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Tara Bouaré : LA ROSSIGNOLE DE MOLODO BAMANAN

Elle a chanté que nul n’est éternel mais sa chanson « Sanu Nègèni » est en passe de la maintenir éternellement dans l’esprit du public

Tara Bouaré artiste chanson traditionnelle Bamanan

Voilà 41 ans que disparaissait l’une des plus grandes cantatrices que le Mali indépendant ait connu. Il s’agit de Tara Bouaré, l’artiste à la voix captivante de Molodo Bamanan, petite localité située dans la commune rurale de Kala Sigida à une vingtaine de km de la ville de Niono.
L’artiste était au sommet de son art lorsqu’elle a été surprise par la mort au dispensaire de Niono, l’actuel Centre de santé de référence le 3 juin 1974, alors qu’elle attendait un enfant. Une mort subite qui l’a arrachée à l’affection de ses nombreux admirateurs à Niono, au Mali voire au-delà de nos frontières. Dans notre pays, elles sont nombreuses les artistes de grande notoriété qui ont disparu de notre vue et dont les Maliennes et les Maliens se rappelleront longtemps. Fait partie de ce gotha, feue Tara Bouaré.
Qui était Tara Bouaré ? De sources proches de sa famille et du service de la jeunesse, des arts et de la culture de Niono, Tara est née en 1935 à Molodo Bamanan. Elle est de feu Zama dit Bourama Bouaré, ancien joueur de M’Bolon, un instrument traditionnel, et de feue Sofè dite Aïssata Tangara, ancienne cantatrice. Tara Bouaré est issue d’une famille bamanan qui vivait essentiellement de l’agriculture.
Très jeune, elle a appris toute seule à chanter. Avant l’accession de notre pays à la souveraineté nationale et internationale, voire même bien après notre indépendance, il était fréquent de voir dans nos villages, hameaux et fractions, des groupes de jeunes filles du même âge qui se retrouvaient sur la place publique au clair de la lune, pour se récréer en chantant et dansant.
Cette animation du village la nuit par les filles sur la place publique, a drainé toujours la grande foule, particulièrement les garçons. Parmi les filles, qui chantaient lors de ces retrouvailles dans le village de Molodo Bamanan, Tara se distinguait par sa voix captivante, se souvient un témoin.
Malgré son jeune âge, la petite Tara émerveillait les foules lors des soirées de réjouissances populaires dans le village. Elle a fini par devenir une vedette et le chouchou du public. C’est ainsi que son nom a traversé les frontières de sa contrée. Elle était réclamée dans d’autres localités pour animer les fêtes traditionnelles. Ses prestations drainaient une foule importante.
Pour les cérémonies de circoncision, de mariages et les fêtes traditionnelles dans les villages environnants, il fallait à tout prix la présence de Tara Bouaré pour donner plus d’éclats et de couleur à la manifestation.
Tara était déjà une chanteuse très populaire avant son mariage avec le nommé Monzon Tangara avec qui, elle a eu deux enfants (Fémou et Monzon Tangara). Très compréhensif, son mari lui laissait liberté de mener sa carrière de chanteuse, précise notre témoin.
Mais qu’est-ce qui a révélé l’artiste au Mali tout entier et au-delà? « En 1964-1965 alors que j’étais sur les bancs de l’école, une équipe de la radio Mali était venue couvrir la fête traditionnelle de notre village. Parmi cette équipe, je me souviens encore du nom d’un certain Bellah Sow », raconte notre interlocuteur.
Six chanteuses dont Tara Bouaré la plus jeune d’entre elles, se relayaient au micro pour l’animation. Ce jour-là, Tara Bouaré a émerveillé plus d’un, particulièrement l’équipe de la radio Mali qu’elle a séduite tout au long de la manifestation, poursuit-il. Et parmi les enregistrements réalisés par l’équipe figurait la célèbre chanson « Sanu Nègèni » qui a donné une dimension internationale à l’artiste.
Le sens profond de cette chanson avait conduit certains à penser qu’il s’agissait d’une critique à l’endroit du régime de l’époque. Il est vrai que les auteurs du coup d’Etat du 19 novembre 1968, ont beaucoup utilisé cette chanson dans leur campagne de dénigrement contre le régime de Modibo Keita. Ce qui est sûr et certain et que beaucoup de ses fans peuvent témoigner, c’est que Tara Bouaré a vu sa côte prendre une plus grande dimension sous la deuxième République. Sa chanson « Sanu Nègèni » était une devenue un tube bien prisé par les nouveaux maîtres du Mali qui avaient oublié que les paroles de sagesse de ce chant étaient valables pour eux aussi. Dans cette chanson, Tara Bouaré souligne que personne n’est éternelle et que tout pouvoir est appelé à prendre fin un jour.
Tara Bouaré a à son actif d’autres chansons célèbres telles que Ntozoni, Garan, Massi koungo ntante, Ndou gani, entre autres. La disparition de la rossignole de Molodo Bamanan, a créé un grand vide dans le cercle de Niono, tant l’artiste était devenue incontournable pour l’animation des manifestations socio culturelles de la circonscription. Mais comme le dit l’autre, les morts ne sont pas morts. Ce qui nous amène à dire que Tara Bouaré n’est pas morte. Elle est encore parmi nous.
Pour immortaliser l’artiste, l’administration locale en guise de reconnaissance, a donné son nom au local qui accueille les activités des femmes de Niono. Ce centre a toujours été un lieu de regroupement très important des femmes de la capitale du riz qui y mènent aujourd’hui des activités génératrices de revenus tels que la coupe et couture, la teinture, le séchage des oignons, de la tomate et la transformation du fonio.
Le centre a été rénové en 2010 par l’Ong Moteur sans frontière pour plus de 135 millions de Fcfa. Aussi depuis 1994, la toute première radio locale qui a ouvert ses portes dans la capitale du riz, c’est-à-dire la radio rurale baptisée « radio Tiessiri », commence et termine tous les jours, ses émissions par la chanson « Sanu Nègèni » de Tara Bouaré. L’artiste bénéficie aussi des droits d’auteur qui sont versés à ses ayants droits, confirme le service local de la jeunesse, des arts et de la culture.

C O Diallo
AMAP Niono

source : L’ Essor

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