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La présidente du Brésil visée par une procédure de destitution

La menace d’une procédure de destitution (« impeachment ») planait sur la présidente brésilienne, Dilma Rousseff, depuis des semaines. Son ennemi juré et ancien allié, Eduardo Cunha, président de la Chambre des députés, en a donné le signal de départ, mercredi 2 décembre. Au terme d’une journée pleine de rebondissements, M. Cunha a accepté de lancer l’examen de la demande de destitution de la présidente réclamée par les juristes Miguel Reale et Helio Bicudo, l’un des fondateurs du Parti des travailleurs (PT, gauche), auquel appartient aussi la chef de l’Etat.

presidente bresilienne Dilma Rousseff

Les juristes reprochent à Dilma Rousseff d’avoir maquillé les comptes publics en 2013, un an avant sa réélection, en ayant recours à une mécanique dite de « dribble fiscal » : faire financer des dépenses budgétaires par des emprunts auprès d’établissements bancaires publics permettant d’en retarder le débit. Dans les rues de Sao Paulo, l’annonce de l’ouverture de la procédure de destitution a été saluée par les manifestations de joie de ceux qui réclament depuis des mois le départ de la présidente, la plus impopulaire du Brésil depuis le retour de la démocratie, en 1985.

Vengeance personnelle

Eduardo Cunha n’a pas agi au nom de ces citoyens mécontents, mais plutôt par vengeance personnelle. Membre du Parti du mouvement démocratique brésilien (PMDB, centre), principal allié du PT au sein de la coalition gouvernementale, l’homme est en sursis politique. Il est impliqué dans le scandale de corruption autour de l’entreprise pétrolière nationale Petrobras et les géants du bâtiment et des travaux publics (BTP) : la justice a découvert plusieurs comptes en Suisse dotés de millions de dollars dont lui et sa famille seraient bénéficiaires. Une commission d’éthique devait juger ce proche des milieux évangéliques. Son dernier espoir résidait dans le soutien du PT, qu’il tenait en otage en brandissant la menace de l’impeachment. Connaissant son pouvoir de nuisance, Luiz Inacio Lula da Silva, l’ancien président (2003-2010) et mentor de Dilma Rousseff, aurait plaidé pour le défendre, mais nombre de voix au PT se sont élevées contre ce cynisme politique jugeant la tactique « suicidaire ».

Dans la soirée, la présidente Rousseff s’est dite « indignée » de la manœuvre du président de la Chambre des députés à l’encontre d’un « mandat obtenu démocratiquement ». Les motifs de cet impeachment sont « inconsistants », a-t-elle assuré, soulignant malicieusement qu’elle ne possédait aucun compte hors du Brésil.

De l’avis même du chef du groupe PMDB à la Chambre basse, Leonardo Picciani, M. Cunha « a fait une erreur » en lançant la procédure de destitution. « Il n’y a pas de motif juridique », a-t-il estimé. Divers experts avaient déjà estimé le fondement de la demande d’impeachment fragile. D’autres présidents ont déjà eu recours au « dribble fiscal » bien que dans de moindres proportions. Les faits sont-ils suffisants pour obliger au départ d’un président ? Mme Rousseff pourrait payer les déboires de son parti, sali par le scandale de corruption Petrobras-BTP, et son incapacité à surmonter la crise économique.

Le Brésil est en pleine récession. Au cours du troisième trimestre 2015, le produit intérieur brut a chuté de 1,7 %. Sur l’année, la contraction serait de 4,5 %, la plus importante depuis deux décennies. L’industrie et le commerce licencient, le chômage redevient une hantise des Brésiliens. La crise économique alimente le malaise social et le mécontentement de l’opinion, et rejaillit ainsi sur la crise politique et institutionnelle, radicalisant les positions des uns et des autres. A son tour, le conflit de pouvoir entre l’exécutif et le législatif retarde la réponse à la récession et tend donc à l’approfondir et à la prolonger.

Le quotidien Folha de S. Paulo indiquait justement que Dilma Rousseff semblait presque soulagée du dernier coup d’éclat de M. Cunha, tant le chantage qu’il entretenait paralysait son gouvernement et divisait le PT. « C’est mieux ainsi », aurait lâché un de ses proches. Il faudra attendre plusieurs mois avant que Mme Rousseff ne soit fixée sur son sort. Dans un premier temps, la demande de destitution devra être approuvée par deux tiers des députés pour donner lieu à la mise en place d’une commission d’enquête qui déterminera si oui ou nom la présidente s’est rendue coupable d’une faute grave. Mais d’ores et déjà, le lancement de la procédure aggrave une crise politique et économique dans laquelle le Brésil s’enfonce chaque jour un peu plus.

Claire Gatinois

Source: Le monde

 

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