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Zones inondables de Bamako : L’angoisse des habitants

Dès que le temps menace, certains habitants de la capitale commencent à s’inquiéter parce que leurs concessions sont régulièrement envahies par l’eau de pluie. Obstruction des caniveaux, constructions dans le lit des rivières, dépôts d’ordures anarchiques… sont à la base de cette situation. Pourtant, les autorités avaient décidé de démolir les habitations à risque

 

Le quartier populaire de Niamakoro occupe un vaste espace sur la rive droite du fleuve. Il bat tous les records d’inondation des concessions et des rues, depuis plusieurs années. «Quand il pleut, j’ai peur», confie un chef de famille dont la concession est installée dans une zone à risque. «Lors de la dernière pluie, dira-t-il, l’eau a pénétré dans nos chambres jusqu’au niveau du lit. Il était 1 heure du matin. J’ai réveillé mes femmes et mes enfants pour qu’ils restent sur leur garde jusqu’au lever du soleil».
Le doyen Maché Doumbia a bâti sa maison au bord d’une rivière. Il y habite depuis 1976. Il déplore le fait que ces dernières années, son quartier figure en tête de la liste des zones inondables. «Tous les drames sont provoqués par les comportements inciviques des habitants», déclare-t-il en colère.

Il fulmine contre le fait que pendant la saison sèche, des habitants du quartier déversent les ordures dans les caniveaux, obstruant le passage de l’eau de ruissellement pendant l’hivernage.
Privée de son passage habituel, l’eau envahit les habitations. Notre interlocuteur a noté que l’année dernière quatre de ses voisins ont vu leurs maisons s’écrouler, suite à de fortes pluies. Les eaux en furie ont tout emporté.

Dans ce quartier, les risques d’inondation sont réels. Les rues sont étroites, les caniveaux débordent d’ordures, des maisons sont anarchiquement construites dans les servitudes de la rivière. «Nous n’accuserons pas les pouvoirs publics d’être à la base de ce qui nous arrive», commente M. Doumbia qui estime que le quartier de Niamakoro sera toujours exposé à des inondations tant que les habitants ne changeront pas de comportement. Conscient des risques que courent les familles, il a décidé de s’investir pour empêcher que le lit de la rivière ne soit transformé en dépôt d’ordures. Mais ses efforts restent vains.

Après les inondations de 2019, les autorités ont décidé de mener une opération de démolition des concessions à risque. Les maisons concernées sont marquées par des croix blanches. Si Maché Doumbia respecte la volonté des autorités, beaucoup de propriétaires ont effacé les croix de leurs maisons parce que le service de l’urbanisme n’est pas revenu à la charge.
Sa famille vit dans le stress pendant la saison des pluies. «Si le temps menace alors que nous sommes en ville, on fait tout pour rentrer vite, car si l’eau déborde, les enfants seuls ne peuvent pas s’en sortir», confie l’épouse de M. Doumbia.

D’une voix cassée, elle raconte que lors de l’inondation de l’an passé, l’eau leur arrivait à la gorge. «Elle a englouti le véhicule de fonction de mon mari. Notre voisine et ses deux enfants ont perdu la vie. Un vieux s’en est sorti avec une jambe cassée», relate-t-elle.

Même le cimetière, situé non loin de la famille Doumbia, n’a pas été épargné. Des tombes ont été éventrées. Il a fallu enterrer des corps à nouveau quand les eaux se sont retirées.

L’année 2019 fut triste pour les riverains du marigot qui traverse Niamakoro. Les conséquences de l’inondation ont été catastrophiques pour les populations de ce quartier.

Des morts, des blessés, des maisons en ruines, des déplacés. Mais une histoire heureuse tout de même. Un jeune homme a reçu une médaille des mains du président de la République pour avoir sauvé plusieurs personnes de la noyade. Le garçon a même été recruté par le service de la protection civile.

1.003 CONCESSIONS CONCERNÉES- Si la saison des pluies est attendue avec beaucoup d’espoir par les cultivateurs, elle annonce le début de l’angoisse pour les habitants des quartiers inondables de la capitale. Les prévisions de la météo ajoutent à l’inquiétude dans ces quartiers. Les quantités de pluies seront supérieures cette année à celle de l’an dernier, assure Mme Diabaté Fatoumata Sangho, cheffe du service prévisions météorologiques.
La saison des pluies 2020-2021 sera humide avec un démarrage précoce par rapport à la norme et une fin prolongée. Des écoulements globalement supérieurs sont attendus dans les bassins du fleuve Niger.

Au regard de ces prévisions, il est recommandé d’éviter l’occupation des zones inondables et de suivre de près les seuils d’alerte dans les différents sites à haut risque d’inondation.

Situé entre deux eaux, l’île ‘’Toukorobadé‘’, occupée par des pêcheurs, est une terre paradisiaque pour les amoureux de la nature. On y accède uniquement à moto ou en pirogue. Le chef du village, Daouda Sineta, témoigne qu’ici, les habitations sont menacées en cas de montée de l’eau du fleuve. L’an passé, la pluie diluvienne a rasé plusieurs maisons. «Heureusement, les autorités ont volé à notre secours avec des vivres et des couvertures», se souvient le vieil homme, reconnaissant.

Le directeur national adjoint de l’urbanisme, Mahamadou Ouologuem, confirme que l’obstruction des passages de l’eau est à la base des inondations dans le District de Bamako. Tout le monde se souvient que les inondations suivies de l’écroulement des maisons ont causé la mort d’une trentaine de personnes à Bankoni en 2013. Le technicien rappelle que les textes de lotissement sont clairs et prévoient la construction à 10 m de la rivière et 25 m quand c’est le fleuve.

Le responsable de l’urbanisme soutient que toutes les maisons anarchiquement construites ont fait l’objet de recensement et cela concerne 1.003 concessions. «Depuis les inondations de 2013, nous avons dépêché des équipes sur l’ensemble des collecteurs, pour constater les constructions sur les servitudes. Les croix blanches ont été peintes sur ces maisons», confirme-t-il, ajoutant que le coût des opérations de démolition a été évalué à 5,5 milliards de Fcfa.

Les discussions sont en cours afin de procéder à la libération des servitudes. Ces espaces une fois libérés, seront aménagés. L’aménagement du pont Diafarana en Commune III, en 2004 a permis d’éviter les inondations et l’occupation anarchique. Rénover ces espaces est la solution aux inondations répétées. Ils serviront de promenades, d’aires de jeux, d’activités de loisirs, et donneront une plus-value aux collecteurs.

Maïmouna SOW

Source : L’ESSOR

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