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Que sont-il devenus ? Idrissa Traoré dit Poker : Un joueur extraordinaire !

L’homme aura marqué son temps par son talent. Durant toute sa carrière, il s’est distingué par ses qualités de joueur complet. Tous ceux qui l’ont connu dans son quartier ou dans les stades du Mali et d’Afrique retiennent de lui un homme qui ne triche pas et qui met son cœur à la bataille. Lui, c’est Idrissa Traoré dit Poker, ancien joueur du Djoliba et ancien capitaine de l’équipe nationale du Mali. Après ses premiers pas aux Diables Rouges de N’Tomikorobougou, il finit par rejoindre son club de cœur pour y tracer l’une des plus belles pages de son histoire, avec les Seyba Coulibaly, Youssouf Sidibé, Bourama Traoré, Sory Kourouma, Seyba Sangaré, Mamadou Sidibé dit Décossaire, Fantamady Diarra “Gobert”, Oumar Diarra dit Barou, Cheick Salah Sacko, Kader Guèye, Ilias Oumar Dicko, Abdoulaye Koumaré “Muller”, Ousmane Diallo alias Petit Sory, Mohamed “Youba” Cissé, et autres. Aujourd’hui encore, Poker continue de servir le football, une discipline “qui lui a tout donné”, selon lui. Il n’a pas été facile de le retenir pour 30 minutes ou une heure de temps à cause de son emploi du temps. Mais il le fallait, à tout  prix. Parce que l’homme mérite un hommage, à l’instar de tous ces Anciens qui ont marqué l’histoire du sport malien.

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Idrissa Traoré dit Poker  fait partie des héritiers qui ont pris la relève  de ceux-là qui ont donné un renom au Mali, à travers les Jeux africains de Brazza en 1965 et la CAN de Yaoundé 1972. L’enfant de N’Tomikorobougou est aussi l’un des acteurs de ce groupe qui a fait la gloire du Djoliba AC dans les années 1970 -1980, avec comme mentor un certain Tiécoro Bagayoko.

Monsieur penalties !

Idrissa Traoré Poker avec feu Mamadou Keita dit Capi et Tidiane Niambele

En parlant de Poker, on se rappelle de ce milieu défensif, reconverti par  la suite libéro, bref un  joueur constant, discipliné et peu bavard, malgré les provocations de ses cadets lors des séances d’entrainement du Djoliba au Stade Mamadou Konaté.

Spécialiste des penalties, il n’a raté ce coup de pied qu’une seule fois durant sa carrière. Et c’est le gardien de l’As Biton de Ségou, Cheick Oumar qui le défia. Hormis cet accident de parcours, tous les portiers maliens ont payé cher cette qualité exceptionnelle de Poker. Au plan international, seul le gardien du Mouloudia Pétrolier Club d’Alger a réussi ce miracle de repousser le coup de pied de réparation de Poker au milieu des années 1980.

Idrissa Traoré dit Poker :

Avec son 1m,90, Idrissa Traoré avait aussi la particularité d’être un joueur élégant et moins agressif. Il ne posait un tacle que dans les situations extrêmes. Ce n’est pas le latéral guinéen Cheick Keïta dit Cocody qui dira le contraire. Lui qui a été traqué sur son couloir gauche, en tentant de déclencher une action offensive. C’était en 1982 lors des éliminatoires de la Coupe d’Afrique des clubs champions, où le Djoliba affrontait à Bamako le Hafia Football Club de Conakry. Au match retour, les Rouges se sont inclinés par le minimum d’un but à zéro, but  marqué sur penalty. Dans cette rencontre, on n’oubliera jamais le comportement malhonnête de l’arbitre marocain Mohamed Larache pour avoir accordé un penalty imaginaire aux Guinéens, expulsé Poker pour avoir protesté, alors qu’il était capitaine d’équipe. Notre héros du jour a encore en mémoire ce jour où le monde s’est écroulé sur bon nombre de Maliens parce que cette génération des Rouges avait la valeur et pouvait faire mieux, si son  élan n’avait pas  été estropié par un arbitrage partial.

Quand nous avons rafraichi sa mémoire sur l’action  de Cheick Kéïta dit Cocody, Poker se rappelle bien comme si c’était hier, tout en précisant que la majorité de ses tacles étaient réguliers. Autrement dit, il jouait le ballon et non la personne. Mais, ce qui est évident, Poker posait ses tacles pour mettre fin à un danger permanent.

Le doyen Mamadou Diarra de L’Essor, une sommité de la presse sportive estime qu’il faut classer Poker parmi la génération post indépendance, qui s’est distinguée par son abnégation, son sens élevé de l’amour de la patrie. Que ça soit au Djoliba ou à l’équipe nationale, Poker s’est toujours battu avec un cœur de lion.

Pour Abdoulaye Kanté dit Adou Kanté du Stade malien de Bamako, son compagnon de chambre en équipe nationale, Idrissa  Traoré était  un joueur extraordinaire, doté d’un double don: l’humanisme et le  social.

Protégé de Capi !

Ces qualités et autant d’autres qui ont caractérisé la carrière de Poker ont incité Mamadou Kéïta “Capi” à lui faire appel lors de la CAN de Tunis de 1994 pour l’assister dans l’encadrement technique. Ce clin d’œil de l’ancien entraîneur des Aigles du Mali et du Stade malien de Bamako, s’explique par les rapports, et surtout l’estime et la considération qui ont marqué leurs relations. Parce que Poker a évolué en équipe nationale avec Capi après la CAN  de Yaoundé 1972, et par la suite l’ancien gardien des Aigles sera son entraîneur.

Poker se rappelle encore que dès sa prise de fonction, Capi est allé voir le ministre des Sports de l’époque Maître Boubacar Karamoko Coulibaly pour lui faire part de son intention de travailler avec  un joueur qui l’a beaucoup marqué durant sa carrière, en l’occurrence, Idrissa Traoré dit Poker. L’histoire sur les faits, la bonne exemplarité  de Idrissa Traoré dit Poker n’en finissent pas. Partout où il passe, l’enfant de N’Tomikorobougou y laisse une bonne impression.

Avec le recul, nous comprenons pourquoi il dit avoir tout gagné dans le football malien. Une discipline qui lui a permis d’avoir du boulot, d’abord à la Société nationale des tabacs et allumettes  du Mali (Sonatam) à travers la coupe Corpo ; ensuite au stade Omnisports, puis au stade Mamadou Konaté, deux structures où il était chargé de l’entretien des installations électriques, en sa qualité de technicien dans le domaine.

Aujourd’hui encore, il est employé au stade du 26 Mars. Cette opportunité créée par le football lui fait oublier toutes les souffrances de sa carrière, où les primes étaient quasi inexistantes au Djoliba et dérisoires en équipe nationale. Seulement, les supporters faisaient des gestes en cas de victoire, et Tiécoro Bagayoko les motivait par des promesses conséquentes lors des grands derbys, et les finales de coupe du Mali. Raison pour laquelle Poker pense que la comparaison entre  une période où les jeunes se battaient pour le plaisir, l’amour de la patrie, est difficile avec celle d’aujourd’hui avec la révolution que le football connait. Cela est la chance de ses  enfants et jeunes frères. Cependant Poker regrette  que les résultats escomptés ne tombent pas au niveau des seniors, eu égard aux meilleures conditions concernant les internats, les voyages et mêmes les primes de matches.

Avec le Djoliba AC, il a gagné huit (8) coupes du Mali. La défaite face à l’As Réal de Bamako en finale de la coupe du Mali en1980 reste son plus mauvais souvenir, ainsi que toutes ces finales perdues en 1984, 1985 et 1986.

En équipe nationale, la lourde défaite infligée par l’Algérie au Mali en avril 1981 à Oran (5-1) lors des éliminatoires de la CAN de 1982  reste un très mauvais souvenir pour Poker.

A force de faire plusieurs va-et-vient dans  la famille Traoré, sise à N’Tomikorobougou, une certaine familiarité s’est créée entre nous. Parce que Poker a un programme chargé. Les week-ends, il sort très tôt pour s’occuper d’une école de formation. Finalement nous avons pu lui rencontrer la nuit, juste quand il s’apprêtait à dîner. Venu nous accueillir sur sa terrasse, nous n’avons pas hésité à lui dire que nous sommes nostalgiques  de ses relances et de ses couvertures de balle. Bref, nous regrettons sa retraite, convaincus qu’il a pris l’âge et tout en sachant que chaque chose en son temps.

La retraite sur fond d’amertume

Mais Poker a une autre explication pour nous faire savoir qu’il a toujours eu un goût amer en pensant à ces temps et surtout aux circonstances qui l’ont poussé à mettre un terme à sa carrière.

Celui qui a intégré en 1968 la catégorie minime du Djoliba raconte : ” En finale de la coupe du Mali de 1986  qui a opposé le Djoliba au Stade malien de Bamako, suite à une incompréhension entre le gardien, Karamoko Diané et moi, l’attaquant stadiste, Mahamadou Cissé “Tostao” a marqué. Tout de suite, on a conclu à mon erreur et j’ai été traité de tous les péchés d’Adam. On est allé jusqu’à dire que Mafa Haïdara m’a donné beaucoup d’argent, et que le président du Stade, Makadji, m’a offert une moto.  Au même moment, mon jeune frère, Abdoulaye Traoré, a transféré au Stade et l’occasion était tout trouvée pour faire un parallèle entre les différents événements. Or, Dieu seul sait que le gardien m’avait signalé sa sortie et c’est pourquoi j’ai ralenti pour lui permettre de saisir le ballon et éviter un accrochage  entre nous. Mais  je ne savais pas que le gardien aussi avait freiné son élan et l’irréparable s’est produit. De telles erreurs n’en finissent pas en football et le mieux serait toujours de prendre les choses avec philosophie. Mais la manière dont j’ai été traité après cette finale m’a beaucoup choqué et finalement j’ai décidé de mettre fin à ma carrière”.

Cela explique-t-il ses distances d’avec son ancien club ? Non, répond Poker. Selon lui, le Djoliba a été toujours confié aux cadres extérieurs. Sinon, il y a combien d’anciens joueurs du club, de l’indépendance à nos jours en passant par leur génération ? s’interroge-t-il.

Malgré tout, Poker est formel sur un détail : l’amour du club est dans son cœur. Un club qu’il a connu  depuis l’enfance et où il a été amené peu avant le coup d’Etat de novembre 1968, par un grand frère de quartier.

Au Djoliba, Poker a  gravi tous les échelons, intégrant les minimes en 1968 et les seniors en 1972. Un an plus tard, il goutte à sa première sélection en équipe nationale, entraînée à l’époque par l’Allemand Karl. Avec ses qualités de joueur extraordinaire, comme l’a dit Adou Kanté, Poker ne quittera l’équipe nationale que quinze ans après.

Contrairement à d’autres anciens joueurs des différents clubs, Idrissa Traoré dit Poker n’a jamais quitté le milieu footballistique. Avec son expérience auprès de Capi, il  prendra les rênes du Lcba. Avant  cette aventure, il s’occupait  d’une équipe de deuxième division à Sirakorao Méguétana.

Agé aujourd’hui de 62 ans (il est né le 28 Janvier 1955 à Ségou), et au-delà de  ses postes d’entraîneur, Poker dit que certes il a des ambitions, mais il ne forcera pas le destin et quoi qu’il arrive, il ne quittera pas la scène footballistique. Cela s’appelle conviction religieuse.

En nous raccompagnant à notre départ, Idrissa Traoré “Poker” a tenu à faire ce témoignage : “Vous, hommes de la presse, êtes en train de nous rendre de grands services en nous faisant revivre en nous donnant la parole. C’est plus que ce que l’Etat a fait pour nous. Merci !”

O. Roger Sissoko

Par Aujourd’hui-Mali

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