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Processus de paix : Un pas en avant, un pas en arrière

Le nouveau chronogramme établi pour l’installation des responsables des autorités intérimaires dans les régions de Tombouctou, Gao, Kidal, Ménaka et Taoudéni a été salué avec satisfaction par l’ensemble des acteurs de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation. Mais l’espoir suscité fut de courte durée. Les contestations des groupes armés et des populations de certaines des localités concernées ont poussé au renvoi sine die des actions prévues. Faut-il y voir un nouveau coup d’arrêt pour le processus ? Non, si l’on se fonde sur le dialogue en cours entre le gouvernement et les mouvements contestataires pour aplanir les difficultés, ainsi que la tenue prochaine de la conférence d’entente, prévue au mois de mars 2017.

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« Le 18 février, le drapeau du Mali allait flotter sur Kidal. Nous étions prêts, avec nos caisses de fanions vert-jaune-rouge », nous confie un responsable d’un groupe armé, croisé dans la salle d’attente du président de la Commission nationale DDR, l’ancien ministre Zahabi Ould Sidi Mohamed. Selon notre interlocuteur, c’est le communiqué du vendredi 17 janvier 2017, nommant Sidi Mohamed Ag Ichrach, secrétaire général du ministère du Commerce et considéré comme un proche du GATIA, au poste de gouverneur de la région de Kidal, qui a fait changer la donne. Ce dernier doit remplacer Koïna Ag Ahmadou, alors en pleine préparation de la cérémonie d’installation d’Hassan Fagaga dans ses fonctions de président de l’Assemblée régionale de Kidal, prévue pour le lendemain 18 février. Le désormais ex-gouverneur apprend par la même occasion qu’il est muté à Tombouctou.

Contestations Cette décision suffira à provoquer la colère des ex-rebelles de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA). En réaction, ils annulent la cérémonie d’installation et décrètent qu’« il n’y aura pas d’autorités intérimaires tant que la situation ne sera pas éclaircie avec le gouvernement », déclare Ilad Ag Mohamed, porte-parole de la CMA. Dans la foulée de l’annulation à Kidal, la mise en place des membres des autorités intérimaires pour toutes les autres régions a été annulée le dimanche 19 février. Y avait-il eu consultation avec les maîtres de Kidal ? Apparemment non, assure une source proche du dossier. «L’État a voulu jouer à l’équilibriste, mais c’est le tact qui a manqué un peu », précise la même source. Exclus du processus, certains mouvements armés, issus de la CMA et de la Plateforme, menacent de bloquer le processus jusqu’à ce qu’ils soient pris en compte au même titre que les autres. C’est le cas de la Coalition du peuple pour l’Azawad (CPA) de Mohamed Ousmane Ag Mohamedoune, de la CMFPR2 du Pr Younoussa Touré, du Mouvement populaire pour le salut de l’Azawad (MPSA), du Front populaire de l’Azawad (FPA) et du Congrès pour la justice dans l’Azawad (CJA). Les colonels Abass Ag Mohamed, chef d’état-major du CJA, et Housseine Ould Ghoulam du Mouvement arebe de l’Azawad (MAA), ont mis en garde la communauté nationale et internationale sur le fait que certains choix ne sont pas consensuels et ne seront jamais acceptés, ni par eux, ni par la population de Tombouctou et de Taoudéni. « La porte du dialogue n’est jamais fermée à condition que tout le monde soit inclus », explique Mohamed Ousmane Ag Mohamedoune, secrétaire général de la CPA. « Oui, hier nous avons marché pour soutenir la mise en place des autorités intérimaires et aujourd’hui, nous la contestons car elle n’est pas inclusive. Oui aux autorités intérimaires avec une consultation de la société civile », affirme pour sa part Aliou Daouna, membre de la société civile de Tombouctou. À Gao, on s’insurge également contre ces autorités intérimaires, dont la jeunesse et la société civile s’estiment exclus (voir page 6). « Tous ceux qui crient n’ont aucune représentativité. Les gens veulent une part du gâteau et sont prêts à mettre le processus en danger pour y arriver », déplore un haut fonctionnaire.

La situation actuelle, résultant des décisions prises à l’issue de la réunion du Comité de suivi de l’Accord (CSA) de haut niveau du 10 février, était pourtant prévisible. La médiation n’a en effet jamais pu trouver de solutions au principe d’inclusivité prônée par l’accord, selon le Pr Mohamed El Oumrany, secrétaire aux relations extérieures du MPSA. « La seule voie de sauvetage aujourd’hui, c’est nous, les mouvements dissidents. Nous avons la confiance des populations parce que nous représentons toutes les couches sociales », ajoute-t-il. Au-delà de leur caractère non inclusif, l’une des raisons pour lesquelles ces autorités intérimaires sont contestées est, selon le Pr Younoussa Touré de la CMFPR2, le fait qu’il n’y a aucune base légale qui les régisse. Le seul cadre légal dans lequel ces autorités intérimaires se trouvent, c’est bien l’Entente signée en juin 2016 entre le gouvernement et les mouvements armés, CMA et Plateforme, devenue caduque avec la tenue des élections communales du 20 novembre. « Je ne suis pas contre les personnalités nommées à la tête de ces autorités intérimaires. Ce sont des Maliens tout comme nous. Mais la loi modifiant celle portant code des collectivités territoriales, adoptée par l’Assemblée nationale, censée prendre en charge les autorités intérimaires, n’est plus d’actualité », ajoute-t-il.

Une issue L’espoir d’une paix définitive dans les régions nord est-il de nouveau compromis ? Rien n’est encore perdu car, malgré tout, les différentes parties affirment leur volonté de faire bouger les lignes. Il urge cependant, selon les observateurs, de corriger une tare congénitale de ce processus qui n’aura finalement pas fait l’objet d’un large consensus. La solution à ce problème pourrait venir de la conférence d’entente nationale qui doit se tenir dans le courant du mois de mars. Elle serait en effet une bonne occasion de réorienter les impératifs de la mise en œuvre de cet accord et de l’adapter pour améliorer son appropriation par toutes les couches de la population. À travers la large participation de ces dernières, peut-être arrivera-t-on enfin à clore le chapitre du « sentiment d’exclusion » de certains acteurs. « Il appartient à l’État, garant de la mise en œuvre de l’Accord, de prendre ses responsabilités pour siffler la fin de la récréation qui n’a que trop duré », explique une source diplomatique. Cette rencontre attendue depuis longtemps et réclamée entre autres par l’opposition (avec un contenu différent), est « un jalon important dans la réhabilitation de la cohésion sociale et du vivre ensemble au Mali […]. Ainsi que cela est spécifié dans l’Accord pour la paix et la réconciliation, cette conférence doit permettre un débat approfondi entre les composantes de la nation malienne sur les causes profondes du conflit », avait indiqué le Président IBK lors de son discours du nouvel an. « Nous ne devons pas céder, mais il nous faut agir vite. Plus nous perdons du temps, plus les groupes terroristes et narcotrafiquants s’installeront dans la région. Il importe donc de maintenir le dialogue et de renforcer la confiance entre le gouvernement et les mouvements signataires de l’accord », assure Zahabi Ould Sidi Mohamed, président de la Commission nationale désarmement, démobilisation et réinsertion (CNDDR). Alors que les tractations vont bon train et que les réunions se succèdent, une bonne nouvelle vient éclaircir le ciel malien : la mise en œuvre du MOC, frappée par l’attentat meurtrier du 18 janvier dernier, devait reprendre, au moment ou nous mettions sous presse, ce mercredi 22 février.

 

Source: journaldumali

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