Du 25 au 27 Mars 2021, la 4ème édition du Festival Interculturel de Kénédougou (Région de Sikasso) se déroulera sur les Berges du Lotio, l’une des rivières authentiques et historiques du Royaume de Kénédougou. Avec le thème retenu, «s’enrichir de nos différences pour bâtir un monde de paix», Lassana Coulibaly, président de l’Association Interculturel de Kénédougou (Sikasso), non moins Coordinateur général du Festival Interculturel de Kénédougou, a indiqué qu’elle est placée sous le haut patronage du Ministère de la Culture, de l’Artisanat et du Tourisme dirigé par Mme DraméKadiatou Konaré. Le parrain est SalifSanogo, Directeur général de l’Ortm et la Marraine se nomme Aida Koné, Directrice générale du bureau malien des droits d’auteur. Dans l’interview que Lassana Coulibaly nous a accordée, il croit dur comme fer, malgré la pandémie de Covid-19, que cette édition sera un succès. Car, dit-il, l’arrivée de Kadiatou Konaré à ce département, qui s’implique personnellement dans les initiatives culturelles, a donné un élan d’espoir aux acteurs culturels, notamment aux organisateurs du Festival interculturel de Kénédougou. Coulibaly, pour terminer, a insisté auprès des acteurs de la culture et des autorités à valoriser nos cultures autrement. C’est-à-dire, de donner la chance à nos danses patrimoniales d’émerger, de se voir émerger.
Le Républicain : Bonjour Monsieur. Présentez vous à nos lecteurs?
Lassana Coulibaly : Moi, c’est Lassana Coulibaly, président de l’Association Interculturel de Kénédougou (Sikasso) et Coordinateur général du Festival Interculturel de Kénédougou.
Vous intervenez dans ce cas dans le domaine de la culture ?
Oui.
Qu’est ce que vous faites concrètement avec votre association à Kénédougou?
Notre association, on peut dire que, c’est une jeune association parmi tant d’autres associations dans la Région de Sikasso. Nous avons vu le jour en 2017. Depuis, nous sommes sollicités par d’autres associations et autres ONG à organiser des manifestations culturelles, que ce soit dans la région du Kénédougou et même à Bamako et dans d’autres régions.
Vous avez organisé des activités à Kénédougou depuis votre création?
Notre association, c’est elle qui est à la base du festival aujourd’hui qu’on appelle festival interculturel de Kénédougou. En 2017 on a commencé les premières activités. A rappeler que le festival ne s’appelait pas festival interculturel de Kénédougou. Dans un premier temps, c’était les nuits du Wassolo à Sikasso. Nous avons fait une première édition comme ça pour attirer l’attention des gens que nous voulons mettre en place quelque chose de sérieux, qui pourrait être pérenniser dans les jours à venir. Partant de cela donc, après ces activités des nuits du Wassolo à Kénédougou, on a échangé avec les associations culturelles qui sont sur place à Kénédougou ; on a discuté aussi avec le conseil de cercle et la Mairie de Sikasso. C’était pour connaître les maux dont la culture souffre dans la Région de Sikasso. C’est partant de cela qu’on a eu l’idée de mettre en place un festival qui va s’appeler festival interculturel de Kénédougou.
Le festival interculturel de Kénédougou est à sa combientième édition aujourd’hui?
Si tout va bien, en cette année 2021, le festival sera à sa quatrième édition.
Est-ce que vous avez eu l’impression, lors des trois précédentes éditions un engouement de la part des populations ?
Oui de l’engouement, nous l’avons constaté même si on veut encore plus de mobilisation.
Quels sont les maux dont souffre votre festival ?
Au Mali, aujourd’hui, on peut dire que, c’est presque tous les festivals. Il y a beaucoup de maux, parce que dans la mentalité même des Maliens, on dit que la culture est quelque chose de secondaire. Alors que la culture constitue le repère de tout être vivant. Donc si on n’a pas de repère, on est forcement appelé à être acculturé. Il faut donc un repère et ce repère est la culture pour nous. Il faut que les Maliens sachent que la culture n’est pas quelque chose de secondaire. On doit la mettre au devant parce que ça constitue un socle de développement. Comme maux, déjà on est un peut marginaliser d’abord, même sur le plan financier. Parce qu’on peut dire que l’Etat malien ne finance pas à hauteur de souhait la culture. Un deuxième point est que, quelque part, il y a la non appropriation des populations des activités culturelles. On a maintes fois essayé beaucoup d’approches, mais on voit que toujours cette population est un peu marginalisée. Aujourd’hui, ceux qui s’intéressent à la culture, c’est la nouvelle génération et cette culture ne répond pas à nos repères. C’est donc une culture modernisée qui est là aujourd’hui. Il faut donc qu’on essaie de faire revenir ce qu’on appelle notre vrai repère.
Vous disiez tantôt que la jeunesse se sente marginalisée par rapport aux activités culturelles. Qu’est-ce que votre association fait ou compte faire pour redynamiser le festival de Kénédougou pour que la jeunesse s’en approprie ?
Ce que nous comptons faire à Kénédougou, après les trois premières éditions, on a essayé de faire de petites enquêtes. Ces investigations nous ont permis de connaître réellement ce qu’il faut pour donner une base solide à la culture de Sikasso. Et c’est partant de cela que cette année, lors de la quatrième édition, nous avons pris comme thème : «s’enrichir de nos différences pour bâtir un monde de paix»
Vous avez parlé aussi de la question financière dont souffre le secteur culturel. Et votre 4ème édition est en gestation. Comment compter vous faire pour attitrer les autorités publiques, les entreprises privées, ambassades, ONG, autres acteurs à vos côtés pour vous soutenir ?
Comme toutes les autres démarches, nous avons élaboré le document projet. Nous avons commencé à déposer cela au niveau des services publics, des services privés, dans les ONG, dans les ambassades à travers leurs sections culturelles, etc. Mais au Mali, je pense que si on n’a pas un bras long, il est très difficile d’avoir des sponsors. Alors que si on lit réellement notre document, ce n’est pas vraiment comme les autres festivals. Parce que notre festival tant vers à ce qu’on appelle la tradition orale. Ce qu’on appelle les danses patrimoniales. Ce sont ces danses qui sont beaucoup plus valorisées dans notre festival. Ces danses patrimoniales ne sont autre chose que, ce qu’on a l’habitude d’appeler les danses folkloriques. Je dis que le folklore est un thème qu’on doit éviter. Nous devons tout simplement dire les danses patrimoniales qui ont un sens. Ces danses patrimoniales véhiculent un message. Et c’est ce message là qui permet à la jeunesse de se consolider, de savoir quel est le sens de la liberté, quel est le sens du cousinage à plaisanterie, quelles sont les vraies valeurs de nos sociétés. C’est pour cette raison que je lance un appel solennel à toutes les autorités (publiques, privées, etc.) ; les bonnes volontés, d’aider la culture malienne, notamment les danses patrimoniales. Parce que les festivals nous permettentde connaître ce qu’on appelle nos vraies cultures.
Selon certains acteurs culturels et autres observateurs, depuis l’arrivée de l’actuel ministre de la culture, de l’artisanat et du tourisme, Mme DraméKadiatou Konaré, le secteur culturel commence a propulsé de l’avant. Avez-vous approché son cabinet pour parler de votre initiative et de votre vision de la culture de même que vos soucis énoncés dessus?
On peut dire que l’arrivée de Mme Kadiatou Konaré au niveau du département de la culture a donné un élan d’espoir à la culture malienne. Parce qu’imaginez, il y a des hommes culturels qui ne savaient pas faire la différence entre un espace culturel et un centre culturel, etc. Quand elle est venue, elle a essayé d’organiser la culture dans sa diversité ; toutes les activités culturelles dans leurs diversités. On peut dire que son arrivée a été une grande chance pour nous. Le Mali Kura dont on parle, nous pensons que cette dame battante peut aussi amener la culture tant souhaitée pour que les enfants de ce beau pays puissent se retrouver. Nous pensons que le département de la culture nous écoutera et répondra favorablement, notamment Mme le Ministre qui est dévouée pour la cause de la culture malienne, pour la cause des acteurs culturels. C’est pourquoi on a d’ailleurs placé le festival sous le haut Patronage de Mme Kadiatou Konaré.
Au-delà de l’appel lancé aux autorités publiques et privées de vous soutenir dans l’organisation de votre festival, comment les préparatifs vont à Sikasso ?
Les préparatifs de la quatrième édition du festival interculturel de Kénédougou vont bon train. Les autorités communales, administratives et locales sont tous impliquées dans l’organisation. Quand on se réfère au thème, on voit que la chefferietraditionnelle est impliquée. Pourquoi ? Parce que cette quatrième édition va s’ouvrir à la sous Région. Le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée sont invités. Parce que Sikasso partage des frontières avec tous ces pays voisins.
A travers leurs artistes?
Oui, Oui. Ce sont les artistes qui seront invités; les artistes qui font la danse patrimoniale dans ces pays avec leurs masques.
Avez-vous établi des listes dans ce sens?
Oui, on a établi quelques listes dans ce sens. Il y a des groupes balafonistes au niveau de Bobodioulasso (Burkuna-Faso) qui seront là. Il y a aussi des groupes balafonistes qui sont invités de Korogo (Côte d’Ivoire), une tâche confiée à Alexis Sékongo, promoteur du festival Sénak au niveau de Korogo. Pour la Guinée Konakry, nous sommes en contact pour finaliser la liste de certains groupes traditionnels de ce pays.
L’actualité oblige. Votre quatrième édition est en gestation. Mais avec la pandémie de Covid-19, ne craignez-vous pas que cela soit un facteur de blocage?
Effectivement, la crainte est là. Surtout avec les mesures prises par le gouvernement. Mais comme c’est du 25 au 27 mars prochain, on peut dire que l’espoir est permis. Mais dans notre budget quand même, la couverture sanitaire est assurée à 100%. Si tout va bien donc, si on parvient à avoir des partenaires, cette couverture sanitaire sera appliquée à la lettre. Car il n’est pas évident que la Covid-19 va prendre fin d’ici le mois de mars. Mais nous souhaitons quand même que le taux soit diminué fortement pour le bonheur de tous. A savoir que les sites retenus pour abriter les festivités du festival, sont le Berges du Lotio de Sikasso qui est l’une des rivières authentiques et historiques du Royaume du Kénédougou et à Côté du Tata de Sikasso.
Ceux qui veulent soutenir l’initiative de Lassana Coulibaly et ses amis peuvent-ils rentrer en contact avec les organisateurs ? Comment?
Il suffit de nous appeler au 66924970 et le 76924970. Je voulais ajouter aussi que lors de cette quatrième édition, on a initié une formation des jeunes, parallèlement à autres activités du festival. Puisque jusqu’au jour d’aujourd’hui, l’Etat n’a pas pu déconcentrer l’Institut National des Arts (INA). Nous avons prévu une formation de 20 jeunes à l’occasion pour les former sur comment fabriquer et jouer le Kolon, deux instruments très historiques qui ont leur sens dans l’histoire même du Kénédougou. Partant de cela, nous incitons donc les bailleurs à financer cette formation de 20 jeunes pendant 20 jours (du 1er au 20 mars 2021).
Votre dernier mot ?
Mon dernier mot est de remercier tous les acteurs culturels. Ce sont mes mentors. Pour ne pas vexer, je dirai que j’ai travaillé aux côtés de beaucoup d’entre eux. Et aujourd’hui, j’ai encore besoin de leur encouragement et accompagnement, à pérenniser ce festival pour le développement de la culture dont nous rêvons tous. Et je demande, implore tout le peuple malien, singulièrement ceux de la culture de valoriser nos cultures autrement. C’est ce qui est d’ailleurs mon slogan. Car aujourd’hui, la plupart de nos festivals sont très modernisés. Il faut donc donner la chance à nos danses patrimoniales d’émerger, de se voir, de propulser.
Réalisée par Hadama B. Fofana
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Lassana Coulibaly, la Culture dans l’âme !
Lassana Coulibaly, affectueusement appelé par ses amis «Lascooldji», est un amoureux de la culture, notamment malienne. Dynamique, il l’est. Pragmatique, il l’est également. Car, en associant Lass à une activité, nous confie un de ses amis de plus d’une dizaine d’années dénommé «Peulh», il se donne à fond ; cette activité se tiendra quoi que ça coûte. «Lass est un cas. Rare de voir quelqu’un comme lu,i engagé souvent sans récompense en contre partie. Mais il ne se décourage jamais, même s’il y a échec», nous confie «Peulh». Cet engagement de «Lass» pour la culture a commencé, selon « Peulh », depuis au Lycée. «Il organisait des sorties à Sélingué avec ces camarades de classe souvent avec son argent. Tout cela à cause de sa passion pour les activités de culture, de découverte, pour permettre aux élèves d’aller à la découverte d’autres réalités du pays». Et «Lascooldji» lui-même d’ajouter : «on peut dire que je suis un passionné de la culture depuis fort longtemps. A travers la culture, j’ai une maîtrise en géographie, un master II en environnement et en aménagement du territoire. Mais au-delà de tout ça, j’ai été animateur de radio pendant plusieurs années. Après, je suis devenu un « Didier » dans le Night Club «Moffu» de l’artiste international Salif Kéita », a déclaré souriant « Lascooldji ». Et ce n’est pas tout. Il s’est ensuite arrangé du côté des techniciens de sons pour faire des tournées à l’intérieur du Mali en 2003 dans les festivals du Désert et du Niger, etc. Depuis 2013, il est l’administrateur d’Abdoul Berthé dans le festival les «nuits du Kamalengoni» à Yanfolila. Bien avant tout cela, « Lascooldji » a été l’initiateur de l’activité culturel «Miss Moffu» de Kalanbancoro également pendant 6 ans. Avant «Miss Moffu», il y avait Miss «Kalabancoro» qu’il organisait avec des amis jusqu’à 7 éditions. A rappeler aussi qu’il est l’initiateur de la création du Club Salif Kéita, chevalier blanc de la musique du Mali. « Je fais cela compte tenu de ce que Salif Kéita fait pour le Mali dans le domaine de la musique et compte tenu de ma passion également pour la culture», a déclaré Lassana Coulibaly dit «Lascooldji». Et son ami «peulh» de nous raconter une anecdote. «Las est tellement courageux qu’il lui arrivait d’organiser des activités culturelles à 2000 Fcfa. On était un jour à une conférence de presse de Salif Kéita au Moffu. Les Journalistes lui ont demandé pourquoi ces concerts sont chers au Mali ? Ce dernier rétorqua qu’il ne les fait pas pour les Maliens, mais pour les étrangers qui sont au Mali qui ne parviennent pas à assister à ces concerts dans leurs pays en Europe et autres continents. Et Salif d’ajouter que s’ils veulent des activités de moindre coût de venir à l’activité de 2000 Fcfa de Lascooldji au Moffu », atteste «Peulh» avec humour et optimisme sur le succès futur de son ami dans le domaine culturel.
Par Hadama B. Fofana
Source: Le Républicain- Mali