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Régionalisation et mise en œuvre de l’accord pour la paix au Mali : les pièges à éviter !

La mise en œuvre de l’accord pour la paix est un chantier institutionnel fondateur. C’est pourquoi le gouvernement a des écueils à éviter, pour en assurer le succès. La régionalisation consolide aussi les droits au pluralisme culturel et le respect des spécificités locales. S’y ajoute la fonction économique et de développement qui se fonde sur l’application de politiques économiques intégrées valorisant les ressources et les potentialités régionales et permettant d’avoir des régions aptes à impulser le développement et la création de pôles régionaux en totale cohésion.

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La régionalisation permet également de passer outre la gestion administrative bureaucratique en adoptant une gestion optimisée privilégiant l’efficience et la proximité dans le cadre de la responsabilité, la légalité et la transparence. Autre bienfait du processus, celui de faciliter l’intégration et la cohésion spatiales et sociales.

Ce processus vise non seulement à remédier aux dysfonctionnements juridiques, administratifs, financiers et humains, mais aussi à parvenir à une bonne organisation régionale et de mettre un terme à certaines revendications autonomistes -et non séparatistes- de la part de quelques régions tentées de mettre en avant leur particularité culturelle.  Il y a, bien évidement, le mimétisme, le copier-coller qui est dangereux.

S’il faut s’inspirer de ce qui a fonctionné dans de grandes démocraties, il n’est pas question d’évacuer le contexte national, sinon au prix d’un risque très fort d’échec. Manifestement, les régions actuelles ne correspondent pas aux entités concernées par l’accord pour la paix. Elles n’ont pas la cohérence désirée et le potentiel pour faire de la régionalisation une clé du développement intégré.

Elles ont été conçues dans un souci électoraliste, sécuritaire, dans un Mali d’un autre temps. Il est donc nécessaire de veiller à une cohérence territoriale basée sur les flux économiques, actuels ou à venir. Les aspects culturels, historiques sont bien sûr importants, sans que l’on puisse en faire un déterminant qui transcenderait la logique économique. Car le risque est de voir les régions coïncider avec des critères tribaux ou, pire, ethniques.

On voit déjà ici et là des tentations de ce genre surgir dans certains discours. Cela constituerait une double erreur. Politiquement, une régionalisation sur des bases ethniques finirait par mettre à mal l’unité du pays et raviver les querelles ancestrales. Enfin, il est évident que les dévolutions de compétences ne peuvent concerner l’éducation nationale, parce que l’école doit rester un creuset d’intégration et les diplômes garder leur caractère national.

Il est important d’ouvrir un débat citoyen, riche et aminé sur la mise en œuvre de la régionalisation. Car, il s’agit là, répétons-le, du plus grand chantier du Mali indépendant, rien de moins. Le chantier de la mise en œuvre de l’accord pour la paix doit susciter partout de larges débats desquels doivent ressortir de nouvelles idées. Ce qui pourrait aider les autorités chargées de sa mise en œuvre dans leur travail de réflexion.

Il est indispensable d’avoir une vision claire à plusieurs niveaux dont celui relatif à la nature des institutions régionales prévues. À ce propos, il faut  créer des institutions démocratiques dotées de moyens matériels et humains et destinées à jouir de prérogatives réelles qui ne laissent pas de place aux organes purement formels. Moyens qui font défaut dans l’expérience de la décentralisation menée jusque-là.

La même clarté de vision doit se retrouver dans certains aspects de la bonne gouvernance territoriale, au niveau notamment des prérogatives entre les différents niveaux territoriaux (centre, région, localité). Ces aspects font défaut dans l’expérience actuelle de la décentralisation, surtout en ce qui concerne la loi portant organisation des régions. Même s’il définit certaines compétences propres et d’autres transférées ou encore consultatives, ce texte n’échappe pas aux généralités qui engendrent des conflits de compétences et une dilution des responsabilités. S’y ajoute le problème de moyens.

L’accord pour la paix au Mali est t-il synonyme d’autonomie ?

La régionalisation, telle que définie dans l’accord pour la paix, qui entre dans le cadre d’un changement interne pouvant être encadré par la constitution et les lois nationales, suppose la mise en place d’une série de mesures qui permettent d’élargir la régionalisation administrative au niveau de certaines prérogatives et/ou certains moyens financiers et humains. Elle pourrait permettre aussi de passer d’un mode électoral indirect à un autre direct en lien avec les élections des Conseils régionaux, sans que cela signifie une régionalisation politique dont l’autonomie est l’une des formes.

Quant à l’autonomie, il est à noter qu’elle traduit un système de gestion régionale qui peut mener à l’indépendance existentielle des organes décentralisés de différentes régions dans le cadre de la souveraineté et de l’unité nationales. C’est là un degré maximal que peut atteindre un Etat unitaire n’optant pas pour le fédéralisme. Il faut rappeler que la régionalisation avancée ou élargie ainsi que l’autonomie sont devenues des modes de gestion territoriaux modernes. Mais le choix de l’un ou l’autre mode dépend de la nature fédérale ou unitaire de chaque Etat…

L’étendue de la régionalisation pourrait même différer à l’intérieur d’un même Etat régionalisé. Dans ce cadre, les régions du Nord pourront ainsi bénéficier de larges compétences en comparaison avec d’autres régions du Mali jouissant d’une régionalisation poussée, surtout si une solution politique négociée et définitive était trouvée sur la base des négociations avec les différents groupes armés.

Quoi qu’il en soit, et malgré les différences internes qui pourraient exister en matière de régionalisation et d’autonomie, leurs points communs restent la souveraineté de l’Etat et son unicité… Il est important de poser cette question pour qu’on puisse lever toute équivoque. La régionalisation dans sa définition la plus simple renvoie à la possibilité donnée aux citoyens dans une zone territoriale donnée à gérer leurs affaires par eux-mêmes à travers des instances régionales élues ayant des prérogatives et des moyens pour réaliser le développement local.

Mais, sans rupture avec l’Etat et l’autorité centrale. C’est-à-dire que la régionalisation n’est pas synonyme d’indépendance, ni de morcellement. Elle est plutôt une forme de gestion locale dans le cadre d’un seul et même Etat. Par contre, l’autonomie est régie par des règlements internationaux. Elle se recoupe toutefois avec la régionalisation en ce qui concerne les instances élues localement, les prérogatives et les moyens dévolus à la région.

Séga DIARRAH

Source: Le Reporter

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