et illustre carrière d’avocat avant de se lancer en politique. Il a fait ses premières armes auprès de son frère Bernard Muna – candidat à l’élection présidentielle de 2011 et ancien procureur du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) – au sein de leur cabinet commun Muna, Muna & Associates lancé en 1984. En 1997, il se hisse à la tête du barreau du Cameroun et dirige, par la suite, l’Union panafricaine des avocats. Au début des années 2000, Akere Muna a lancé la section camerounaise de Transparency International. Il a également été le vice-président de cette ONG anticorruption.

♦ Joshua Osih, le renouveau du SDF

En février dernier, lorsque le « chairman » Ni John Fru Ndi annonce qu’il ne sera pas candidat à la présidentielle d’octobre, après trois participations depuis 1992, le député Joshua Osih fait office de successeur évident. Au sein de la deuxième force politique du pays, le vice-président du Social Democratic Front (SDF) possède une forte aura. Il est à l’aise sur les plateaux de télévision et a le franc-parler nécessaire pour monter au front. Joshua Osih, 49 ans, est né d’un père camerounais et d’une mère suisse. Il compte plus de 25 ans d’expérience dans le secteur de l’aviation. Chef d’entreprise remuant, il exerce des activités dans les domaines de l’aviation, de l’écotourisme, de l’hôtellerie et de l’aquaculture. Osih a rejoint le SDF en mars 1991. En 2013, il est devenu le premier Camerounais anglophone à siéger à Douala, dans la région du Littoral. Joshua Osih apparaît comme le principal challenger du président Paul Biya dans cette élection présidentielle à venir.

♦ Paul Biya, l’éternel président

« Je serai votre candidat à la prochaine élection présidentielle », annonçait Paul Biya, le 13 juillet dernier sur Twitter. Les années passent et le président camerounais est toujours présent, élection après élection. Le 6 novembre 1982, Paul Biya devenait le chef de l’Etat, à la suite de la démission inattendue du premier président du Cameroun indépendant, Ahmadou Ahidjo. Après 35 années de pouvoir, il portera à nouveau la flamme, symbole du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), pour un septième mandat à la tête de l’Etat. Malgré les critiques de plus en plus acerbes récemment sur la gestion de la crise dans les zones anglophones, l’ancrage du pensionnaire d’Etoudi – le palais présidentiel – ne semble pas pouvoir vaciller. Paul Biya, qui repart à la conquête des suffrages à 85 ans, peut compter sur un parti qui est une véritable machine électorale et la formation politique la mieux implantée sur l’étendue du territoire camerounais.

Cabral Libii, la jeunesse hardie

Ce juriste de formation est sans doute la figure montante dans le débat politique au Cameroun. Cabral Libii est d’ailleurs un habitué des plateaux de télévision, où ses analyses ont participé à sa notoriété. Enseignant en droit à l’Université de Yaoundé II, il jouit d’une forte popularité sur les réseaux sociaux. À 38 ans seulement, Cabral Libii se présente à la présidentielle sous la bannière de l’Union nationale pour l’intégration vers la solidarité (Univers). Mais il peut compter également sur le mouvement « 11 millions de citoyens », créé pour inciter les Camerounais à s’inscrire sur les listes électorales. C’est ce mouvement qui lui a permis de récolter les 30 millions de francs CFA (près de 45 000 euros) de caution, exigés par l’instance officielle Elections Cameroun. Cabral Libii veut faire encore mieux et lever 200 millions de francs CFA pour financer sa campagne électorale.

♦ Maurice Kamto, le transfuge

L’autre avocat de renom de cette liste se présente également pour la première fois à une élection présidentielle. Maurice Kamto, âgé de 64 ans, a été membre de la Commission du droit international des Nations unies de 1999 à 2016. Auréolé de ce statut, il a mené avec réussite la délégation camerounaise lors des négociations visant à rétrocéder la péninsule de Bakassi, un territoire que le Cameroun et le Nigeria se disputaient. La contribution décisive de Maurice Kamto l’a aidé à être nommé ministre délégué auprès du ministre de la Justice en 2004. Cette nomination passait à l’époque pour une ouverture de Paul Biya à la société civile. Cependant, il a quitté le gouvernement en novembre 2011 et lancé sa propre formation, le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC).

♦ Garga Haman Adji, l’ex-« chasseur de baleines »

A 74 ans, le candidat de l’Alliance pour la démocratie et le développement (ADD) reste l’un des rares ministres de Paul Biya à avoir choisi de démissionner. Détenteur du portefeuille de la Fonction publique et du contrôle supérieur de l’Etat en 1988, Garga Haman Adji s’était lancé dans une politique de rigueur et de moralisation, traquant les mauvaises pratiques dans l’économie. Son engagement dans la moralisation de la vie publique lui a valu d’être surnommé le « chasseur de baleines ». C’est la troisième fois que Garga Haman Adji brigue la magistrature suprême après 2004 et 2011.

♦ Ndifor Afanwi Franklin, le « ministre » du ciel

C’est dans son église pentecôtiste du quartier Bonaberi, à Douala, qu’il a annoncé avoir reçu un appel de Dieu pour cette échéance présidentielle. Ndifor Afanwi Franklin est âgé de 39 ans et ne possède aucune expérience en politique, mais il n’a aucun doute quant à sa victoire. Ses supporters y croient aussi puisqu’ils ont fait le déplacement jusqu’à Yaoundé, la capitale, pour assister à l’annonce des candidatures retenues et acclamer leur guide. Le pasteur du Kingship International Ministry considère que la politique est la cause des maux du Cameroun et se dit prêt à « délivrer le pays ».

♦ Serge Espoir Matomba, l’ambitieux entrepreneur

Jusqu’ici, Serge Espoir Matomba était plus connu dans l’entrepreneuriat que dans la politique. Dans une autre vie, le candidat du PURS, le Peuple uni pour la rénovation sociale, a créé plusieurs entreprises, notamment dans le secteur des hydrocarbures. Le chef d’entreprise de 39 ans souhaite établir un véritable dialogue avec la jeunesse. Très engagés sur les problématiques sociales, Serge Espoir Matomba et les cadres du PURS ont mené une grève de la faim en 2014 pour protester contre l’augmentation du prix des hydrocarbures par le gouvernement camerounais. Ils ont été arrêtés au bout de trois jours et obligés d’interrompre leur grève. Serge Espoir Matomba critique régulièrement la gestion de la crise en zones anglophones par le gouvernement et a même déjà appelé à la démission de Paul Biya.

♦ Adamou Ndam Njoya, l’infatigable candidat

Adamou Ndam Njoya est une nouvelle fois de la partie après les présidentielles de 1992, 2004 et 2011. Le maire de Foumban, dans l’Ouest, a 76 ans aujourd’hui et reste toujours la première option de l’Union démocratique du Cameroun (UDC), le parti qu’il a créé en 1991. Par le passé, il a occupé de nombreux postes importants quand Amadou Ahidjo était au pouvoir. Tout premier directeur de l’Institut des relations internationales du Cameroun (IRIC), Adamou Ndam Njoya est devenu vice-ministre des Affaires étrangères en 1975 puis ministre de l’Education nationale entre 1977 et 1980. Il a également été ministre délégué à l’Inspection générale de l’Etat et à la réforme administrative entre 1980 et 1982. Il n’a jamais été en mesure d’inquiéter Paul Biya lors de ses trois participations à la présidentielle. Par ailleurs, Adamou Ndam Njoya doit faire face à une défiance de son propre cousin, l’influent roi Bamoun Ibrahim Mbombo Njoya, qui est membre du bureau politique du RDPC et un proche du président de la République.

Le Combat

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