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Abandon scolaire des filles : La faute au changement climatique?

Durant les saisons pluvieuses, plusieurs écoles subissent une terrible inondation, notamment à Koulikoro et à Ségou. Cette abondance en eau influence le déroulement normal des cours en impactant l’éducation des jeunes filles à qui tous les travaux domestiques sont confiés. La sécheresse aussi est une période d’extraction de sable et de graviers, c’est un moment où elles se frottent les mains.

Ces 3 dernières années, le programme scolaire s’étale jusqu’au mois d’août, période hivernale. Le dernier rapport du bureau humanitaire des Nations-Unies, Ocha de 2021 a indiqué 13 642 sinistrés à Ségou et 11 116 à Koulikoro.

« En période hivernale, la cour de l’école est inondée. Son accès devient très difficile pour les élèves et les enseignants. En plus, les classes servent d’abri à quelques populations sinistrées », dit M. Soriba Cissé, directeur coordinateur du groupe scolaire Kayo à Koulikoro.

A cause de ce phénomène climatique, l’école fondamentale de Kayo a été suspendue durant quelques jours le temps d’évacuer l’eau. « Les enfants abandonnent les études, certains par manque de volonté, d’autres pour aider les parents au champ », explique Kassim Baba Konaré, président coordinateur du (CGS) du groupe scolaire de Kayo.

Le groupe scolaire Fa Keita, situé à Pelengana Nord dans la région de Ségou, est aussi victime d’inondation pendant la période pluvieuse. « L’eau rentre par la grande porte. Or, Fa Keita est un centre d’examen. Avec l’appui du Comité de gestion scolaire (CGS), du Centre d’Animation pédagogique (Cap), la mairie a aménagé un système de drainage devant des classes pour permettre le déroulement des examens de 2021. Cela a permis aux enseignants et élèves d’accéder aux salles », informe Mme Aminata A. Coulibaly, coordinatrice de l’école fondamentale Fa Keita.

Comme à Kayo, les sinistrés s’abritent dans les classes du groupe scolaire Fa Keita empêchant le déroulement normal des cours. La coordinatrice a dit que la suspension des cours dure souvent 15 jours et a un impact direct sur le niveau des élèves.

« Une fois, nous avons appelé les sapeurs-pompiers pour évacuer l’eau. La meilleure solution est de remplir l’enceinte de la cour de l’école des graviers. Par faute de moyens, le CGS nous a aidé à creuser un fossé pour drainer l’eau par le bas des murs qui n’est peut-être pas une solution durable», ajouta le coordinateur de Kayo B.

Selon lui, l’abandon scolaire des filles à Kayo est lié aux facteurs du changement climatique comme les travaux champêtres et l’extraction du sable pendant la saison sèche. Le travail de ces enfants est favorisé par l’extrême pauvreté de leurs parents.

«Les jeunes filles s’adonnent à ces travaux pour subvenir à leur besoin et à celui de leurs parents car l’agriculture est moins rémunérée. Certaines finissent même par abandonner les études.

La saison sèche est perçue aussi comme la période des mangues. Le directeur révèle que les filles sèchent les cours pour aller cueillir ces fruits pour les vendre. Ces absences jouent sur leur rendement scolaire. L’école Fa Keita B, a un effectif de 502 élèves dont 251 garçons et 261 filles. « En saison pluvieuse, les élèves viennent rarement en cours. L’inondation impacte les enfants car ils se baignent dans les eaux stagnantes et contractent des infections », indique Mme Thiero Habiba Konaté, professeur de Français en 7ème A1 au groupe scolaire Fa Kéita B.

Selon Dramane Kida, enseignant, l’école Darsalam de la région de Ségou est aussi une zone inondable. Tout comme Fa Keita, elle a été aménagée l’année dernière par la mairie pour le déroulement de l’examen.

“Le gouvernement s’est engagé à mettre en place des solutions telles que la délocalisation des centres d’examen. Pour réussir cette mission nous avons dégagé des mécanismes de communication. Grâce à l’appui des partenaires techniques et financiers, nous avons bénéficié du sable et de graviers”, a rassuré M. Idrissa Traoré, directeur du Centre d’Animation pédagogique (CAP) de Ségou.

Selon le sociologue M. Seydou Loua Bérété, les changements climatiques provoquent des déplacements de population qui ont un impact direct sur la scolarisation en général, principalement celle des filles. Elles engendrent la pauvreté et lorsque la famille n’a pas assez de moyens financiers, elle privilégie la scolarisation du garçon au détriment de celle de la fille. La sécheresse provoque la corvée d’eau et cette tâche est généralement réservée aux filles.

“Je vends des friandises devant l’école Fa Keita et j’éprouve de la peine pour ces élèves qui marchent dans la boue avec une plus grande difficulté pour être à l’heure’’, témoigne une vendeuse.

Fatoumata Kané

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EDUCATION DES FILLES

Malgré tout, certaines percent !

Certaines filles s’accrochent à leur éducation, mais gravissent les échelons grâce à une main tendue. Tel est le cas pour Bintou Mohamed Coulibaly. Appuyée par sa grande mère et les donations de son école, elle est une élève très brillante avec 17,92 de moyenne au groupe scolaire Fa Keita B, situé dans la Commune rurale de Pelengana à Ségou.

Âgée de 18 ans, Bintou Coulibaly fera le DEF cette année. Sa directrice Mme Maïga Fatoumata Maïga est très fière d’elle et ne tarit pas d’éloges à son endroit.

« Depuis 3 ans, elle étudie dans mon établissement. C’est une élève disciplinée, attentive et très rigoureuse. L’année dernière, elle a été la première de sa classe avec 16 de moyenne. Cette année, elle est première avec 17,92. Je l’admire grâce à son rendement scolaire. J’ai 380 élèves dont 171 garçons et 208 filles », affirme-t-elle.

Logée chez sa grand-mère, Bintou est généralement prise en compte pendant les donations à travers les projets humanitaires, selon sa directrice. Elle confirme que la mamy de Bintou vient très souvent voir dans quelles conditions sa petite fille étudie.

Au cours d’un concours, Bintou a signalé à sa directrice un manque d’électricité chez elle qui influence ses révisions le soir.

“ A la maison, j’ai de la difficulté à me procurer de la lumière pour apprendre mes leçons car mes parents n’ont pas la possibilité d’installer de l’électricité. A travers l’appui humanitaire, nous avons un panneau solaire qui me permet de faire mes devoirs et révisions. Pendant la saison pluvieuse, je m’oblige à traverser les eaux stagnantes pour pouvoir être à l’école. Je suis consciente des risques de maladies, mais je suis obligée de poursuivre le programme annuel pour ne manquer aucune de mes leçons’’, raconte-t-elle.

Bintou Coulibaly se dit très motivée à étudier pour devenir une personne importante. Depuis toute petite, sa grand-mère l’encourage à prendre au sérieux ses études. Fatoumata Traoré est la grand-mère de Bintou qui se sent fière de l’accompagner dans son éducation.

‘’Nous n’habitons pas loin du groupe scolaire de Pelengana. C’est une fille qui aime les études, c’est la raison qui me pousse à l’aider. Je n’ai pas eu la chance comme elle de poursuivre mes études à partir de la 9ème année, à cause des conditions familiales”, regrette-t-elle.

Elle essaie d’éviter la répétition des mêmes problèmes dans le cas de Bintou et tout comme sa grande sœur qui est à l’université aujourd’hui.

“Je suis contre les mariages précoces des filles qui occasionnent le plus souvent leurs abandons d’école. Lorsqu’elles sont diplômées et ayant un boulot, elles peuvent facilement contribuer aux charges familiales. Je lance un appel à chaque parent afin d’aider les filles à poursuivre leurs études”, condamne-t-elle.

Fatoumata Kané

Source: Mali Tribune

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