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Think tank : Refusons la désintégration de la nation malienne

Décidément le Mali n’est pas encore au bout de ses peines. En effet, pendant que l’on assiste à une mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation pour le moins laborieuse pour ne pas dire pénible, l’on annonce la création d’un mouvement politico-militaire Peul dénommé Alliance nationale pour la sauvegarde de l’identité peule et la restauration de la justice (Ansiprj). Le mouvement  qui dit  se démarquer  du jihadisme, est exclusivement dédié, selon son premier responsable un certain Oumar Aldiana, un enseignant de 27 ans, à la protection des civils peuls  qui seraient victimes d’exactions de la part de l’armée malienne  et de milices armées par le gouvernement.

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Au-delà de l’événementiel, ce nouveau développement n’est pas pour étonner outre-mesure un observateur avisé de la scène malienne depuis l’éclatement de la crise. Depuis longtemps, le Mali était le pays à abattre. Et il a offert le flanc. A cause de la cécité stratégique et de la mauvaise gouvernance de ses dirigeants.  Pour Sarkozy, celui par qui la crise malienne est  arrivée, l’objectif était, on ne peut plus clair : il fallait déclencher les forces centrifuges  et au bout du processus provoquer la désintégration de la nation malienne pour arriver à assouvir ses ambitions géopolitiques. En somme, la théorie du chaos si chère aux Américains. Chez nous, ne dit-on pas que c’est en eau trouble que les gros poissons se révèlent au pêcheur ? Afin d’y parvenir, il faut exploiter au maximum « les tares de ces tarés ». Jouant, tel un beau diable, à la fois  sur plusieurs  tableaux et faisant d’une pierre plusieurs coups, il déstabilise la Libye, fait assassiner le colonel Kadhafi, favorise la création du MNLA et reçoit ses membres à l’Elysée. Les germes de la crise malienne sont semés et il fallait attendre que le temps fasse son effet pour aller cueillir le fruit mur.

Entretemps, Nicolas Sarkozy est chassé du pouvoir par le peuple français. Par la voie des urnes. La malédiction des Maliens est-elle passée par là ? Le poison qu’il a inoculé n’en continuera pas moins à faire son effet au Mali. L’opération Serval est déclenchée par son successeur à l’Elysée, François Hollande. Pour stopper la dangereuse progression des narco-jihadistes réunis à l’époque sous la férule d’un certain Iyad Ag Ghaly d’Ançardine à Konna. Ce conglomérat du crime international organisé  – comprenant, outre Ançardine, AQMI et le MUJAO – ayant bouté le MNLA sur tout le territoire national était prêt à fondre sur Bamako. Hollande « l’humaniste » est venu éteindre le feu allumé par  le pyromane Sarkozy. Le feu a-t-il été totalement circonscrit ? On peut en douter. Iyad Ag Ghaly, frustré de n’avoir pas réduit le Mali en poussière, a miraculeusement échappé aux bombes françaises.

Inscrit sur la liste noire des Américains comme terroriste dont la tête est mise à prix, il n’en continue pas moins de se pavaner dans le Sahel. Poussant l’audace, voire la témérité jusqu’à produire des tentacules au centre et au sud du Mali. Via notamment un certain Amadou Kouffa, un prédicateur peul aux prêches enflammés avec qui il s’est acoquiné. Et dont des adeptes ont pu commettre des coups de main sanglants contre l’armée et même des civils. Cette situation est donc à l’origine de l’imbroglio devant  lequel nous nous trouvons aujourd’hui. Les plus hautes autorités du pays  doivent trouver en elles  les ressources morales et intellectuelles nécessaires pour désamorcer à temps la bombe. Certes, il s’agit de faire preuve de fermeté dans le traitement du dossier, mais aussi d’agir  avec beaucoup de discernement.

Autant il faut combattre avec l’extrême rigueur  les jihadistes et les extrémistes tous bords, autant il faut il  faut faire preuve de doigté, faire attention aux dérapages, aux suspicions sans fondement, aux amalgames  et autres délits de faciès. Nous avions écrit, plus d’une fois dans ces colonnes, que tous les Touaregs n’étaient pas des rebelles, que ceux-ci ne constituaient qu’une infime minorité et que, dans leur écrasante majorité, les Touaregs  ne cherchent qu’à vivre en bonne intelligence avec les autres composantes de la société malienne. De même, il faut admettre que tous les Peuls ne sont pas des jihadistes ou des jihadistes en puissance. Il urge donc d’éviter les amalgames.  En ces moments graves où la nation est en face de périls nouveaux, il est capital que, au-delà des gouvernants, tous les Maliens- politiciens de tous bords, société civile, journalistes, artistes, hommes de culte -fassent véritablement une union sacrée autour du pays. Les jeunes du mouvement Ansiprj et tous ceux qui les soutiennent doivent revenir à de meilleurs sentiments et déposer les armes, le cas échéant. Ils doivent savoir qu’il n’y a rien de glorieux ni d’héroïque  à prendre des armes contre son propre Etat. En retour, l’Etat doit assurer  ses devoirs régaliens de garantir la sécurité à tous les citoyens, dans leurs personnes et leurs biens, sans considération de la couleur de la peau, de l’ethnie, de la langue, de la culture ou de la religion. Il doit maintenir le fléau de la balance à égale distance entre toutes ses filles et tous ses fils. Et avoir l’humilité de reconnaitre que des dérapages ont pu être commis afin de rectifier le tir.  On est Malien avant d’être Dogon, Bambara, Songhoï, Bwa, Soninké, Senoufo, Malinké, Touareg, Arabe, Bozos, Dafing, Minianka, Maure,  Métis ou Peul…

Des bords de l’Océan Atlantique au Sénégal aux confins des massifs de l’Adamaoua au Cameroun en passant par les contreforts du Fouta Djalon en Guinée, le Niger, le Burkina Faso, le Nigeria et l’Ethiopie, les Peuls, dont beaucoup ne parlent pas la langue à cause des brassages et des vicissitudes de l’histoire,   constituent généralement la deuxième composante ethnique du pays. Ils n’ont pas donc vocation à déstabiliser les pays, mais d’être un ciment entre les différentes composantes.

Les Maliens ne doivent pas tomber dans le piège tendu par  l’ennemi. Au contraire, ils doivent démontrer à la face du monde entier que leur pays  est une vieille nation, qui fut quand beaucoup d’autres n’étaient pas encore, y compris en Europe. Et le Mali  d’attester, de la manière la plus éloquente, que sa réputation de pays de brassage n’est pas surfaite et qu’il a inventé la première Constitution du monde, la Charte de Kurukan Fuga en 1236 et le Sinankounya ou le cousinage à plaisanterie que beaucoup nous envient à travers le monde. Et que c’est sur un tel roc que viendront se briser toutes velléités  d’assujettissement d’où qu’elles viennent.

Yaya Sidibé  

Sourc : 22 Septembre

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