À la tête des putschistes qui ont renversé le président Bazoum le 26 juillet dernier, se trouve le général Abdourahamane Tiani. Un militaire de carrière jusqu’ici réputé pour sa fidélité au pouvoir civil.
« Notre ambition n’est pas de confisquer le pouvoir. […] Si une agression devait être entreprise contre nous, elle ne sera pas la promenade de santé à laquelle certains croient ». Le nouvel homme fort du Niger, le général Abdourahamane Tiani, a pris la parole samedi soir. Et il a averti ses voisins de l’ouest africain qui tenteraient par la force de ramener à la présidence le président Bazoum, renversé par les militaires le 26 juillet.
Dans ce discours d’une douzaine de minutes, le général Tiani a annoncé le lancement d’un « dialogue national » qui dispose de trente jours pour formuler des « propositions concrètes » en vue de poser « les fondements d’une nouvelle vie constitutionnelle ». Il a promis que la durée de la transition « ne saurait aller au-delà de trois ans ».
Un proche de l’ex-président, militaire de l’ombre
Arrivé au pouvoir après un coup d’État le 26 juillet, le général Tiani est présenté comme un militaire proche du sommet de l’État et jusqu’ici fidèle au pouvoir civil.
Nommé chef de la garde présidentielle et général par l’ancien président du Niger Mahamadou Issoufou (2011-2021), il a été prolongé dans ses fonctions par le président, aujourd’hui renversé, Mohamed Bazoum en 2021. Il a ainsi, au cours de cette période maté deux tentatives de coups d’État en 2020 et 2021, rappelle RFI.
La garde présidentielle : entraînée et bien équipée
Âgé de 59 ans, le général Abdourahamane Tiani est un militaire de l’ombre, inconnu jusqu’à sa prise de parole télévisée le 28 juillet en tant que chef du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) qui a pris le pouvoir. « On ne le connaît pas beaucoup en dehors des milieux militaires, il n’a pas de présence publique affichée. C’est un homme de l’ombre, puissant, mais pas une figure très consensuelle », a décrit pour France 24, Ibrahim Yahaya Ibrahim, chercheur pour International crisis group, ONG qui œuvre pour la prévention et la résolution des conflits armés.
Le militaire de carrière qui a servi plusieurs fois dans des missions de l’ONU (Côte d’Ivoire, Congo, Darfour, Soudan…) ou même de la Cédéao est né dans une zone très aride et enclavée, à quelque 200 km au nord-est de Niamey, détaille Franceinfo. La région de Tillabéri est le théâtre d’attaques des groupes djihadistes depuis plusieurs années.
Un pays secoué par quatre coups d’État depuis 1960
Selon Jeune Afrique, Abdourahamane Tiani, même s’il a pris la tête de la junte, serait loin de faire l’unanimité au sein de l’armée nigérienne. Dans un pays secoué par quatre coups d’État depuis son indépendance en 1960, rappelle le média, la garde présidentielle était particulièrement choyée par le pouvoir en place. Elle compterait aujourd’hui environ 700 hommes bien équipés et entraînés, ainsi qu’une vingtaine de blindés.
La proximité entre le président qu’il l’avait promu et nommé, Mahamadou Issoufou, et le général Tiani, qui avait le commandement de la garde présidentielle, ont attisé des jalousies.
Une relation dégradée avec le président Bazoum
Pour Djenabou Cisse, chercheuse spécialiste du Sahel à la Fondation pour la recherche stratégique, citée par Le Parisien : « c’est assez compliqué d’évaluer sa réputation au sein de l’armée. Il y a beaucoup de rivalités internes liées à l’organisation des forces militaires et des différences communautaires ou ethniques. Il a ses supporters et ses opposants. »
D’autres sources, citées par l’AFP, ont indiqué que les relations entre le général Tiani et le chef de l’État s’étaient dégradées depuis plusieurs mois. Mohamed Bazoum aurait même exprimé sa volonté de le remplacer à la tête de sa garde. Ce qu’il aurait prévu de faire le jeudi 27 juillet.
« On savait que le pouvoir du président Bazoum était très fragile. Son élection était contestée par l’opposition », a confirmé Alain Antil, directeur du centre Afrique subsaharienne à l’Institut français des relations internationales (Ifri), à l’AFP. « Et on savait que dans l’armée un certain nombre d’officiers étaient assez mécontents de la situation ».
Le risque d’un décrochage sécuritaire
Pour le chercheur l’instabilité en cours et à venir fait courir le risque d’un « décrochage sécuritaire » du pays et des inquiétudes pour la région toute entière.
« La situation du Niger et dans son environnement est extrêmement préoccupante. Le pays est bordé par le chaos libyen, le Nigeria avec Boko Haram et ISWAP (L’État islamique en Afrique de l’Ouest), le nord du Bénin très fortement touché par le djihadisme et évidemment le Mali et le Burkina Faso. C’était un pôle de stabilité malgré des problèmes sécuritaires sur le territoire ».
Source: lanouvellerepublique