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Japon et Chine : la course à l’influence en Afrique

Le 3 septembre prochain, la Chine va fêter en grande pompe les 70 ans de la fin de la seconde guerre mondiale. Une cérémonie pas vraiment pacifique et qui réunira une trentaine de chefs d’Etat, à l’exception notable des grandes démocraties occidentales. Six pays africains seront représentés dans ce grand exercice de propagande nationaliste comme les aime tant le régime communiste.

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Objectif : humilier le Japon en rappelant les massacres commis par les troupes impériales en Chine et le rôle soi-disant décisif de l’armée chinoise. Le Japon sera bien évidemment absent de cette journée alors que les deux pays sont à couteaux tirés en mer de Chine.

Cette rivalité historique entre les deux grandes puissances asiatiques se retrouve jusque sur le continent africain. « L’Afrique subsaharienne est une donnée importante de la stratégie mondiale pour faire reconnaître leur statut de puissance mondiale », confirme le professeur Lamine Diallo, auteur de Africa in the Age of Globalisation. L’universitaire sénégalais consacre d’ailleurs un chapitre entier de son ouvrage à cette rivalité sino-japonaise en Afrique.

Lire aussi : Comment le krach asiatique va peser sur les investissements chinois en Afrique

Cette nouvelle frontière diplomatique tient d’abord à la véritable boulimie de ces deux pays pour les matières premières. Si l’on connaît déjà l’appétit chinois pour le pétrole, le cuivre, le zinc ou le platine africain, on sait moins que le Japon doit importer pratiquement 100 % du pétrole qu’il consomme, plus de 90 % du gaz naturel et plus de 80% du charbon dont il a besoin. Il faut ajouter à cette liste l’uranium, le cuivre, le fer, le bois et même le coton. L’Afrique et donc vitale pour la survie de l’Archipel.

Mais les deux pays ont une approche très différente de leur politique africaine. Si Pékin est le champion incontesté des investissements économiques et des infrastructures, Tokyo est le leader de l’aide publique au développement. « Sur les 4,2 milliards de dollars que les pays asiatiques ont investi durant l’année écoulée dans la réhabilitation des routes, l’adduction d’eau, le déploiement de réseaux d’assainissement et la construction d’oléoducs et de gazoducs, les investisseurs japonais ont apporté 3,5 milliards de dollars », précise un rapport publié cette année par le cabinet Linklaters.

« Le Japon se positionne désormais comme le contributeur le plus actif au financement des projets en Afrique. Dans ce domaine, le pays du Soleil levant investit près de trois fois plus que la Chine, qui est souvent considéré à tort comme l’investisseur asiatique le plus actif sur le continent ». « En Afrique, le Japon suit une approche calme et discrète alors qu’un grand tapage médiatique accompagne souvent les investissements chinois », commente Andrew Jones, le directeur de la division Afrique du cabinet.

Lire aussi : En Afrique du Sud, l’apprentissage du mandarin se généralise

Mais cette rivalité sino-japonaise n’est pas seulement diplomatique et économique. Elle est aussi militaire. Depuis 2011, le Japon entretient une base militaire à Djibouti. La seule base des forces japonaises d’autodéfense à l’étranger. Les cent cinquante soldats japonais ont d’abord été hébergés dans les installations américaines de Camp Lemonnier, avant d’être basés sur douze hectares à une encablure de l’aéroport d’Ambouli… et de la future base de son grand rival chinois.

En pleine torpeur estivale, les premiers appareils Kawasaki P-1 se sont posés à Djibouti dans le cadre d’exercices de lutte contre la piraterie maritime menés avec les troupes britanniques. Le Japon a investit 40 millions d’euros à Djibouti pour construire cette vaste base dotée d’un terrain d’atterrissage, d’un hangar de maintenance pour ses appareils P3 Orion et d’un centre de commandement et de liaison. Alors que le Japon a jusque-là fait profil bas à Djibouti, le gouvernement nationaliste de Shinzo Abe voudrait transformer cette base en avant-poste de ses troupes à l’étranger.

Autre terrain de concurrence militaire : le déploiement de quatre-cents soldats japonais au Soudan du Sud sous la bannière onusienne. Une mission à laquelle la Chine est également associée avec sept-cents casques bleus. Le Japon abandonne en effet peu à peu sa Constitution pacifiste avec trois objectifs principaux : assurer l’indépendance énergétique et commerciale de l’Archipel , décrocher un siège permanent au Conseil de Sécurité des Nations unies et, surtout, contrôler l’influence grandissante de la Chine et barrer le chemin de sa fameuse « route de la soie ».

Lire aussi : L’Afrique, un terrain de guerre économique entre la Chine et les Etats-Unis

L’an dernier, quarante chefs d’Etats africains se sont rendus à Tokyo pour un sommet Japon-Afrique, le Ticad, censé faire de l’ombre au Forum sino-africain qui se tient lui tous les trois ans avec une prochaine édition prévue dans quelques mois en Afrique du Sud. Le Japon a annoncé à cette occasion une aide à l’Afrique de plus de 8 milliards de dollars sur trois ans et encore 100 milliards pour la construction d’infrastructures dans les pays émergents. Le gouvernement japonais veut axer sa politique africaine sur trois régions principales : le Kenya, avec le port de Mombasa, le Mozambique et la zone portuaire de Nacala, et l’Afrique de l’Ouest autour de la Côte d’Ivoire. La sixième édition du Ticad se tiendra pour la première fois en Afrique en 2016 avec un focus sur la lutte contre la pauvreté.

Pour le Japon, c’est aussi l’occasion de tirer à boulets rouges sur la Chinafrique : « Le Japon ne peut pas offrir de magnifiques bureaux ou de belles maisons aux dirigeants africains, a expliqué non sans humour un porte-parole japonais du ministère des affaires étrangères à des délégués venus d’Afrique. Au lieu de cela, nous venons en aide à l’Afrique et à son capital humain ». Mais dans cette guerre des mots, personne n’est dupe. La politique japonaise doit d’abord servir les intérêts de ses entreprises et assurer les importations en matières premières dont l’archipel est totalement dépourvu. Et sur ce terrain, au moins, le Japon et la Chine sont sur un pied d’égalité.

Sébastien Le Belzic est un journaliste installé à Pékin depuis 2007, où il dirige le site Chinafrica. info, un magazine sur la « Chinafrique » et des économies émergentes.

Le 3 septembre prochain, la Chine va fêter en grande pompe les 70 ans de la fin de la seconde guerre mondiale. Une cérémonie pas vraiment pacifique et qui réunira une trentaine de chefs d’Etat, à l’exception notable des grandes démocraties occidentales. Six pays africains seront représentés dans ce grand exercice de propagande nationaliste comme les aime tant le régime communiste.

Objectif : humilier le Japon en rappelant les massacres commis par les troupes impériales en Chine et le rôle soi-disant décisif de l’armée chinoise. Le Japon sera bien évidemment absent de cette journée alors que les deux pays sont à couteaux tirés en mer de Chine.

Cette rivalité historique entre les deux grandes puissances asiatiques se retrouve jusque sur le continent africain. « L’Afrique subsaharienne est une donnée importante de la stratégie mondiale pour faire reconnaître leur statut de puissance mondiale », confirme le professeur Lamine Diallo, auteur de Africa in the Age of Globalisation. L’universitaire sénégalais consacre d’ailleurs un chapitre entier de son ouvrage à cette rivalité sino-japonaise en Afrique.

Lire aussi : Comment le krach asiatique va peser sur les investissements chinois en Afrique

Cette nouvelle frontière diplomatique tient d’abord à la véritable boulimie de ces deux pays pour les matières premières. Si l’on connaît déjà l’appétit chinois pour le pétrole, le cuivre, le zinc ou le platine africain, on sait moins que le Japon doit importer pratiquement 100 % du pétrole qu’il consomme, plus de 90 % du gaz naturel et plus de 80% du charbon dont il a besoin. Il faut ajouter à cette liste l’uranium, le cuivre, le fer, le bois et même le coton. L’Afrique et donc vitale pour la survie de l’Archipel.

Mais les deux pays ont une approche très différente de leur politique africaine. Si Pékin est le champion incontesté des investissements économiques et des infrastructures, Tokyo est le leader de l’aide publique au développement. « Sur les 4,2 milliards de dollars que les pays asiatiques ont investi durant l’année écoulée dans la réhabilitation des routes, l’adduction d’eau, le déploiement de réseaux d’assainissement et la construction d’oléoducs et de gazoducs, les investisseurs japonais ont apporté 3,5 milliards de dollars », précise un rapport publié cette année par le cabinet Linklaters.

« Le Japon se positionne désormais comme le contributeur le plus actif au financement des projets en Afrique. Dans ce domaine, le pays du Soleil levant investit près de trois fois plus que la Chine, qui est souvent considéré à tort comme l’investisseur asiatique le plus actif sur le continent ». « En Afrique, le Japon suit une approche calme et discrète alors qu’un grand tapage médiatique accompagne souvent les investissements chinois », commente Andrew Jones, le directeur de la division Afrique du cabinet.

Lire aussi : En Afrique du Sud, l’apprentissage du mandarin se généralise

Mais cette rivalité sino-japonaise n’est pas seulement diplomatique et économique. Elle est aussi militaire. Depuis 2011, le Japon entretient une base militaire à Djibouti. La seule base des forces japonaises d’autodéfense à l’étranger. Les cent cinquante soldats japonais ont d’abord été hébergés dans les installations américaines de Camp Lemonnier, avant d’être basés sur douze hectares à une encablure de l’aéroport d’Ambouli… et de la future base de son grand rival chinois.

En pleine torpeur estivale, les premiers appareils Kawasaki P-1 se sont posés à Djibouti dans le cadre d’exercices de lutte contre la piraterie maritime menés avec les troupes britanniques. Le Japon a investit 40 millions d’euros à Djibouti pour construire cette vaste base dotée d’un terrain d’atterrissage, d’un hangar de maintenance pour ses appareils P3 Orion et d’un centre de commandement et de liaison. Alors que le Japon a jusque-là fait profil bas à Djibouti, le gouvernement nationaliste de Shinzo Abe voudrait transformer cette base en avant-poste de ses troupes à l’étranger.

Autre terrain de concurrence militaire : le déploiement de quatre-cents soldats japonais au Soudan du Sud sous la bannière onusienne. Une mission à laquelle la Chine est également associée avec sept-cents casques bleus. Le Japon abandonne en effet peu à peu sa Constitution pacifiste avec trois objectifs principaux : assurer l’indépendance énergétique et commerciale de l’Archipel , décrocher un siège permanent au Conseil de Sécurité des Nations unies et, surtout, contrôler l’influence grandissante de la Chine et barrer le chemin de sa fameuse « route de la soie ».

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L’an dernier, quarante chefs d’Etats africains se sont rendus à Tokyo pour un sommet Japon-Afrique, le Ticad, censé faire de l’ombre au Forum sino-africain qui se tient lui tous les trois ans avec une prochaine édition prévue dans quelques mois en Afrique du Sud. Le Japon a annoncé à cette occasion une aide à l’Afrique de plus de 8 milliards de dollars sur trois ans et encore 100 milliards pour la construction d’infrastructures dans les pays émergents. Le gouvernement japonais veut axer sa politique africaine sur trois régions principales : le Kenya, avec le port de Mombasa, le Mozambique et la zone portuaire de Nacala, et l’Afrique de l’Ouest autour de la Côte d’Ivoire. La sixième édition du Ticad se tiendra pour la première fois en Afrique en 2016 avec un focus sur la lutte contre la pauvreté.

Pour le Japon, c’est aussi l’occasion de tirer à boulets rouges sur la Chinafrique : « Le Japon ne peut pas offrir de magnifiques bureaux ou de belles maisons aux dirigeants africains, a expliqué non sans humour un porte-parole japonais du ministère des affaires étrangères à des délégués venus d’Afrique. Au lieu de cela, nous venons en aide à l’Afrique et à son capital humain ». Mais dans cette guerre des mots, personne n’est dupe. La politique japonaise doit d’abord servir les intérêts de ses entreprises et assurer les importations en matières premières dont l’archipel est totalement dépourvu. Et sur ce terrain, au moins, le Japon et la Chine sont sur un pied d’égalité.

Sébastien Le Belzic est un journaliste installé à Pékin depuis 2007, où il dirige le site Chinafrica. info, un magazine sur la « Chinafrique » et des économies émergentes.

 

Source: sen360

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