La facture des interventions militaires d’urgences s’allonge pour la France. Une note que le pays aimerait bien partager davantage avec les autres États membres de l’Union européenne grâce à la création d’un fonds européen permanent destiné aux interventions de maintien de la paix.
Le 18 et 19 décembre 2013, le Conseil européen consacré à la défense devrait trouver sur la table des discussions des propositions du Président François Hollande visant à renforcer la coopération européenne dans les financements des interventions d’urgence.
« La France est intervenue au Mali sous mandat de l’ONU et avec le soutien de l’UE. En République de Centrafrique également. Mais elle assume la majorité des coûts » note un connaisseur du dossier. Dans un récent rapport sur les crédits du budget, la Cour des comptes estimait le coût total de l’intervention Serval au Mali à 647 millions d’euros. (cf page 57)
Une facture qui a fait décoller les crédits français consacrés aux opérations extérieures dans le budget 2013, qui ont atteint 1,26 milliard d’euros contre 817 millions l’année précédente.
De son côté, l’opération Sangaris en Centrafrique déclenchée le 5 décembre pour rétablir la situation à Bangui pourrait coûter environ 150 millions d’euros à la France, selon les premières estimations effectuées.
Convaincre les Européens de participer financièrement
Pour François Hollande, le poids financier de ces opérations militaires reste lourd à porter en période de rigueur budgétaire. Le président français va donc proposer de partager le coût de ces opérations.
Lors du Conseil européen qui se tient jeudi 19 et vendredi 20 décembre, le président français va proposer la création d’un fonds européen permanent pour les missions de maintien de la paix. Un mécanisme de solidarité qui devrait permettre de répartir financièrement le fardeau d’une intervention militaire approuvée politiquement par tous, mais opérée et payée par un.
« Il existe des dispositions dans les traités européens permettant que les États membres se mettent d’accord en faveur d’un financement destiné à une intervention pour le maintien de la paix menée par un ou plusieurs États membres. Donc il y a une base juridique » explique un expert de Bruxelles.
Reste que la proposition ne se fera pas en un jour. Du côté de l’Élysée, on espère obtenir un mandat pour étudier la création du fonds. « Nous espérons recevoir un mandat assorti d’un calendrier de travail avant la fin du premier semestre 20123 » explique un diplomate français.
Sortir les opérations militaires des critères de Maastricht
En plus de la proposition en faveur de la création d’un fonds européen, la France compte également demander que les dépenses qu’elle engage dans pour les interventions militaires soutenues par l’UE ne soient pas comptabilisées dans le déficit budgétaire contrôlé par la Commission européenne.
La France devrait ramener son déficit public à 4,1 % du PIB en 2013 selon le projet de loi de finances rectificative, mais doit encore poursuivre l’assainissement de ses finances pour passer sous la barre des 3 % que réclame Bruxelles.
« Je souhaite que le gouvernement, lors du sommet européen la semaine prochaine, dise clairement que tout ce qui pèse sur le budget de l’État en opérations extérieures décidées au nom de la communauté internationale ne soit pas pris en compte dans le déficit budgétaire », a déclaré le président du groupe socialiste au Sénat, François Rebsamen sur l’émission Questions d’info sur LCP.
Cet abattement défendu par la France reste cependant difficilement imaginable dans la pratique. « Si l’on commence à déduire les dépenses des interventions militaires, pourquoi ne pas déduire également d’autres dépenses nationales telles que l’aide au développement ou de l’éducation ? » pointe un diplomate européen.
Autre difficulté, les dépenses militaires sont spécifiques à certains États membres. « Il semble donc difficile d’en faire une règle européenne » poursuit-il. La France fait partie des pays européens dont les dépenses militaires sont les plus élevées en Europe et dispose donc d’un intérêt particulier sur cette proposition.
Le président Hollande aura l’occasion aujourd’hui de discuter de ces propositions en amont du Conseil européen lors de la visite de la chancelière allemande d’Angela Merkel à Paris.