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Retrait de la plate forme d’Anefis: la capitulation ou résignation?

Comment, d’une situation de détente et de libre circulation des combattants, de part et d’autre, au lendemain de la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation, on en est arrivé à une confrontation ouverte entre la Coordination et la Plateforme ? S’égosiller sur la violation de la cessation des hostilités ou celle de l’Accord masque la mauvaise foi des uns, la compromission des autres ; et une certaine faillite de tous.

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L’empressement de la Minusma d’ériger une zone de sécurité autour de Kidal, en violation de son mandat de respect de la souveraineté de notre pays, ne solde pas sa responsabilité première dans cette escalade. Et, qu’à Dieu ne plaise, de ses suites. Le prétexte pris de la protection des populations de Kidal au regard d’éventuels risques qui planent sur elles, établit un constat du rapport de force de la part de la Minusma, objectivement en défaveur de la Coordination. À moins que le risque allégué ne soit imaginaire, un pur prétexte pour mettre à l’index une partie (la Plateforme qu’elle désigne dans son communiqué) et toiser les autorités et l’opinion maliennes.

Un adage bien chez nous dit : il m’a agressé, il m’a attaqué, il m’a terrassé ou casser ne disent point la cause de la bagarre. Aussi, ne faudrait-il pas aller au-delà de l’indexation de la Plateforme par la Minusma comme le coupable tout désigné pour poser les vraies questions, les vrais problèmes afin de connaître les vraies raisons et d’avoir les vraies solutions, au-delà de cette zone de sécurité qui érige Kidal en enclave au sein de la République, plus qu’avant la signature de l’Accord pour la paix.

LES FAITS

C’est au mépris des arrangements sécuritaires convenus les 18, 19 et 20 juillet 2015 entre les principaux responsables militaires sur le terrain que des éléments de la Coordination ont les positions de la Plateforme samedi 15 août 2015, à Edjerer Amassine, dans l’oued de Touzik. De cela, la Plateforme en a pris à témoin l’ensemble des membres de la médiation internationale ainsi que l’opinion nationale et internationale dans un communiqué en date du 15 août 2015. Est-ce parce qu’ils ne sont pas suffisamment touareg comme ceux de Kidal ou parce qu’ils ne sont que « pro-Bamako » qu’ils ne sont ni écoutés ni entendus ?

Est-ce parce qu’ils appartiennent à la Plateforme et non à la CMA qu’ils sont des sous Maliens et à cet égard interdits d’aller et de venir sur leur propre terroir ? Ici se trouve la vraie raison de l’affrontement. En effet, comme vient de la décréter unilatéralement la Minusma, la CMA ne veut pas voir les combattants de la Plateforme jouir de leur liberté de mouvement. Aussi, les ont-ils sommés de quitter les oueds de Takaloute, Tassik, Infelefele, Touzik Amassine… peuplés majoritairement par des communautés de la Plateforme (leurs familles) et qui n’ont jamais été sous le contrôle de la Coordination.

Or, « malgré les assurances données par Cheickh Aoussa, un des principaux responsables militaires de la CMA qui au cours d’une conversation téléphonique a qualifié d’incident malheureux l’événement d’hier, présenté des excuses, et promis la persévérance pour sauvegarder les arrangements sécuritaires », dimanche 16 août 2015 vers 17 heures, à Edjerer Amassine dans l’oued de Touzik, les positions de la Plateforme ont été attaquées à nouveau par les combattants de la CMA. Répliquant à cette attaque, dans une zone qui n’est pas sous contrôle de la CMA, les forces patriotiques ont pourchassé leurs agresseurs jusqu’à Anefiss.

À ce jour, ni Cheickh Aoussa ni la CMA n’ont dit cette narration des faits par la Plateforme. Aussi, il est donc clair que ce n’est pas les forces patriotiques de la Plateforme, mais bien la celle de la Coordination qui ont cherché à occuper des nouvelles positions au mépris des arrangements sécuritaires, des accords de cessations d’hostilité et de l’Accord signé le 20 juin, en attaquant la Plateforme.

L’occupation d’Anefis n’est que la suite heureuse ou malheureuse de l’exercice, par les forces patriotiques, de leur inaliénable de légitime défense. On peut les appeler « milices à la solde de Bamako » ou de tous les noms d’oiseaux, ils sont Maliens (comme ceux qu’on cajole), Patriotes reconnus et soutenus par l’ensemble du peuple et ont le droit de se défendre quand ils sont attaqués.

ANEFIS : QUELS ENJEUX ?

Localité dite stratégique, qui ouvre la voie vers Kidal à 80km, Anefis est repris par l’armée malienne le 5 juin 2013, à l’issue de combats l’ayant opposé au MNLA qui a fui pour rejoindre Kidal. C’était avant tout accord (préliminaire ou définitif).
L’Accord préliminaire de Ouaga signé le 18 juin 2013 qui a stoppé la progression des FAMAS et qui a gelé les positions des différentes parties dans ses arrangements sécuritaires, a ordonné aussi le retrait de l’armée malienne d’Anefis et « le déploiement de la MINUSMA à Anéfis et dans la région de Kidal » (article 9).

Au lendemain de la débâcle de Kidal, suite à la visite hasardeuse de Mara, le 17 mai 2014, qui s’est soldé pour le Mali par un honteux cessez-le-feu, les séparatistes appuyés par les alliés narco-terroristes se sont épanchés et éparpillés partout annexant et occupant de nouvelles positions, d’où se sont retirées les forces armées et de sécurité maliennes. C’est ainsi que les rebelles et leurs alliés terroristes ont réoccupé Djebbok, Ber, Ménaka, Ansongo et Anefiss.
Aussi, en toute logique, conformément à l’Accord préliminaire de Ouaga et du cessez-le-feu du 23 mai, les rebelles et leurs alliés terroristes devraient se retirer de ces localités. Or, rien n’en fut. Au contraire ! Ces nouvelles localités occupées ont été considérées comme des positions acquises ad vitam ad aeternam.

La question est, comme Ménaka, pourquoi la Coordination tient tant à Anéfis ? Au-delà de sa situation stratégique de voie d’accès à Kidal, Anefis c’est tout autre chose.
Au-delà de guerre feutrée entre Ifoghas et Imghad qui laisse entre une fracture ethnique aussi de la grande famille touareg et une bataille de positionnement pour les dividendes de l’Accord, l’enjeu du contrôle d’Anefis pour la Coordination semble lié au contrôle et au bénéfice du trafic de drogue, dont Anéfis serait un point de passage important. On comprend dès lors la hargne de la CMA à rester seul maître à bord à Anefis.

Comme pour Ménaka, les pressions internationales ont raison de nos chicanes et de nos divisions. Les forces patriotiques que chacun dit soutenir pour leur engagement pour l’unité nationale et la préservation de l’intégrité territoriale n’ont été soutenues dans cette épreuve que du bout des lèvres.
L’État, accablé et débordé par les pressions sécuritaires de tous bords, en dépit de sa ferme protestation et de ses mises en garde de pure forme quant à la violation par la Minusma de sa souveraineté, ne pouvait que concéder, céder, renoncer, abdiquer. Validant comme lettre à la poste, le plan inique et léonin de sortie de sortie de crise imposé par la Minusma et corroboré par une Médiation internationale qui apporte à cette dernière un soutien tonitruant.

Face au chantage de retrait de la CMA du processus de paix, qui a suspendu sa participation au Comité de suivi de l’Accord, aux pressions de la Médiation internationale, comme en mai dernier, la Plateforme s’inscrivant « sans équivoque dans le cadre de l’Accord issu du Processus d’Alger signé le 15 mai et parachevé le 20 juin 2015 à Bamako » et regrettant que « la médiation n’ait pas jugé judicieux de faire recours aux mécanismes appropriés prévus par l’Accord de paix, notamment en son point I a de l’Annexe II qui institue la CTS », donne son « accord de principe de se retirer d’Anéfis », en contrepartie d’une part du déploiement sans délai des FAMA accompagnées des forces internationales pour des raisons de sécurité des populations et d’autre part de la mise place de « mesures permettant une libre circulation des personnes et des biens sur toute l’étendue du territoire national ».

L’ÉCONOMIE CRIMINELLE

Comment parvenir et imposer la paix dans une zone de non-droit morcelée entre groupes armés et livrée à la loi des armes et à la puissance d’une économie criminelle florissante au vu et au su d’une mission de stabilisation qui dit n’avoir dans son mandat ni la lutte contre la rébellion pour le rétablissement de la souveraineté d’État sur l’ensemble du territoire ni la guerre contre le terrorisme qui se nourrit, chacun le sait, dans cette partie du pays de trafic de drogue et de contrebandes en tout genre ?

Les condamnations vertueuses et les menaces de sanctions à la hussarde peuvent-elles garantir la mise en œuvre d’un accord conclu pour la paix si elles ne sont pas équitables, justes et respectueuses de la souveraineté du pays, perçues et du vécu des communautés ?

En tout cas, la paix ne fleurit pas sur un limon d’injustice. Or, le sentiment raffermi de plus en plus des Maliens que ceux qui sont là pour les aider à faire la paix et à restaurer la souveraineté de leur pays sont plus foncièrement complaisants envers les unes et méprisant envers les autres communautés, pourrait faire le lit d’une stigmatisation et hypothéquer dangereusement le processus paix.
Qu’à dieu ne plaise !

PAR SAMBI TOURÉ

Source: Info-Matin

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