Alors que le second tour de l’élection présidentielle est prévu le 12 août, un débat entre les finalistes est de plus en plus demandé. C’est un exercice démocratique jamais osé au Mali depuis 1992. Ballan Diakité, politologue et chercheur au Centre de recherches et d’analyses politiques, économiques et sociales (CRAPES), explique à Journal du Mali l’intérêt et les enjeux d’un tel face à face.
Quel est l’intérêt d’un débat entre les deux tours ?
C’est d’abord une source d’information pour le grand public. Quand on écoute les candidats débattre sur les questions essentielles de la vie nationale : santé, éducation, emploi des jeunes, on obtient de l’information sur l’état du pays et on évalue la stratégie, la vision et la capacité de chaque candidat à répondre favorablement aux attentes des populations.
Est-il possible de perdre ou de conquérir des électeurs à l’issue du débat ?
Évidemment, car l’enjeu est de connaitre la capacité intellectuelle de chaque candidat. De ce point de vue, un candidat qui manque d’arguments ou qui est incapable de défendre son programme, c’est tout simplement hallucinant. Le débat permet de connaitre les failles et les points forts de chacun. Il est un enjeu électoral, car il permet de départager les candidats sur leur raisonnement et leur programme. Du coup, il peut jouer en faveur ou en défaveur de l’un ou de l’autre.
Est-ce à dire que faire campagne ne suffit pas ?
En effet, parce que tout le monde n’a pas le temps de s’asseoir pour décrypter le programme d’un candidat à l’élection présidentielle. Si, par exemple, vous et moi avons une heure à consacrer à la lecture d’un programme, ce n’est pas le cas pour d’autres. Tous les Maliens n’ont pas cette capacité. Le contenu est tellement sophistiqué que même du point de vue lexical il nécessite une certaine initiation en économie, en droit ou en politique.
Y a-t-il eu un face à face marquant dans l’histoire électorale du Mali ?
En 1992, il y a eu le premier et unique débat entre Alpha Oumar Konaré et Tiéoulé Mamadou Konaté. C’est une pratique qui n’a pas continué alors que le débat est essentiel dans une démocratie. Le malheur du Mali est que le niveau des débats est très bas et qu’il y a des candidats qui refusent même de débattre. Si la démocratie, c’est la volonté du peuple, le peuple est ambivalent. Il y a ceux qui gouvernent et ceux qui sont gouvernés et tous veulent faire entendre leur voix. Il n’y a que le débat qui puisse le permettre, pour comprendre la position idéologique, politique, de tel ou tel candidat.
Journal du mali