Le constat est, il est vrai, sans appel. Sur le plan sécuritaire, la montée en force des djihadistes est une réalité qu’on ne peut plus nier. Sur le terrain aujourd’hui, ce sont eux qui ont l’initiative du moment, du lieu et de la forme des affrontements. Or, perdre l’initiative est la pire chose qui soit pour une armée. Parce que, c’est le début du doute, doute qui s’insinue sournoisement dans les têtes.
Après les attaques de Boulkessy et Mondoro, puis celle de Indelimane, ce vendredi 1er novembre 2019, sans occulter toutes celles qui les ont précédées, montre la gravité de la situation que vit notre pays.
« Nous sommes en guerre. Les seigneurs de guerre du terrorisme international au Sahel continuent leur croisade obscurantiste sanglante avec l’objectif évident de détruire nos institutions, notre pays et nos pays », a dit le président IBK dans son adresse à la nation hier soir.
Face à cette situation, le Commandant en chef de notre Armée nationale, le Président de la République, s’est adressé à la nation sans feindre la gravité en alliant le pessimisme de la raison à l’optimisme de la volonté en ces termes :
« La Nation malienne restera éternellement reconnaissante de leur engagement (il parle de ceux qui morts en mission commandée) pour la défense du territoire national et la sécurité des personnes et de leurs biens.
L’intégrité de notre territoire, la protection de notre population, le libre exercice de notre souveraineté demeurent au cœur de nos intérêts vitaux.
Face aux attaques meurtrières récurrentes contre nos emprises, j’ai présidé la Session extraordinaire du Conseil Supérieur de la Défense nationale et une réunion ad hoc avec la hiérarchie militaire, respectivement le 09 et 30 octobre 2019.
J’ai instruit des mesures fortes ; notamment l’élaboration d’un nouveau concept opérationnel qui donne une part importante à l’offensive, au niveau de relèvement du commandement opérationnel sur le terrain et à l’amélioration des conditions d’engagement de nos hommes.
Je ne cesserai jamais de le rappeler, c’est dans ces moments qu’il est impératif de rendre effectifs l’union sacrée autour de notre vaillante armée, derrière ces hommes qui ont choisi de nous défendre et de défendre le Mali tout entier, au prix de leur vie.
Le piège à éviter est de ne pas tomber dans la stratégie de l’ennemi qui est de nous opposer les uns aux autres et de saper le moral de nos vaillants combattants.
Plus que jamais, j’invite chaque Malienne et chaque Malien à faire preuve de solidarité autour de notre seul et vrai outil de décision nationale que sont nos Fama.
Cette solidarité est d’autant plus nécessaire que la lutte dans laquelle nous sommes engagés sera de longue haleine et notre résilience sera régulièrement mise à l’épreuve.
Dans ces circonstances particulièrement graves où la stabilité et l’existence de notre pays sont en jeu, notre seule réponse doit être l’UNION NATIONALE, l’UNION SACRÉE autour de notre armée nationale, celle qui veille jour et nuit depuis si longtemps pour que le Mali demeure.
Cette guerre n’est pas une guerre rien que contre le Mali ou le Sahel, elle est mondiale. Dans cet ordre mondial d’insécurité, la mutualisation des efforts et des forces est capitale.
Face aux inquiétudes du présent et aux incertitudes du futur, nous ne cèderons jamais au sentiment d’impuissance qui peut nous conduire à nous habituer à ces décomptes de plus en plus réguliers et proprement insupportables.
Les épreuves du moment nous commandent bien au contraire de saisir l’occasion pour nous mobiliser tous et tous ensembles.
Le sursaut national que j’exhorte de tous mes vœux doit être de mise en tout, partout et par tous.
Il est temps, il est grand temps que l’on sauve notre pays, que la famille malienne se ressoude.
Il est important que tous les Maliens, individuellement et collectivement : partis politiques, société civile, organisations religieuses, mouvements des femmes et des jeunes, Maliens de la diaspora, tous, sans exclusive aucune se retrouvent.
Ma main demeure tendue à tous mes frères et sœurs pour qu’ensemble, pour le Mali, Nous transcendions toutes nos incompréhensions au profit de la seule survie de notre chère patrie.
Je remercie tous ceux et toutes celles qui parfois dans un sacrifice et un anonymat complet se battent par tous les moyens à leur disposition pour que ce Dialogue soit celui de l’union et de l’Unité.
L’État poursuivra avec détermination constante ses devoirs régaliens avec les moyens qui sont les siens certes, mais aussi et surtout avec l’accompagnement de tous les fils et de toutes les filles du Mali.
Je voudrais terminer en vous rappelant que notre seul salut réside en nous-mêmes et dans le bénéfice d’une solidarité effective pour la défense de valeurs communes à l’Humanité.
Le Mali poursuivra ainsi sa marche sereine et résolue vers son seul objectif, un développement soutenable et durable tel qu’attendu par ses laborieuses populations pour être à l’unisson des autres peuples dans leur quête commune de prospérité et de paix. »
Comme on le dit, la plus grande part des éléments favorisant un scénario plutôt que l’autre relève du leadership. C’est pourquoi le commandant en chef des troupes, le Chef d’État-Major Général des Armées (CEMGA), répondant à l’appel du Chef suprême de l’armée, le président de la république, au nom et pour l’honneur de tous les officiers maliens n’a pas attendu une minute pour commencer à exécuter l’ordre de déploiement. C’est ainsi qu’ipso facto, le général Abdoulaye Coulibaly a décidé d’envoyer les généraux Keba Sangaré, Chef d’état-major de l’Armée de terre et Ouahoun Koné, Chef d’état-major de la garde nationale, respectivement à Sevare et Gao pour assurer la direction des opérations.
Il faut aussi ajouter à cela que beaucoup d’autres officiers sont déjà déployés sur les différents théâtres d’opération comme le commandant de zone de Sévaré actuellement à Boulkessi. Et d’autres officiers sont et/ou en voie d’être déployés. Répondant ainsi, au-delà de l’appel du Chef suprême de l’armée, celui du devoir de l’officier et du soldat tout court : défendre, protéger et servir la nation. Car, pour les officiers maliens qui ont reçu 5 sur 5 le message de leur commandant en chef rien n’est au-dessus de l’honneur de la patrie et la défense de sa souveraineté.
En définitive, il est vain d’attendre que « le salut » vienne du « dehors » le peuple et son Armée doivent déterminer leurs propres voies et inventer leurs propres solutions.
Comme disait Georges Balandier : « chaque peuple, dès lors qu’il dispose de liberté suffisante, accède à la responsabilité de sa propre histoire. »
Sibiri Samake