Pour livrer leur part de vérité sur les « dérives de la justice » face aux tensions religieuses, aux incarcérations de certains militants et « appels aux meurtres des kamites » répandus sur les réseaux sociaux, les responsables du collectif des traditionnalistes et pratiquants du culte des ancêtres du Mali se sont confiés, le 29 avril dernier, aux hommes de médias. C’était à la faveur d’une conférence animée à la Maison de la presse.
Avec à leur tête Moussa Kiba Doumbia, leader du mouvement ; Aménophis I. Traoré, membre du collectif et Balla Diarra, ils étaient venus nombreux pour se faire entendre au sujet de l’actualité dominante du jour. C’est-à-dire, clarifient-ils, « l’injustice » autour de la désescalade des tensions religieuses au Mali, voire l’incarcération de certains pratiquants du culte des ancêtres de ce pays. Être kamite, indique-t-on, ce n’est pas être contre une religion. C’est pour plutôt s’identifier à la culture et à l’héritage des ancêtres méritants de ce pays. Lesquels ont fondé la civilisation universelle, lit-on dans leur déclaration. Le kamitisme ou la kamitude regroupe les vodouisants, les Komotigui, les féticheurs et chaque pratiquant du culte de ses ancêtres négro-africains. C’est un concept fédérateur de toutes les spiritualités authentiques africaines. Le Mali, berceau de plusieurs empires est connu pour sa tradition de tolérance et de coexistence entre les différentes communautés ethniques et religieuses qui composent sa population. Aux dires des conférenciers, tous les villages de ce pays ont été fondés par les chasseurs et les ancêtres traditionnalistes. Chose qui a été faite des années ou siècles durant avant l’avènement de la religion musulmane ou chrétienne au Mali. Aujourd’hui, s’interrogent-ils, comment se fait-il que ceux qui, par le passé, étaient minoritaires et qui ont bénéficié de la protection de la société veuillent nous (kamites) imposer leur vision du monde à l’image des esclavagistes arabo-musulmans et occidentaux ? « Notre pays vit cette situation de crise parce que nous avons trahi nos ancêtres et cessé de suivre leur chemin. Il va falloir se racheter pour sortir de cette situation pénible », ont-ils conseillé. Sur la base des vidéos qu’ils ont présentées au public, les conférenciers annoncent que plusieurs appels au meurtre des Kamites ont et continuent de circuler sur les médias sociaux. Des gestes auxquels se livrent certains leaders religieux sans être inquiétés, déplorent-ils. Puis de rappeler que Doumbi Fakoly, libéré courant le vendredi 28 avril 2023 avait été interpellé puis condamné pour des faits liés aux tensions religieuses. Cinq (5) autres jeunes kamites ont été également indexés dans le dossier par le tribunal de grande instance de la commune IV de la capitale malienne. De nos jours, certains se trouvent encore en prison. Sollicitant leur libération pure et simple, la communauté kamite du Mali rappelle avoir déposé, en mois de novembre 2022 devant le même tribunal de la commune IV de Bamako, une plainte contre les imams Mohamed Mahi Ouattara, Ayouba Touré, Ibrahim Moussa Diaby et Abdoul Malick Traoré, pour « des faits de mépris, d’insulte, de blasphème et d’incitation à la haine contre les traditionnalistes et pratiquants du culte des ancêtres » par voie de réseaux sociaux et d’internet. Et de préciser que les mêmes personnes ne sont pas encore entendues par la justice. Le droit est-il dit au nom d’une communauté ou du peuple malien composé des citoyens de différentes confessions ? S’interrogent les Kamites. Ces faits illustrent le dysfonctionnement de la justice au Mali, soumise aux pressions politiques et religieuses qui ne garantit pas, selon eux, l’égalité des citoyens devant la loi. Aussi, ont-ils estimé, les dérapages entre coreligionnaires sont malheureusement fréquents sur les réseaux sociaux devant un Etat impuissant. D’où l’appel de la communauté kamite aux autorités compétentes à la préservation absolue des droits et libertés des pratiquants du domaine dans un Mali qui se veut laïc et démocratique. Ils invitent les autorités à prendre des mesures urgentes et idoines susceptibles de mettre un terme à la « dérive » en cours dans le pays.
Mamadou Diarra
Source : LE PAYS