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IBK-KOENDERS : Au-delà des convenances…

Au-delà des convenances diplomatiques, le climat n’est plus au beau fixe entre le Président IBK et le Représentant spécial du secrétaire général (RSSG) de l’ONU, Bert Koenders, au sujet de l’application de l’Accord préliminaire de Ouaga du 18 juin 2013.

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L’entretien, le lundi dernier, entre le Président Ibrahim Boubacar et le Représentant spécial du secrétaire de l’ONU, Bert Koenders, s’inscrivait dans un cadre de concertations régulières entre la Minusma et les autorités de notre pays au cours de laquelle, il a été question des pourparlers inclusifs, la situation sécuritaire et l’état d’avancement du déploiement de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations-Unies pour la stabilisation du Mali (Minusma).

La fixation

Au-delà des apparences d’un communiqué mièvre de la Mission des Nations-Unies quant à une bonne coopération avec le Gouvernement, les rapports ne semblent pas au beau fixe entre les deux parties.

Il pourrait même y avoir de l’électricité dans la l’air quant à la conduite que voudrait imprimer la Minusma au dossier de Kidal avec une fixation sur les « pourparlers inclusifs » et qui n’est pas du tout du goût du Président IBK qui entend mériter largement la confiance, la très grande confiance placée en lui par le peuple malien.

Mais, il faut revenir à la déclaration du Président du Conseil de sécurité des Nations-Unies, du jeudi 23 janvier, pour comprendre qu’il y a effectivement de l’eau dans le gaz des rapports.

Dans cette déclaration, comme l’exige la diplomatie, il a caressé le Gouvernement dans le sens du poil pour des élections réussies, « les initiatives prises de lancer une série de consultations nationales sur la situation dans le Nord en vue de promouvoir la bonne gouvernance, la réforme des institutions et le développement économique et social et de renforcer l’unité et la sécurité nationales ».

Ensuite, il a posé sur la table la question d’un « processus de négociation inclusif et crédible, ouvert à toutes les communautés du Nord du Mali, en vue de parvenir à un règlement politique durable de la crise et d’instaurer la paix et la stabilité à long terme dans l’ensemble du pays, dans le respect de la souveraineté, de l’unité et de l’intégrité territoriale de l’état malien. Il accorde son plein appui au Représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali, chargé d’user de ses bons offices, en coordination étroite avec la communauté internationale, en vue du rétablissement de la paix et de la sécurité sur l’ensemble du territoire national malien, dans le cadre d’un accord global mettant fin à la crise ».

Un choix mal inspiré

En outre, dans un savant dosage, il exige que les groupes armés déposent les armes et rejettent le recours à la violence.

Alternant le chaud et le froid, le Conseil de sécurité réaffirme son soutien à l’action de la MINUSMA en faveur du renforcement des processus susmentionnés.

Dans la même veine, il insiste sur le fait qu’il importe de procéder, sans plus attendre, au déploiement opérationnel complet de la MINUSMA afin de sécuriser les principales agglomérations et de protéger les civils, y compris les femmes et les enfants, tout particulièrement dans le nord du Mali, et de continuer d’aider à rétablir l’autorité de l’État dans l’ensemble du pays, ainsi qu’à promouvoir l’état de droit et la protection des droits de l’homme.

À la lumière de cette déclaration, les pourparlers inclusifs sont au cœur des préoccupations du Conseil de sécurité.

C’est justement ce que le porte-voix de la Minusma a été prié d’aller porter à la connaissance du Président IBK en lui annonçant par la même occasion l’arrivée d’une mission de contrôle, le 2 février prochain, dans notre pays. Un chantage, à peine dissimulé cette fois-ci, pour mettre le Président sous pression et le contraindre à accélérer la mise œuvre de ce processus de pourparlers qui est devenu un but en soi.

Pour qui connaît l’homme, ce n’est pas sous des menaces et des intimidations qu’il change de fusil d’épaule ou qu’il se rend.

Il est alors aisé de comprendre que ce n’est pas le meilleur chemin qui a été arboré pour obtenir les fameux pourparlers inclusifs en passe de devenir « une solution miracle » à la crise au Nord.

N’est-ce pas aussi pour son caractère à ne pas transiger sur les questions essentielles que IBK a été plébiscité par ses compatriotes ?

L’ignorer reviendrait à faire fausse route.

Les aberrations

Par ailleurs, le Conseil de sécurité ne manque pas de briller par certaines incohérences.

Primo, il félicite le Gouvernement pour les initiatives heureuses prises en vue de promouvoir la bonne gouvernance, la réforme des institutions et le développement économique et social et de renforcer l’unité et la sécurité nationales ; parallèlement, il appelle à des pourparlers inclusifs, exactement pour les mêmes résultats escomptés. Les consultations nationales et les pourparlers sont-ils dès lors antinomiques ?

Secundo, le Conseil salue une « série de consultations nationales » pour ensuite s’appesantir sur un processus de dialogue inclusif ouvert à toutes les communautés du Nord. Est-ce à dire que les consultations nationales sont exclusives, ignorant les communautés du Nord ; ou bien les pourparlers inclusifs renvoient uniquement aux communautés du Nord, à l’exclusion des autres communautés du pays ? Dans l’un ou l’autre cas, il faudrait alors que l’on s’accorde sur le sens en français de ce que signifie « inclusif ». En tout cas, selon le Dictionnaire Larousse, il veut dire : « Qui contient en soi quelque chose d’autre ». En cela, inclusif n’a rien de nouveau sous le ciel ; à moins qu’on ne veuille le charger d’une signification jusque-là inconnue de l’Académie française.

Tertio, que dire de cet appui à M. KOENDERS ? « Il accorde son plein appui au Représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali, chargé d’user de ses bons offices, en coordination étroite avec la communauté internationale, en vue du rétablissement de la paix et de la sécurité sur l’ensemble du territoire national malien, dans le cadre d’un accord global mettant fin à la crise », peut-on lire dans la déclaration. Ce soutien signifie simplement que le mandataire de l’ONU pour le Nord perd simplement le nord pour les Maliens et qu’il a besoin d’être renforcé pour mener à bien sa mission.

Le double jeu

Quarto, le Conseil de sécurité exige le désarmement et le cantonnement des groupes armés comme préalable au processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR). Paradoxalement, du 18 juin, date de la signature de l’Accord préliminaire, à aujourd’hui, les rebelles non seulement ne sont pas cantonnés ; mais, ils ont l’outrecuidance de s’ériger en maîtres absolus de Kidal. Au vu et au su de la Minusma qui évite soigneusement de les contrarier dans leur dessein machiavélique de partition du territoire national.

Faudrait-il s’attendre à ce que le Président IBK s’embarque dans un tel Capharnaüm de désordre organisé ?

La réponse est à la mesure de ces déclarations : « Je ne traiterai pas d’égal à égal avec des groupes armés » (Cf : Déclaration au sortir du bureau de vote lors du second tour des élections législatives) ; « Donc je veux le dialogue, je le veux tout de suite. Je n’ai jamais cessé de le vouloir. Mais je reste ferme et imperturbable : l’intégrité et l’unité territoriale du Mali seront rétablies et garanties. Ce préalable n’est pas négociable. Tout le reste l’est.  Je ne suis pas va-t-en-guerre » (Cf : Réponse aux vœux de Nouvel An du chef d’état-major général des Armées). Cela au moins est suffisamment clair, même pour ceux qui se croient investis d’une mission messianique pour sauver les âmes des rebelles.

Un événement catalyseur du clash

En réalité, le froid dans les relations entre le Président IBK et le Représentant spécial du secrétaire général de l’ONU remonte au mois de novembre dernier lorsque la Minusma, à la dernière minute, s’est soustraite de l’organisation de mission du Premier ministre à Kidal. Ce dernier, en raison de la tension qui y prévalait, a annulé son voyage pour rallier la capitale à partir de Gao où il était en mission officielle.

Nous vous livrons in extenso le contenu du Gouvernement rendu public à l’issue de cet incident qui est loin d’être mineur :

« Après l’évacuation du Palais du Gouverneur et des autres bâtiments publics par les groupes armés, le 16 novembre, le Gouvernement a pris les dispositions pour y installer officiellement le Gouverneur, le 28 novembre 2013, et engager effectivement le retour de l’administration et des services sociaux. À cet effet, le Premier Ministre, accompagné d’une forte délégation, s’est rendu à Gao, avant-hier 27 novembre, dans la perspective de gagner Kidal ce jour.

Ce matin, l’aéroport de Kidal a été le théâtre d’incidents regrettables, durant lesquels, les forces armées maliennes ont été prises à partie par des éléments incontrôlés. Les FAMA ont notamment essuyé des jets de pierre et des tirs d’armes. Seules face aux manifestants, elles ont procédé à des tirs de sommation pour se dégager.

Le Gouvernement s’étonne de l’absence de mise en place, par la Minusma, d’un dispositif adéquat de sécurisation de l’aéroport et de la ville, en dépit de son information préalable de l’organisation de cette mission dont elle a assuré le transport.

Le Gouvernement déplore ces incidents, au cours desquels trois personnes ont été blessées, qui sont en cours d’évacuation sur l’hôpital régional de Gao.

Ces événements regrettables, moins d’un mois après l’assassinat des deux journalistes français le 2 novembre, indiquent que les efforts doivent être poursuivis en faveur de l’affirmation de la souveraineté nationale sur l’ensemble du territoire du Mali, afin de permettre l’instauration d’un dialogue inclusif avec toutes les parties prenantes, de soustraire cette partie du Mali aux actions des groupes terroristes et d’y restaurer une paix durable.

Le Gouvernement demeure déterminé à tout mettre en œuvre pour atteindre cet objectif conforme aux termes de la résolution 2100 du Conseil de Sécurité du 25 avril 2013.

Bamako, le 28 novembre 2013

Présidence de la république ».

Comme on peut le constater, ce communiqué du Gouvernement n’est pas signé d’un ministre ; mais bien de la présidence de la république. Toutes choses qui attestent à suffisance que ce qui a été qualifié d’incident en son temps a été considéré comme un manquement d’une extrême gravité de la part de la Minusma qui, pourtant a, par le passé, assuré la sécurité d’autres personnalités, dont lui-même IBK alors qu’il n’était encore que candidat à l’élection présidentielle de juillet-août 2013.

En définitivement, il n’est pas à exclure que l’accumulation des manquements finisse par avoir raison du Représentant spécial du secrétaire général de l’ONU, très bon missi dominici ; mais qui ne semble pas suffisamment prendre en compte la nouvelle donne du Mali, doté d’institutions légitimes et plus que jamais jaloux de sa souveraineté et de l’intégrité de son territoire.

Par Bertin DAKOUO

SourceInfo-matin

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