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Nomination du nouveau gouverneur de Kidal: CMA, l’inconséquence

La contestation par la CMA de la nomination du nouveau gouverneur de Kidal, sous le prétexte qu’il n’y a pas eu de concertation préalable à ce sujet ou même qu’il serait proche de la Plateforme, tient beaucoup plus d’une volonté de torpiller le processus de normalisation en cours que d’une violation d’un engagement inexistant de la part de l’Etat. La preuve par les faits.

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La nomination de Sidi Mohamed Ag ICHRACH, un haut cadre de l’Etat, en fin de semaine dernière, était une occasion inespérée pour la Coordination des mouvements armés (CMA) pour bloquer l’installation des autorités intérimaires de Kidal dont la présidence revient à un colonel déserteur de l’armée, Hassan Ag FAGAGA, membre de la CMA. Cela, sans avoir la politesse d’en aviser au préalable les diplomates étrangers qui attendaient ses responsables à l’aéroport pour embarquer en vue de prendre part à la cérémonie d’installation.
‘’Il n’y a pas eu de concertation au préalable’’ ; ‘’il (Ndlr : le nouveau gouverneur) est proche de la Plateforme’’, voici, entre autres alibis avancés en public ou en coulisse pour justifier le tête-à-queue des ex rebelles.

D’une position connue
C’est un secret de polichinelle, la Plateforme avait clairement définit sa position : si la CMA occupe la présidence des autorités intérimaires, le gouvernorat lui reviendrait et inversement. Cette déclaration a été faite au moment où avait été nommé un gouverneur proche de la famille des Ifoghas qui naturellement a été accueilli à bras ouverts, même s’il ne résidait pas à Kidal-ville parce qu’il symboliserait la présence de l’Etat. C’était donc moins sa personne qui était en cause que l’Etat qu’il représentait.
En ce qui est de la Plateforme, elle avait fait savoir à l’époque que le gouverneur qui avait été nommé, à savoir Koïna Ag AHMADOU, est plus ou moins de la famille Ifoghas et qu’il ne peut pas leur tenir tête et appliquer une gestion équitable. Le Mouvement faisait savoir qu’étant donné que le gouvernorat avait été donné à la CMA, il voulait la présidence de l’Assemblée régionale pour équilibrer la gestion. Pour la Plateforme, il n’est pas question que les deux premiers responsables de la région soient tous Ifoghas et qu’elle est prête à affronter n’importe qui pour qu’il y ait un véritable partage du pouvoir.
Les couleurs étaient donc annoncées. La Coordination des mouvements armés a jeté son dévolu sur la présidence des autorités intérimaires. Elle devait donc s’attendre à ce que la Plateforme récupère le gouvernorat. Cela, quand bien même c’est uniquement pour des considérations de compétence et de connaissance de la région que Sidi Mohamed Ag ICHRACH a été nommé par la Gouvernement. Il n’y avait, selon nos sources, aucune volonté de défiance de quiconque à travers cette nomination qui repose sur des bases purement objectives et qui relève du pouvoir discrétionnaire de l’Etat. Ce qui du reste a été reconnu par les parties lors de la dernière réunion du Comité de suivi de l’Accord. Alors en quoi l’Etat a-t-il violé ses engagements ? De quels engagements s’agit-il ? En fait, il faudrait plutôt dire que qui veut abattre son chien l’accuse de rage.

De la légitimité de la Plateforme
Dans tous les cas, même si Sidi Mohamed Ag ICHRACH, le nouveau gouverneur, était proche de la Plateforme, l’on ne saurait nier que ce mouvement a une légitimité historique à Kidal. Cela, ceux qui ont fabriqué des légitimités à Kidal tout comme ceux qui en profitent aujourd’hui le savent très bien. A cet effet, il faut rappeler que dans la mouvance de la 10e session du Comité de suivi de l’Accord (CSA) Azaz Ag Loudagdag, président de la Coordination Imghad, s’est montré intraitable : ‘’pas question que le GATIA quitte Kidal. La majorité de Kidal appartient aux Imghads et ils sont du GATIA. Pour preuve, toutes les élections sont gagnées en temps normal par les imghads. Le député et le maire sont des élus Imghads.
Nous ne laisserons jamais Kidal ! Parce que c’est eux qui sont venus (…). Ils se sont bien implantés avec des complicités extérieures. Les pays étrangers les ont aidés à rester comme si c’était une part qu’on leur donne.
Personne n’est d’accord qu’on quitte Kidal. Nous devrons partager la ville ou advienne que pourra. Nous préférons le faire de façon pacifique. Mais si on n’obtient pas cela, tous les autres moyens seront utilisés.
Nous sommes majoritaires à Kidal, mais les gouvernements français et maliens ont épaulé les Ifoghas et les ont utilisés pour maitriser tout le monde. C’est une opposition ancienne, mais maintenant on est au 21ème siècle et les gens ne sont plus d’accord. Les Ifoghas considèrent les Imghads comme des vassaux et ils refusent d’être sous leur domination’’.

De l’entrée de la Plateforme à Kidal
C’est fort de leur légitimité que des combattants du Groupe d’Autodéfense Touareg, Imghads et Alliés (GATIA) ont demandé et obtenu de la CMA de rentrer à Kidal, auprès des leurs, après la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger.
Il faut souligner que cet accord de la CMA est la matérialisation de sa reconnaissance de la légitimité à Kidal de ces éléments du GATIA, lui-même membre de la Plateforme.
C’est en raison de cette vérité historique que ces combattants du GATIA sont de Kidal, que le 2 février 2016, une colonne de 50 véhicules faisait son entrée à Kidal. Il s’agissait de plusieurs centaines d’hommes armés, selon nos sources.
Rappelons que Mohamed Ould Mahmoud, membre du bureau politique de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), déclarait à Sahelien.com : « si le GATIA est à Kidal, c’est parce que c’est voulu et accepté par toutes les parties qu’il vienne non seulement en tant que GATIA, mais en tant que Plateforme pour participer à la gestion de la ville de Kidal ».
Et de poursuivre : « il y a des esprits malsains et alarmistes qui ne veulent pas de rapprochement et qui pensent que le GATIA rentre triomphalement. Aucun coup de fusil n’a été tiré. Ils ont profité de la bonne foi, de l’ouverture pour venir parader et ça ne dépassera pas l’évènement parade ».

De la gestion commune de Kidal
La reconnaissance du GATIA par la CMA a eu des implications comme l’atteste une correspondance adressée au Représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU, datée du 2 février 2016 et signée de Alghabass Ag INTALLA qui fait savoir que suite à des réunions de concertation sur la gestion commune de la ville de Kidal, il a été décidé :’’la CMA consent l’admission de trois membres de la Plateforme dans chacune des six sous-commissions de la gestion de la ville de Kidal’’.
Plus tard, dans un communiqué conjoint CMA/Plateforme du 6 février 2016, cette mesure est réitérée : ‘’conformément aux dispositions déjà arrêtées, des éléments de la Plateforme intégreront les commissions chargées de la gestion de la ville de Kidal’’.
Ces différentes déclarations attestent à suffisance que le GATIA est non seulement chez lui à Kidal, mais également qu’il est fondé à prendre part à sa gestion. Manifestement, la Plateforme n’en demande pas plus : une gestion commune, comme cela avait été du reste convenue, à travers l’accord d’intégration des membres du GATIA dans les six sous-commissions chargées de la gestion de la ville de Kidal. En clair, il n’y a rien de nouveau sous le ciel de Kidal de ce point de vue.

De la décision du Gouvernement
Dire que le Gouvernement a nommé un nouveau gouverneur, sans concertation, revient non seulement à méconnaître les textes de la République, le contenu de l’Accord, mais également à se dédire de la part de la CMA.
En ce qui est des textes de la République, ils sont clairs. En effet l’article 46 de la Constitution dispose : ‘’le président de la République signe les ordonnances et les décrets pris en Conseil des ministres.
Il nomme aux emplois civils et militaires supérieurs déterminés par la loi.
Le grand chancelier des ordres nationaux, les officiers généraux, les ambassadeurs et envoyés extraordinaires, les gouverneurs de région, les directeurs des administrations centrales sont nommés par décret pris en Conseil des Ministres’’.
L’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger s’inscrit dans cette même dynamique en ce qui est de la nomination des gouverneurs de région. En effet il stipule, en son article 10 : ‘’l’Etat nomme auprès des collectivités territoriales un Représentant, aux fins de préserver l’intérêt général. A ce titre, il relaie la politique du Gouvernement sur les grands projets et facilite les politiques de développement économique et social et d’aménagement du territoire’’.
L’Etat est donc dans son beau rôle de nommer les gouverneurs de région hier comme aujourd’hui.
Pour le futur, il faut s’en tenir à la nouvelle Constitution ; l’actuelle étant en relecture.
Du point de vue du droit, il n’y a à prendre l’avis de personne pour nommer le gouverneur de Kidal. D’autres ont été nommés sans que cela ne vaille au Gouvernement une volée de bois vert de qui que ce soit.
Quant à se dédire, cela rentre dans l’ordre normal de choses de la part de la CMA dont c’est d’ailleurs le sport favori dans une logique de perpétuel recommencement. Sinon, de sources bien introduites soutiennent que lors de la dernière session du CSA, les parties avaient décidé de laisser à la discrétion du Gouvernement la nomination éventuelle des gouverneurs. Pourquoi alors devrait-il procéder à des concertations pour la nomination de M. ICHRACH ? Il n’y a aucune raison qui tienne la route.
Engagements ? L’Etat, selon nos sources, n’a jamais promis à la CMA de nommer gouverneur de Kidal la personnalité de son choix. Et à ce qu’on sache, ICHRACH n’est pas le pire des choix que le Gouvernement puisse faire.
« C’est aux environs de 22h que nous avons appris la nomination », fait savoir la CMA. Il n’y a que le voleur qui aime la nuit. A ce qu’on sache, le Gouvernement n’en est pas un, contrairement à beaucoup de narcotrafiquants qui préfèrent l’imbroglio au Nord.
En définitive cette cacophonie a été suscitée par des ex rebelles à la seule fin de donner un coup de frein à un processus qui commençait à prendre un nouvel élan. En attendant que la situation se débloque, les activités illicites en tous genres se poursuivront allègrement.

Par Bertin DAKOUO

 

Source: info-matin

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