Monsieur le Ministre,
votre venue dans la cité des 333 saints ce mardi 17 mai, n’a été un secret pour aucun habitant de Tombouctou , même si nous n’en avons pas été avertis à l’avance, mais nous vous disons » BISSIMILLAH » comme nous le disons à tous les hôtes que nous recevons à Tombouctou. Il faut dire que les radios locales et la nouvelle moto si bruyante qui accompagnait votre cortège n’y est pas étrangère.
Ainsi, vous seriez en visite de terrain ici dans le cadre du projet d’université . La Grande Uni-T qui traduit une forte volonté politique portée par les plus hautes autorités , notamment par le Président de la République Ibrahim Boubacar Keita. Je ne devrais point vous en vouloir car vous ne faites que votre travail.
Nous sommes maliens vous et moi, et nous savons à quel type d’excentricité Dieu nous a confronté en nous donnant Ibrahim Boubacar Keita comme president, excusez le mot s’il vous heurte, mais je crois que vous êtes aussi bizarre que IBK, sinon autant excentrique que lui en mettant sur pied cette mission d’experts -encore des étrangers au cadre sociale de Tombouctou- pour qu’ils tiennent des concertations au niveau local afin de permettre à la grande Uni-T de sortir des terres sableuses de Tombouctou…
On annonce une adhésion totale des autorités locales, des élus locaux , des notables et des leaders religieux que nous avez rencontrés sur place. Mais ces gens aussi ne font que leur boulot: prendre la photo en acquiesçant un grand oui. Toujours. Ils ont été conviés à la rencontre avec vous pour cela. Pour montrer qu’une prétendue société civile adhère à l’idée.
Monsieur, je me demande si vous avez les mêmes absences que votre patron, le président. Comment pouvez-vous vous permettre d’être aveugle à ce point.
En ce mois de mai 2016, où Mali et communauté internationale fêtent le premier anniversaire d’un accord de paix qui tardent à être appliqué…
En ce mois de mois de mai, où, les maliens qui empruntent les pistes rouges et infestés de bandits armés qui relient Tombouctou à la région de Mopti se font tirer dessus comme dans les vieux westerns et se font dépouiller de tout bien…
En ce mois de mai où les professeurs des écoles secondaires font de la non évaluation et que les compositions risquent de ne pas avoir lieux et que les élèves grèves pour des problèmes de brasseurs de vent et de table-banc…
En ce mois de mai, où les délestages sont le quotidien des habitants de la ville des 333 saints…
Ce n’est pas pour implanter une Grande Unit-T que vous devriez être à Tombouctou. D’ailleurs, excusez-moi, mais ce n’est pas pas votre visite que nous -les jeunes maliens de Tombouctou- désirions à Tombouctou , mais plutôt IBK, qui voyage beaucoup. Pourtant le vol Bamako-Tombouctou ne fait qu’une heure et demi. Je suis sure que nos grands amis de la MINUSMA qui ne trouve pas de paix à maintenir, se feront un grand plaisir de l’amener jusqu’à notre aéroport dégarni et chaud.
Qu’avons-nous à faire d’une Grande Uni-T dans une ville où la vie ressemble à une punition, abandonnée aux mains de casques bleus armés, de groupes armés et de bandits de grand chemin? d’ailleurs, qui seront les étudiants de cette université?
Vous savez que personne de l’autre coté du monde – à commencer par Bamako- n’est prêt à laisser sa progéniture faire ce voyage en enfer. Ils ont tout fait pour nous enlever le seul institut de formation des maitres qui accueille des enfants venus de toutes les régions du Mali. c’est un grand bras de fer qui nous l’a restitué.
Qui seront les enseignants de cet institut? des professeurs qui viendront pour une semaine ou deux enseigner des modules et prendre un avion pour partir? les érudits de la ville comme au temps de l’université de Sankoré?
Monsieur le Ministre, je suis bien désolée, si mes mots vous heurtent, mais ce n’est pas le but recherché. Je voudrais juste que vous et à travers vous tout ce gouvernement malien qui semble si loin, comprenez que la sécurité et les infrastructures routières sont les premières choses dont nous avons besoins à Tombouctou.
Aussi Grande Uni-T qu’elle soit, ce projet ne changera rien à notre misérable train de vie à Tombouctou…
C’est d’un Grand Mali Uni que nous avons besoin.
Avec mes respectueux hommages, je vous prie d’agréer, Madame le Ministre d’Etat, l’expression de ma considération la plus distinguée.
Une Tombouctienne
Source: linkis