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Immigration clandestine : L’INTERPELLATION SE FAIT TRÈS FORTE

La récente tragédie en Méditerranée qui a coûté la vie à 184 Maliens appelle à se mobiliser plus vigoureusement contre la migration irrégulière

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Nous les avons rencontrés, voilà quelques mois. Issa, un jeune de 28 ans, et Karim qui affiche un peu plus de la trentaine, affichaient la même détermination. Ils allaient tenter un départ vers l’Eldorado qui pour eux se situe là-bas, de l’autre côté de la Méditerranée. Leur motivation est sans faille et leur motif, des plus simples : la recherche d’un mieux-être. « Partir pour nous est vital. Nous ne pouvons plus rester dans cette misère sans fin. Il n’y a rien qui me retient ici. Je dois partir, la survie de ma famille en dépend », avait lancé Issa, venu de son Sandaré natal.
Nos deux interlocuteurs ne se cachaient pas les difficultés qu’ils auraient à affronter en chemin. Ils étaient conscients que les circuits migratoires sont devenus plus dangereux à emprunter dans un contexte de fermeture renforcée des frontières dans les pays d’accueil et de crise économique généralisée. Mais Issa et Karim se disaient prêts à risquer leur vie en empruntant une filière d’immigration illégale.
Ils ont donc rejoint la cohorte des milliers de candidats interceptés et guidés par les « passeurs » qui traversent d’abord le Sahara pour ensuite franchir la Méditerranée dans des embarcations de fortune. Le voyage est périlleux et ils sont malheureusement nombreux les jeunes Maliens qui y laissent la vie. Les bilans en victimes humaines sont en effet terribles.
Dans la nuit du 18 au 19 avril 2015, la Méditerranée a connu le plus grand drame de l’histoire avec la mort de près de 800 personnes par noyade. Notre pays a payé un lourd tribut lors de cette tragédie. Après le recoupement des informations pertinentes recueillies à différentes sources, le ministre des Maliens de l’extérieur le Dr. Abdrahamane Sylla confirme que 184 de nos compatriotes figurent parmi les victimes.
LE DEVANT DE L’ACTUALITÉ. Ce chiffre, dira-t-il, peut encore se modifier à la hausse. A lui seul le cercle de Bafoulabé a vu disparaître 105 de ses ressortissants. Le cercle de Kayes compte 51 victimes, Diéma 25, Kita 2 et Nioro du Sahel une. Le nombre élevé de Maliens figurant parmi les rescapés (14 sur 26) laisse malheureusement présumer que nos compatriotes composaient un des plus forts contingents embarqués sur les bateaux de la mort à partir des côtes libyennes. Le ministre Sylla a annoncé que des sources crédibles établissent à 250 le chiffre des Maliens (dont une cinquantaine de femmes et d’enfants) ayant embarqué à bord du navire qui a naufragé. Face à ce drame, le ministère des Maliens de l’Extérieur s’est fortement mobilisé.
Des mesures d’urgence ont été prises. Il s’agit entre autre de l’envoi d’une délégation en Italie pour rencontrer les rescapés, les autorités italiennes et les organismes humanitaires. A cette initiative s’ajoute le déplacement du ministre dans les localités d’origine des victimes, la multiplication des interventions dans les médias pour mieux informer les citoyens, l’intensification de la campagne de sensibilisation sur les risques et les dangers de la migration irrégulière. Il faut aussi noter l’observation d’une journée de deuil national à la mémoire des victimes le 30 avril dernier.
Il faut dire que les drames de la migration occupent ces derniers temps le devant de l’actualité. Les autorités équato-guinéennes procèdent depuis trois mois à des expulsions massives d’étrangers – dont 175 de nos compatriotes – dans le non respect des conventions internationales en matière de protection des migrants. Il reste encore 125 Maliens détenus en Guinée Equatoriale qui attendent leur renvoi. C’est aussi le cas de 40 autres de nos compatriotes au Cameroun.
A cela, il faut ajouter les cas d’exactions contre les migrants en Afrique du sud, en Angola, en Libye et des manifestations anti-immigration dans certains pays européens. De 2014 à nos jours le gouvernement malien a fait rapatrier 2392 maliens de Centrafrique, 26 du Cameroun et 756 de Libye dont le dernier convoi est arrivé le 25 avril dernier. Les expulsions ont aussi concerné 70 Maliens d’Arabie Saoudite et 125 d’Espagne.
Ces chiffres interpellent. Car derrière eux, il y a des deuils qui frappent des villages et des communautés. Que faut-il faire pour mettre fin à l’immigration clandestine ? Quelles sont les stratégies possibles pour persuader les candidats à la migration irrégulière de rester au pays ? Quelles sont les solutions et les réponses proposées par l’Etat ? Y a-t-il une loi contre la migration clandestine ? Voilà autant des questions auxquelles le ministre Abdrahamane Sylla, son collègue de la Justice Mahamadou Diarra et celui de l’Emploi et de la Formation Professionnelle, Mahamane Baby ont tenté de répondre lors d’une conférence de presse initiée pour faire le point sur la situation du naufrage du 18 avril dernier.
BANNIR LA COMPLICITÉ PASSIVE. Compte tenu de l’importance des enjeux migratoires, le ministère des Maliens de l’extérieur avec l’appui de ses partenaires a élaboré un document de politique pour une meilleure gouvernance des migrations. Ledit document, indique le ministre, est un ambitieux projet de 120 milliards de Fcfa. Adoptée en Conseil des ministres, la Politique nationale de migration (PONAM) sera lancée bientôt dans notre pays. Son objectif consiste à mieux gérer la migration afin que celle-ci contribue à la réduction de la pauvreté et au développement durable du pays.
Les actions prioritaires concernent entre autres la protection et la sécurisation des Maliens de l’extérieur. Il s’agit de mettre en place des mécanismes et des dispositifs de gestion appropriés pour mieux organiser la migration. Bref, la démarche, selon le ministre, consiste à initier sur la base des consultations avec l’ensemble des acteurs des zones de départs vers des projets productifs pour retenir les candidats potentiels à la migration irrégulière. Dans le cadre de la mise en œuvre de la PONAM, il est prévu la création de 5000 emplois directs en plus de la mise en place des infrastructures de production et transformation dans les localités de départ. A ces stratégies s’ajoutent des projets de réinsertion socioéconomique à l’endroit des Maliens de retour volontaire ou forcé.
Face à l’ampleur de la tragédie survenue en Méditerranée, le ministre Sylla a lancé un appel à tous les Maliens, aux parents qui autorisent et financent les départs, aux jeunes qui mettent leur vie en danger, aux intermédiaires, aux « passeurs », aux trafiquants d’êtres humains de complètement renoncer à une pratique odieuse. A cet effet, le gouvernement dans le cadre de l’application de la Loi 20125-023 du 12 juillet relative à la lutte contre la traite des personnes et les pratiques assimilées engagera une lutte sans merci contre les réseaux de passeurs.
Il faut notamment bannir la complicité passive en dénonçant les passeurs et leurs collaborateurs, a insisté le ministre. « Il faut comprendre que c’est en oeuvrant à l’unisson que notre pays gagnera le combat contre l’immigration clandestine, un drame qui tue plusieurs milliers de nos jeunes », a lancé le Dr. Abdrahamane Sylla.
Le gouvernement est donc interpellé. Car pour mettre fin à ce drame, il est nécessaire de trouver une solution globale. Cela passera par la mise en œuvre des programmes et projets de développement ainsi qu’ leur aboutissement. Car en tout premier lieu, c’est la pauvreté endémique qui pousse les jeunes à partir.
M. A. TRAORÉ

source : L Essor

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