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Report du référendum: la décision ne date pas de vendredi

Annoncé, dans la nuit de vendredi à samedi, le report du projet de révision constitutionnelle était en réalité dans le pipeline. Et pour cause !

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Ce n’est pas l’ultimatum du 15 août dernier, pour le retrait pur et simple du projet de révision constitutionnelle, lancé par la Plateforme ‘’An tè a bana-Touche pas ma constitution’’ qui a eu raison de l’initiative présidentielle. La preuve, ce n’est pas le 14 août, veille de l’expiration dudit, ultimatum, qu’il a été décidé de surseoir au projet. Et mieux, il n’a pas non plus été question de retirer ledit projet tel qu’exigé par la Plateforme. Le Président de la République a décidé d’y surseoir.
Si l’annonce a été faite seulement samedi dernier, des indices laissaient croire que la décision a été prise bien en amont.

Les réserves de la Cour constitutionnelle
Le premier indice porte sur les réserves de la Cour constitutionnelle dans son Arrêt du 4 juillet 2017. En effet, la Cour, dans son Arrêt déclare : ‘’sous les strictes réserves et observations portant sur la mouture de la loi, sa date d’adoption ainsi que les articles 37, 47, 48, 61, 110, 115, 119, 145 et 148, la Loi n° 2017-31/AN-RM du 02 juin 2017 portant révision de la Constitution du 25 février 1992 est conforme à la Constitution’’. Ainsi, si la constitutionnalité de la Loi n’est pas mise en cause, il n’en demeure pas moins que c’est une dizaine d’articles qui font l’objet de réserve. Ce qui jette un doute sur le sérieux du travail de préparation de la loi référendaire.
L’on est d’autant plus fondé à le croire qu’il y a eu erreur même sur la date du vote d’adoption de la Loi, le 3 juin au lieu du 2 juin 2017. La Mouture n’a pas agréé les augustes membres de la Cour.
L’article 37 occulte, dans la formulation du serment du Président de la République, sans aucun amendement relatif à cette disposition, la garantie de ‘’l’indépendance de la patrie et l’intégrité du territoire national’’, deux préceptes de valeur constitutionnelle non dissociables du serment prévu dans l’article 37 de la Constitution du 25 février 1992.
L’article 48 (nouveau) omet l’accréditation des ambassadeurs et des envoyés spéciaux auprès des organismes internationaux, privant ainsi le Président de la République, d’un droit régalien ; qu’il convient de corriger cette omission.
L’article 145 dispose : ’’la présente Constitution sera soumise au référendum…’’ ; alors que s’agissant d’une loi de révision, il convient de dire plutôt : ‘’la présente loi portant révision de la Constitution sera soumise au référendum’’.
L’article 148 ainsi libellé : ‘’la présente révision constitutionnelle n’emporte pas novation de République’’ ; alors que pour mieux traduire la continuité de la troisième République, il convient de remplacer ‘’NOVATION’’ par ‘’CHANGEMENT’’.
Ces insuffisances relevées par la Cour constitutionnelle étaient suffisantes pour que le Président de la République songe à revoir de plus près cette loi référendaire que les juges constitutionnels ont gentiment renvoyée à l’Assemblée nationale.

La session extraordinaire
Un autre indice, et non des moindres, porte sur le décret de convocation de l’Assemblée nationale en session extraordinaire. L’ordre du jour de la session extraordinaire porte sur : le projet de loi portant Code des Collectivités territoriales ; le projet de loi déterminant les conditions de la libre administration des Collectivités territoriales ; le projet de loi portant Statut particulier du District de Bamako ; le projet de loi portant modification de la Loi n° 2016-056 du 21 décembre 2016 portant Loi de Finances pour l’exercice 2017 ; le projet de loi relatif aux fondations ; le projet de loi portant création du Fonds pour le Développement durable ; le projet de loi portant modification de la Loi n° 06-067 du 29 décembre 2006, modifiée, portant Code général des Impôts ; le projet de loi portant institution de taxes et prélèvements divers.
Comme on peut le constater, il n’est pas fait mention du projet de Loi constitutionnelle qui, dans le schéma initial, devait être voté au cours de cette session extraordinaire. Au regard de la date de convocation de l’Assemblée nationale, il est donc permis de soutenir qu’au moins, depuis le 8 août dernier, la décision avait été prise, par le Président de la République, de surseoir à son initiative de révision constitutionnelle.
En se référant aux réserves de la Cour constitutionnelle, dans son Arrêt du 4 juillet 2017, il y lieu de croire que cette décision avait été prise plus longtemps qu’on aurait pu le croire.

Le piège
À ces deux signes avant-coureurs, il faut ajouter la préservation du climat social qui devient un impératif dans le contexte qui est le nôtre où une stratégie de pourrissement se mettait en place en prenant pour prétexte le projet de révision constitutionnelle. Pour le Président de la République, qui reste convaincu de la pertinence de son projet, il n’était pas question de marcher dans la voie sans issue balisée pour lui par ses opposants qui ont préféré choisir la rue pour s’exprimer avec toutes les dérives qui y sont liées.
D’un point de vue purement politique, pour avoir vieilli sous le harnais, IBK n’a pas senti sa majorité faire bloc derrière lui. Nonobstant un réveil tardif, avec quelques coups d’éclat, elle est restée très timorée, laissant largement le terrain à ses adversaires qui s’en sont donné à cœur joie. Dans cette situation d’indécision aussi criarde, ce serait un pari hautement risqué pour le Président IBK d’aller au référendum.
Parallèlement, il faut noter un déficit de communication autour du projet de texte. La version la plus servie aux Maliens étant celle des partisans du ‘’NON’’ qui caricaturent, naturellement, à souhait ledit projet de loi. N’ayant pas une culture de lecture (y compris dans le cercle des intellectuels), beaucoup se contentent de cette version travestie.
Dans la même logique politique, il faut intégrer le point de vue de la Coordination des mouvements armés (CMA) qui ne semble pas trouver son compte dans le projet de loi référendaire. Pour elle, la régionalisation devrait clairement figurer dans le texte, pour s’assurer de son applicabilité. Ce qui n’est pas le cas. Les députés voyant en cette inscription, une menace pour l’unité nationale, l’ont enlevé du projet de loi référendaire qui a été voté par 111 voix pour 35 contre.
In fine, le report du vote référendaire devrait satisfaire toutes les parties (exception faite des putschistes politiques), en ce sens qu’il permettra une meilleure prise en compte des préoccupations des uns et des autres.

Par Bertin DAKOUO

 

Source: info-matin

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