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Intervention de l’ambassadeur du Mali en France, Toumani Djimé Diallo, au sénat Sénat français le 26 février 2020

Monsieur le Président Christian Cambon,

Mesdames et Messieurs les membres de la Commission Affaires Etrangères, Défense et Forces Armées du Sénat,
Chers collègues des pays membres du G5 Sahel,

Je me retrouve, pour la deuxième fois dans ce Sénat, haut lieu de la Démocratie française et si chargé d’histoire.

J’ai eu l’honneur d’avoir en effet été invité par le Groupe d’amitié France – Afrique de l’Ouest. C’était le 10 juillet 2019, à l’invitation de M. André Reichardt, Sénateur du Bas-Rhin, que je voudrais remercier encore une fois. J’en garde le souvenir de femmes et d’hommes portant le Mali dans leur cœur, et soucieux du retour de la paix et de la sécurité dans ce pays, et dans tout le Sahel, sans lesquelles l’on ne saurait parler de développement.

Bien d’événements se sont passés depuis, au Mali comme dans tous les autres pays du Sahel.

Mais avant tout, je voudrais saisir la présente opportunité afin de présenter au Sénateur Jean Marie Bockel, Sénateur du Haut-Rhin, mes sincères condoléances, et avoir une pensée attristée pour la perte cruelle, au Mali, de son fils, le Lieutenant Pierre Bockel ; Pour également exprimer mes pensées les plus émues s’agissant de ses douze compagnons de lutte tombés, avec lui, sur le champ de l’honneur. Que leurs âmes reposent en paix !

Si la police des débats le permet, je voudrais demander à Monsieur le Président que l’on observe une minute de silence en leurs mémoires, ainsi qu’à celles de tous ceux, français, européens, africains, qui ont fait le sacrifice de leur vie dans cette lutte, à nulle autre pareille, pour la Liberté.

Monsieur l’Ambassadeur du Burkina Faso, je voudrais vous féliciter pour la concision de votre présentation. Nous avions en effet convenu, le Burkina Faso assurant alors la présidence du G5 Sahel, qu’il vous revienne de vous exprimer en premier et de brosser le tableau synoptique de la situation globale du Sahel, permettant aux autres de ne pas être longs dans leurs présentations liminaires. Cela, afin que nous puissions, plutôt, tous nous consacrer à répondre aux questions qui ne manqueront pas d’être posées sur nos cas spécifiques.

Je voudrais rendre hommage ici au leadership de la France dans la mobilisation internationale pour le Sahel, et saluer singulièrement la clairvoyance du Président Macron qui, avec la Coalition Internationale préconisée pour le Sahel lors du Sommet historique de Pau, autorise à espérer en la mise en place d’un outil gagnant en pragmatisme, en coordination et en efficience dans la lutte contre le terrorisme.

Permettez moi, Mesdames et Messieurs, en attendant de répondre à vos questions sur le Mali, de me limiter à soulever un ou deux points, mais qui nous paraissent essentiels :

Après un entretien avec le Président Macron à l’Elysée, le Président Ibrahim Boubacar Keïta avait dit, je cite : « Le Sahel n’est qu’une passerelle, un espace d’aguerrissement d’hommes en vue de conquête d’autres horizons, et à ce titre, il devrait être préservé à tout prix » fin de citation.

C’est dire que le Sahel n’est qu’une étape pour ces groupes terroristes. Leur ambition assumée est en réalité une vision idéologique, avec pour objectif d’envahir le monde, l’Europe en premier, aux fins revendiquées de détruire la vision occidentale au profit de la leur, qui est des plus obscurantistes. Remarquez : Ils tuent des chrétiens, mais ils tuent encore plus de musulmans, l’un de leurs principaux ennemis étant l’islam de tolérance avérée pratiqué au Mali.

Ne répétons donc pas l’erreur de ceux-là qui, par manque d’une vision claire sur la crise des Sudètes, avaient cru en un Hitler affirmant qu’avec l’annexion de cette partie germanophone de la Pologne, dite des Sudètes, je cite : « l’Europe connaîtra ensuite la paix pour mille ans »fin de citation. Car la suite, on la connaît, dans toute son horreur.
De même, n’oublions pas cette prédiction de Francis Fukuyama, ce politologue américain qui écrivit , sur commande de la CIA, un essai intitulé « La fin de l’histoire et le dernier homme », où il annonçait la victoire définitive du Libéralisme en tant qu’idéologie, ainsi que la fin de la guerre froide mais, en même temps, désignait l’Islamisme comme le dernier obstacle à abattre.

En fait cet islamisme, libéré par la chute de Saddam Hussein, à laquelle la France refusa de s’associer, puis et surtout, par celle de Khaddafi, malheureusement à laquelle la France joua un grand rôle, cet islamisme là, libéré une fois sautés les verrous qui le contenaient, constitue le socle sur lequel s’est bâti le terrorisme en action dans le Sahel.

Car si les noms des groupes terroristes sont multiples et variés, l’idéologie, elle, reste la même. Et c’est le groupe agissant autour du Lac Tchad qui l’exprime le mieux, à savoir Boko Haram, en clair, « La civilisation occidentale est impie et maudite par Allah ». Il leur faut donc la détruire. Partout et par tous les moyens. Y compris les attentats suicides !

C’est dire, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, qu’il nous faut repenser complètement les paradigmes en cours. Il ne s’agit pas d’une guerre du Sahel. Il s’agit d’une guerre déterminante pour l’avenir du monde libre qui se déroule, pour l’instant, au Sahel ainsi qu’aux bords du Lac Tchad.

D’où l’extrême pertinence de la décision des Chefs d’État à Pau, créant une Coalition pour le Sahel rassemblant, je cite : « les pays du G5 Sahel, la France – à travers l’opération Barkhane, ainsi que ses autres formes d’engagements, les partenaires déjà engagés, ainsi que tous les pays et organisations qui voudront y contribuer » fin de citation.

Pour aller vite, un Secrétariat Particulier de ladite coalition placé sous l’autorité de l’Ambassadeur Laurent BIGOT vient de voir le jour. Le Mali salue l’initiative et y nommera un représentant dans les meilleurs délais.

A ce titre, nous devons renforcer la dimension d’ouverture de la Coalition, qui se doit d’être véritablement Internationale, c’est-à-dire ouverte à tout partenaire et à toute technologie permettant une riposte adaptée à la guerre asymétrique qui est imposée au Sahel.

En Matière de technologie, justement, il nous paraît indispensable d’inclure, dans la chaîne de renseignement, une vidéo surveillance par couverture satellitaire de l’ensemble du Sahel, afin d’être à même d’attaquer et non seulement de poursuivre après les attaques ou les attentats ; Faute de quoi, les efforts risqueraient d’être vains , les Armées de la Coalition discréditées, le Sahel disloqué et la digue qu’il constitue rompue, avec les conséquences qu’il est aisée d’imaginer.

De même, la formation EUTM de nos Armées nationales doit être adaptée au nouvel environnement, car aucun de nos pays n’est réellement préparé à cette guerre asymétrique.

En conclusion, et en attendant vos questions, nous réaffirmons notre foi en la coopération et la solidarité internationales, singulièrement françaises ; et nous fondons beaucoup d’espoir dans la compréhension agissante du Sénat.

Je vous remercie de votre aimable attention.

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