Le Mali semble être devenu le pays de tous les scandales. Après l’agression du président intérimaire dans ses propres bureaux par une foule en colère et la nomination du capitaine Sanogo au grade de général, les Maliens se donnent encore en spectacle. En effet, un scandale inattendu et jamais vu en diplomatie est arrivé à Ouagadougou, dans la capitale Burkinabé. L’ambassadeur malien sortant, Mamadou Traoré, dans l’attente de ses titres de rapatriement, a été rejoint par l’ambassadeur rentrant, Drissa Coulibaly, Secrétaire Général de l’UDD, le parti de l’actuel ministre des Affaires Etrangères.
« Selon les textes, lorsqu’un diplomate est rappelé dans son pays, il bénéficie de titres de rapatriement avant de quitter son lieu d’affectation. »,explique une source diplomatique. Or avant même de recevoir ces titres de rapatriement, l’ambassadeur en poste à Ouagadougou a commencé à être constamment harcelé au téléphone par celui qui a été nommé à sa place. Le sortant fait mine de ne rien entendre. Il continue à donner ses ordres aux employés et entend observer cette attitude jusqu’à ce que la passation de services soit faite. Logé dans un hôtel de luxe de Ouagadougou aux frais du contribuable malien et pressé de prendre la place à laquelle il a été nommé, le tout nouvel ambassadeur, Coulibaly, a poussé le bouchon jusqu’à vouloir chasser de force son homologue en place. La semaine passée, Coulibaly s’est rendu à l’ambassade du Mali à Ouagadougou. Reçu par son collègue en place, il lui reproche de se maintenir en place malgré un décret qui le relève. L’autre répond qu’il n’a pas encore reçu ses titres de rapatriement, à savoir une notification de la décision de relevée accompagnée de fonds destinés à l’évacuation de l’ambassadeur et de sa famille. Par conséquent, Traoré refuse de libérer les bureaux et la résidence d’ambassadeur tant que ces titres de rapatriement ne lui auront pas été remis.
Altercation. Injures. Les deux diplomates se tiennent par le collet de la veste, tels des lutteurs sénégalais en compétition. Les services de sécurité du pays d’accueil, alertés par les employés de l’ambassade, refusent d’intervenir dans une affaire qu’elles jugent ridicule et honteuse. Les esprits ont fini par se calmer et les deux lutteurs, après s’être mesurés au corps-à-corps, ont compris qu’il valait mieux arrêter là le spectacle. En attendant, le personnel de l’ambassade ne sait plus à quel Saint se vouer ni les ordres de quel ambassadeur exécuter (le sortant ou le rentrant ?).
Plusieurs autres missions diplomatiques du Mali à travers le monde sont en ébullition.
En effet, les victimes du Décret no 552/ P-RM du 4 Juillet 2013 rappelant 12 Ambassadeurs et Consuls Généraux crient à l’injustice. Certains ayant à peine 2 ans de service se sont vus remplacer par des amis et parents de Dioncounda Traoré, de son Ministre des Affaires Etrangères, Tieman Hubert Coulibaly, voire de l’ex-junte militaire. Le grand paradoxe, nous révèle-t-on, c’est qu’au niveau du département des Affaires étrangères, on demande aux diplomates en congé de préfinancer leur retour au Mali, faute de liquidités au trésor public. Un Fax n° 667/ MAECI du 16 Mai 2013 a été adressé en ce sens aux diplomates limogés. Pire, il est vivement recommandé aux ambassadeurs nouvellement nommés de rejoindre le plus rapidement possible leurs postes d’affectation avant … l’installation duPrésident élu IBK. D’où des scènes de ménage du genre de celui intervenu à Ouagadougou. Pauvre pays!
Abdoulaye Guindo
Source: Procès Verbal