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Origine du tôno ou tonton : Mamadou Fanta Simaga nous édifie

mamadou fanta simaga interview

A quelques jours de la fête de l’Aid El Fitr, c’est l’effervescence dans la ville de Bamako. Elle est ressentie dans les ateliers de couture, dans les salons de coiffure, au marché et auprès des vendeurs de bétail. On assiste à un achat massif des bovidés notamment des vaches par groupes de personnes. Ces personnes le plus souvent partagent des liens de travail, d’amitié ou de parenté. Le principe est que les travailleurs d’une même structure ou les membres du grin il cotisent et payent des bœufs lesquels sont abattus à la veille de la fête. C’est une forme d’entraide dont la finalité est de payer une ou plusieurs bêtes afin de partager la viande. Elle est communément appelée en bambara tônô. Pour en savoir plus, nous avons approché Mamadou Fanta Simaga, docteur en pharmacie mais aussi grand historien, pour connaitre l’origine sociale du « tônô» à la veille de la fête de l’aide Elfitr. Le Prétoire : Pouvez-vous nous expliquer l’historique du Tônô. Autrement dit comment est venue l’idée de faire une tontine à la veille de la fête de Ramadan ?

Mamadou Fanta Simaga : Avant tout, je me considère comme un vagabond de la culture et de l’histoire. Parce que je ne suis ni historien, ni sociologue, ni ethnologue, ni socio-ethnologue. Il m’arrive souvent de flirter avec l’histoire et la sociologie.

Tônô, ça a toujours été notre culture. C’est comme demander à un poisson comment il est venu dans l’eau. Les gens ont tendance à mal prononcer le mot en disant tonton. A vrai dire, ça se prononce Tônô qui signifie étymologiquement bénéfice. Et en réalité ça bénéficie à tout le monde. Manger de la viande (bœuf, mouton) quotidiennement n’était pas dans nos habitudes. C’était seulement à l’occasion des fêtes. Par exemple, les jeunes, après la récolte, faisaient la fête en égorgeant un bouc. Au cours des fêtes païennes on versait du sang et tout le monde mangeait de la viande. Donc, à l’occasion des fêtes religieuses, le village décide de tuer 5 bœufs et on répartit la viande en tas. Après, le tas est acheté selon les possibilités, à condition que personne ne soit lésé. Ce sera l’occasion pour tout le monde de manger de la viande, d’où le mot Tônô (bénéfice). Comme le dit un proverbe de Ségou : «pendant les jours de fête que l’orphelin mange de la viande à sa faim».   Le mot tontine est européen. Le Mot Tônô signifie bénéfice car ça  bénéficie à tout le monde.

Voyant l’évolution de la société malienne, quel regard portez-vous sur le Tônô aujourd’hui ?

Pendant les fêtes religieuses, notamment la tabaski et le ramadan, comme le prix du mouton est devenu cher, on peut s’associer et avoir de la viande en faisant le Tônô. Et d’ailleurs, même dans l’islam c’est permis. Je me rappelle qu’il y a eu un moment de grande sécheresse au cours de laquelle la Tunisie a perdu la plupart de son cheptel. A l’approche de la fête de Tabaski. Le Président Bourguiba a décrété que personne ne tuera de mouton à sa charge. Et l’Etat donne un mouton par rue, pour les riches comme pour les pauvres C’était à partager.  Ce qui est d’ailleurs légal. Car au cas où le cheptel ne va pas du tout, l’Etat peut faire des donations par quartier. Le problème est que les gens interprètent mal l’islam. Certains vont jusqu’à s’endetter pour avoir un mouton à l’approche de la fête alors qu’on doit toujours utiliser les moyens de bord. Donc le Tônô permet une égalité ou du moins une égalisation des chances. En clair, c’est une façon de régulariser la société.

Propos recueillis par Ibrahim M.GUEYE

Source: Le Prétoire

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