La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena BAERBOCK, a déclaré le lundi 5 septembre que son pays pourrait se retirer du Mali si la Transition ne répond pas aux besoins de sécurité des troupes allemandes engagées au sein de la MINUSMA. Cette sortie intervient dans un contexte où l’Allemagne et le Mali entretiennent des relations tumultueuses sur plusieurs sujets.
Encore, une fois de plus, l’Allemagne a menacé de se retirer de la MINUSMA dans le cadre de la mission onusienne de stabilisation dont le mandat est fortement décrié par le Mali. Parce que le pays déplore que notre pays ne prend pas suffisamment en compte la situation sécuritaire marquée par les attaques des terroristes.
Dans ce contexte, la ministre des Affaires étrangères de l’Allemagne a déclaré contre toute attente : « La mission sur place aide à renforcer la sécurité, elle aide à tenir le terrorisme en échec. Eh oui, nous n’avons pas atteint tous nos objectifs ces dernières années. Mais la question importante est la suivante : que se serait-il passé si nous n’avions pas été là ? Les femmes pourraient-elles aller au marché comme elles le font aujourd’hui ? Les enfants iraient-ils à l’école ? Oui ou non ? Je pense que non ».
Et en même temps, a-t-elle ajouté « au Mali nous sommes dépendant d’un gouvernement qui malheureusement, nous jette de plus en plus les bâtons dans les roues. C’est pourquoi nous ne pouvons pas nous contenter de partir dès les premières difficultés. Car, nous avons une responsabilité ».
Toutefois, la ministre Annalena BAERBOCK indique sans équivoque ce qu’elle attend des autorités maliennes pour la sécurité de leurs soldats engagés au sein de la MINUSMA. Et si cela ne fonctionne pas, il sera difficile de rester, a-t-elle prévenu.
Une déclaration qui intervient alors que les relations entre les deux pays ne sont pas au beau fixe puisqu’elles sont marquées par des tensions entre les dirigeants du Mali et de l’Allemagne.
Aussi, elle s’oppose aux déclarations tenues au Maroc où la ministre Annalena BAERBOCK avait affirmé qu’il n’est pas question de laisser le Mali entre les mains de la Russie comme si notre pays est une arrière-cour de l’Allemagne.
Des relations
tumultueuses
Cette fragilité dans les relations entre ces deux États remonte à l’affaire dite société privée de sécurité russe Wagner engagée par les autorités maliennes contre le terrorisme au nord du pays. Malgré le démenti du gouvernement malien, l’Allemagne s’est souscrite à l’initiative pour mettre fin aux formations de l’EUTM en faveur de nos soldats.
« Le Sahel et surtout le Mali peut être stable si les élections ne sont pas constamment reportées et surtout s’il ne collabore pas avec les éléments russes en ce qui concerne la situation sécuritaire », a-t-elle indiqué à l’issue d’une audience avec le président Assimi GOITA le mercredi 13 avril 2022.
Dans ces conditions, soutenait-elle, il est évident que la Mission EUTM ne peut pas se poursuivre, c’est pourquoi l’Union européenne avait décidé d’arrêter la formation pour les soldats maliens parce qu’il n’y a pas de « démarcation d’avec les forces russes», avait-elle insisté.
Sur le sujet, le ministre des Affaires étrangères, Abdoulaye DIOP, avait précisé en ces termes : « Je pense qu’il ne faut pas faire trop d’amalgames à ce niveau. La situation du Mali est la situation du Mali. Nous souhaitons que chaque partenaire respecte le choix du Mali. Le Mali fait ses choix en fonction de ses préoccupations. Comme l’Allemagne fait des choix en fonction de sa préoccupation ».
Il y a aussi l’Affaire des soldats ivoiriens arrêtés au Mali alors qu’ils venaient au compte d’une mission d’une entreprise privée allemande. Considérée comme un pays de droit et de respect à la souveraineté des États, l’Allemagne, la première à reconnaître l’indépendance du Mali, se porte garante de la violation des lois.
Il y a eu également l’affaire d’interdiction des vols allemands dans l’espace aérien du Mali.
Tous ces incidents avaient fini par motivé la décision de ce pays de suspendre, le 12 août 2022, «jusqu’à nouvel ordre» ses «opérations de reconnaissance et les vols de transport par hélicoptère» car il n’était «plus possible de soutenir la Minusma sur le plan opérationnel».
Pour recadrer la version des responsables de l’Allemagne, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Abdoulaye DIOP, a reçu en audience le vendredi 12 août 2022, l’Ambassadeur de la République fédérale d’Allemagne au Mali, Dietrich POHL. Suite aux informations faisant état d’un refus des autorités maliennes d’accorder l’autorisation de survol au contingent allemand, le ministre DIOP a expliqué à son hôte la mise en place d’un nouveau mécanisme d’approbation des rotations de contingents, à la faveur de la réunion de coordination tenue, le 1er août 2022, avec la Mission onusienne. Ce nouveau dispositif répond, dit-il, à des impératifs de sécurité nationale.
À cet égard, il avait invité l’Allemagne à renouveler sa demande de rotation dans le cadre de ce mécanisme à travers la MINUSMA, avant de lui assurer du traitement diligent qui sera réservé à la requête.
Refusant d’intégrer le modus operandi trouvé avec la MINUSMA, l’Allemagne veut un droit de survol propre. Notre pays a opposé une fin de non-recevoir à cette prétention particulière de l’Allemagne que rien ne justifiait. Et puis, entre partenaires qui se respectent, on ne négocie pas le couteau entre les dents.
PAR SIKOU BAH
Source : Info-Matin