Pour mettre aux pas l’équipe gouvernementale en charge de conduire la transition politique au Mali, le Président de la Transition, Bah N’Daw, a adressé une lettre d’orientation au Premier ministre et au gouvernement de Transition dans laquelle il a rappelé que notre pays doit enfin jeter les bases d’une refondation nationale devenue nécessaire sur bien des plans afin de mieux asseoir le vivre ensemble, mettre sa jeunesse au travail, revaloriser son école et sa santé.
A l’entame de ses propos, le président de la Transition a tenu à souhaiter la bienvenue au gouvernement dans l’architecture institutionnelle de la Transition et anticipant une excellente collaboration entre la Présidence et la Vice-Présidence. Aussi, il a adressé ses vives félicitations au Premier ministre pour sa nomination qui constitue un jalon, en ce tournant capital de notre évolution en tant qu’Etat. Et de poursuivre que le choix porté sur le Premier ministre, Moctar Ouane, se justifie amplement car il s’explique par sa riche carrière qui lui a permis d’acquérir une solide connaissance de l’administration publique et des arcanes de la diplomatie. “Ce sont autant d’atouts décisifs en ce temps où notre réussite collective dépend de notre aptitude à négocier, notre volonté d’aller au consensus et notre capacité à nous rassembler. Nul doute qu’il est le premier à en être conscient. Je ne doute pas qu’en homme de missions, vous avez pris l’exacte mesure de la responsabilité qui est désormais vôtre”, a-t-il martelé.
Pour le Président Bah N’Daw, le pays demande des résultats et les autorités de la Transition ont promis ces résultats. Ainsi, ajoute-t-il, le gouvernement doit donc se mettre immédiatement à la tâche, conformément à la lettre de mission adressée aux membres du gouvernement, le mardi 6 octobre dernier, lors du premier conseil de cabinet. “Le gouvernement est sous votre autorité, votre entière autorité. Evaluez-le de manière régulière, méthodique et rigoureuse. N’ayez aucune tolérance pour l’insuffisance de résultats, le manque de solidarité gouvernementale, l’inobservance des règles de la comptabilité publique ! Là-dessus, vous aurez tout mon soutien !”, a-t-il rassuré.
Jeter les bases d’une
refondation nationale
A en croire le chef de l’Etat, la Charte nationale et la Feuille de route de la Transition issues de la grande concertation qui a rassemblé les Maliens les 11, 12 et 13 septembre dernier, balisent notre chemin. Il a laissé entendre que notre pays doit renouer avec la pleine légalité constitutionnelle, avec un président de la République élu dans les délais prescrits, et si possible avant.
Il ajoutera que le grand bond en avant est également indispensable dans le domaine de la lutte contre le terrorisme et le crime organisé. “Nous le devons à ce pays qui nous a fait confiance et nous le devons aux centaines de soldats, maliens comme des forces alliées, tombés au front ainsi qu’à la mémoire de nombreux civils disparus. Il nous incombe, dans le même temps, de promouvoir une saine gouvernance de nos ressources financières”, a fait savoir le président Bah N’Daw.
De sa lecture, le Mali doit enfin jeter les bases d’une refondation nationale devenue nécessaire sur bien des plans afin de mieux asseoir le vivre ensemble, mettre sa jeunesse au travail, revaloriser son école et sa santé. Tout cela, dit-il, les autorités de la Transition doivent s’y attaquer en dix-huit mois. Ainsi, il y a ce qu’elles doivent réaliser entièrement car c’est l’essence de la Transition, notamment les élections générales (référendaire, présidentielle et législatives). “Chaque pas que vous posez doit davantage rapprocher le Mali de l’échéance d’élections organisées dans la transparence, dans la régularité, dans le respect des textes et instruments qui régissent les élections, j’allais dire dans le respect scrupuleux des normes démocratiques afin que les vaincus félicitent les vainqueurs”, a-t-il ajouté.
Une Transition, plus neutre possible entre les candidats
Selon lui, la fâcheuse tradition des crises post électorales doit désormais être un vieux souvenir pour ce grand pays qui est capable de relever chacun de ses défis. En effet, il dira qu’il faut faire en sorte que tous les textes qui doivent être relus le soient ; le fichier électoral ne soit plus source de controverses et de divisions, mais au contraire l’objet d’un consensus vérifié ; le coût des élections soit conforme aux maigres moyens d’un pays en guerre contre le terrorisme, la maladie, la faim, la pauvreté ; la Transition soit le plus neutre possible entre les candidats et veiller à l’application correcte du code électoral.
A ses dires, même tenir les élections, il incombe au gouvernement de Transition de renforcer la sécurisation et la stabilisation du territoire national. Avant de préciser qu’il faut prêter une attention particulière à cette question. “Depuis huit ans, nous sommes en guerre. C’est une guerre que nous n’avons pas voulue. Mais il n’y a pas d’autre choix que de la faire, de la faire sans faiblir, de la faire quoiqu’il nous en coûte. Les moyens de nos forces de défense et de sécurité méritent d’être renforcés”, a-t-il renchéri.
Aux dires du Président N’Daw, les faiblesses au niveau de la stratégie doivent être corrigées et les failles humaines doivent être combattues parce que l’ennemi est connu et le vaincre est possible. Et d’ajouter qu’à défaut de gagner tout de suite, nous devons remporter des victoires rassurantes cette guerre de longue haleine. “Dans le temps qui nous est imparti, nous devons extirper de nos rangs les soldats qui ne font pas honneur à la tenue. Les exactions contre les civils, je reviens là-dessus, ne peuvent être que combattues. Leurs auteurs doivent être recherchés et jugés. L’armée doit assurer et rassurer le peuple. Elle n’a pas d’autre vocation”, a-t-il laissé entendre.
A entendre le président de la Transition, la dimension politique de la grave crise que traverse notre pays ne peut être passée sous silence. A cet effet, la mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation doit être redynamisée sans tarder, autant que doivent être encouragées les initiatives concourant au retour de la paix et du vivre ensemble au Centre du Mali car la paix est le but, tout le reste doit concourir à l’atteindre et à la préserver. Aussi, il dira que notre crise multiforme appelle une refondation de l’Etat.
Il a saisi l’occasion pour préciser que la Transition sera trop courte pour voir aboutir les réformes que cette refondation implique, mais l’Etat est continuité et une grande part du travail est faite, comme les travaux du Dialogue national inclusif (Dni) le démontrent. Avant de promettre l’opérationnalisation des mécanismes de suivi de la mise en œuvre des recommandations de cet important forum qui a été salué comme un grand moment de notre histoire.
Imprescriptibilité du crime d’atteinte aux deniers publics
Selon le Président de la Transition, la probité n’est pas négociable et elle s’impose à tous les acteurs de la Transition pour relever le défi du Mali nouveau que les Maliens attendent. “Notre honneur est dans notre intégrité. L’avenir de la jeunesse malienne est dans notre intégrité.
Le destin du pays est dans notre intégrité. Il n’y a aucune possibilité pour moi de transiger sur cet impératif. Aucun d’entre nous ne sera au-dessus de la loi. Notre seule raison d’être est de travailler à satisfaire notre peuple. C’est le serment que j’ai prêté. Je n’y dérogerai pas”, a-t-il promis.
A le croire, chaque centime de ce peuple doit être judicieusement utilisé et qu’il veillera à ce que les deniers publics soient utilisés rigoureusement. Ainsi, il a promis de réajuster le train de vie de l’Etat car, selon lui, le combat contre le fléau de la corruption sera concession aucune.
“Il doit se faire d’abord par notre propre irréprochabilité en tant que dirigeants. Mais il doit se faire également à travers les réformes systémiques. Il est de ce fait nécessaire que le gouvernement puisse avancer sur certains chantiers évoqués dans les journées de concertation nationale plus récemment et au cours de forums antérieurs”, a-t-il dit.
Pour finir, il dira que l’imprescriptibilité du crime d’atteinte aux deniers publics est un de ces chantiers, de même que la lutte acharnée contre l’impunité et la suppression du privilège de l’immunité lorsque les deniers publics sont en cause. “C’est à ce prix que la morale publique sera restaurée et que l’avenir de la nation majeure que nous sommes sera sauvé”, a-t-il conclu.
Boubacar PAÏTAO
Source: Aujourd’hui-Mali