L’avenir de la présence militaire française au Sahel pourrait se jouer cette semaine lors d’une rencontre entre chefs d’État européens et africains.
Ce n’est pas le meilleur calendrier, pourtant la fin de l’opération militaire Barkhane au Mali s’invite à l’ordre du jour de l’élection présidentielle. Une conférence, « Investir ensemble, pour une nouvelle alliance entre l’Afrique et l’Europe », mercredi 16 février, puis un sommet entre l’Union européenne et l’Union africaine, à Bruxelles, les 17 et 18, vont mettre le projecteur sur le bilan de la politique africaine du président de la République. Au risque de le ternir à un moment où la situation au Sahel et la crise en Ukraine bousculent son entrée en campagne.
Après une escalade des tensions entre Paris et la junte au pouvoir à Bamako, le scénario d’un retrait des troupes françaises du Mali est le plus probable. Après un engagement de neuf années et la mort de 53 soldats, la France envisage sérieusement ce départ. En réalité, il a déjà commencé depuis plus de six mois. L’armée française a ainsi quitté les bases de Kidal, Tombouctou et Tessalit, dans le nord du Mali, et les effectifs sont en cours de redéploiement, avec l’objectif de n’en conserver que 2 500 à 3 000 d’ici à 2023, contre 5 100 en juillet 2021.
Transformation et relocalisation des missions
Pour autant, la fin de l’opération extérieure Barkhane ne signifie pas la fin de la présence française au Sahel et en Afrique de l’Ouest. En Côte d’Ivoire, la semaine dernière, le chef d’état-major des armées, le général Thierry Burkhard a affirmé que la priorité de la France reste de « poursuivre la lutte contre le terrorisme » aux côtés des pays africains, alors que les violences s’étendent jusqu’au nord de la Côte d’Ivoire, du Ghana et du Bénin.
Après des attaques dans ce dernier pays qui ont fait 9 morts, dont un ancien militaire français, les troupes de Barkhane ont tué 40 djihadistes au Burkina Faso. Dans un communiqué publié le 12 février, l’état-major a justifié avec beaucoup de détails cette opération menée avec un drone armé Reaper et des chasseurs Mirage 2000. Le 8 février, il avait déjà détaillé le succès d’une opération conduite au Mali par une unité de la force d’intervention Takuba, composée de forces spéciales françaises et estoniennes. « C’est la première fois qu’une unité malienne engagée auprès de Takuba obtient un tel bilan opérationnel », se félicitait l’état-major, alors que l’avenir de Takuba, à laquelle participent une dizaine de pays européens, est menacé.
En creux de cette soudaine abondance d’annonces, c’est la transformation des missions de la présence française qui se dessine : appui aux armées locales et relocalisation des effectifs dans d’autres pays africains. Agile dans l’usage des communiqués et des réseaux sociaux, le général Burkhard participe à cette bataille de l’information, se mettant en scène, sur Twitter, en Côte d’Ivoire pour appuyer un renforcement du partenariat, ou au cœur du CPCO, le Centre opérationnel des armées, mobilisé « contre la dangerosité » en Europe et en Afrique.
Reste que le Sahel est une question « éminemment politique », comme le souligne un haut gradé. Or l’Assemblée nationale en débattra le 22 février, sur le fil, juste avant la suspension des travaux parlementaires en raison des échéances électorales.