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Gouvernance : Faut-il désespérer ?

Le Mali semble être à la croisée des chemins. L’Etat est menacé dans ses fondements institutionnel, politique, social et même culturel. Face à cette grave menace qui compromet les capacités de l’Etat à assurer la sécurité, les droits et les services sociaux aux populations de toutes conditions sociales et sur toute l’étendue du territoire national, tout le monde est interpellé.

La crise est très profonde et relève de la responsabilité de tous les acteurs. Il ne faut donc attendre les réponses adéquates des seuls gouvernants. Mais encore une fois de plus, rappelons-le, c’est au président IBK d’engager un dialogue national avec toutes les composantes sociopolitiques  autour de l’impératif de reconstruire le pacte républicain. Le nouveau Premier ministre, Dr Boubou Cissé, vu son tempérament et son âge, mais surtout son parcours, peut être un acteur clé de ce dialogue national inclusif. Il faut en faire une priorité avant qu’il ne se compromette politiquement.

Il y a péril en la demeure. Il faut sauver le pays de Soundjata Kéita. Le Mali d’aujourd’hui est le modèle même de l’Etat en faillite, menacé de toutes parts de s’effondrer. Face à cette situation, l’on est surpris des comportements et attitudes, à la limite de l’irresponsabilité, de certains de ses filles et fils, notamment des gouvernants et de l’ensemble de l’élite politique et intellectuelle. C’est comme si tout se passe bien dans le meilleur des mondes possibles. Comme nous l’avons plusieurs fois dénoncé, ces élites politico-bureaucratiques et mafieuses, surinvestissent leurs génies et leurs énergies dans la course pour les ressources et le pouvoir.

Malgré le contexte de précarité quasi-généralisée, certains agents publics continuent d’abuser de leurs positions pour s’enrichir sur le dos de l’Etat. Malheureusement, l’impunité semble aujourd’hui encore érigée en mode de gouvernance, accentuant les dérives de tous genres dans la gestion publique et la fracture entre les dirigeants et les populations. En témoignent les rapports successifs du Bureau du Vérificateur Général.

Des discours en total décalage avec les réalités et les exigences

Au plan politique, les batailles sont désormais sans concession, même si cela peut mettre davantage à mal le fragile et précaire équilibre qui fait encore tenir l’édifice national. L’Etat est en faillite depuis de longues dates. Mais les politiques, tellement obnubilés par l’appât du pouvoir et des dividendes qui vont avec, ne semblent pas capables de percevoir cette faillite, au-delà de leur positionnement du moment. Selon que l’on soit du pouvoir ou de l’opposition, l’on ne perçoit la situation actuelle que sous la seule responsabilité de l’autre. Pour les tenants du pouvoir, presque tout est de la faute de l’ancien régime. Ils n’ont certainement pas tort de tout mettre sur le système Amadou Toumani Touré. Cependant, ils ont pourtant été des acteurs clés, pendant cette gouvernance ou ce régime qui a d’ailleurs fait d’eux ce qu’ils sont aujourd’hui. Peut-être qu’ils y tirent leurs tares congénitales.

En effet, la situation actuelle (terrorisme, insécurité, impunité, mal gouvernance, crise institutionnelle) tire principalement ses origines dans les politiques et pratiques aventuristes et les connexions dangereuses et mafieuses des régimes d’Alpha Oumar Konaré et d’Amadou Toumani Touré. Mais le Président IBK et nombre de ses hommes sont, au moins complices des dérives de ses régimes, sinon co-auteurs. Ce n’est pas un débat. C’est un constat. Ce qu’il leur faut aujourd’hui, c’est d’avoir au moins le courage d’essayer autre chose que les pratiques qui ont plongé le pays dans l’abîme actuel.

Or, l’on a le sentiment qu’ils reproduisent ce qu’ils  faisaient sous ATT,  à commencer par les hommes et les femmes chargés de la conduite de l’action publique. Moins  que les compétences, c’est plus la proximité politique, relationnelle et familiale qui continue d’être les principaux critères de choix des hommes.

Du point de vue de la gouvernance, rien n’a fondamentalement changé, excepté quelques innovations sectorielles portées par quelques nouveaux appelés qui, tant bien que mal, essaient de faire bouger les lignes dans certains secteurs. Mais la somme de ces efforts et initiatives isolés ne peut constituer la réponse globale attendue dans la conduite des affaires publiques. D’autant plus qu’à côté, continuent d’émerger de nouveaux riches, qui ne cachent pas leurs fortunes subites et suspectes. Bref, en six ans, le régime du président IBK n’a pas réussi à opérer une seule réforme majeure qui illustre sa volonté d’assainir la gestion publique, de restaurer la compétence et l’intégrité comme valeurs essentielles dans la promotion des cadres dans l’Administration. Bien au contraire, l’on assiste à des violations flagrantes des textes, et une délinquance financière outrancière.

En définitive, il y a comme une absence de volonté et de capacité à rompre avec la cleptomanie au sommet de l’Etat et dans l’Administration publique, une incapacité à instaurer une gestion éthique du bien commun. Si l’on y ajoute l’immobilisme désarmant de la Justice face à cette mal gouvernance rampante, l’on est plus que tenté de désespérer du régime IBK.

Du côté de l’opposition, si le pays va si mal, c’est la faute de ceux qui gouvernent aujourd’hui. C’est peut-être vrai. Car le chef de l’Etat n’a pas su opérer, à défaut de réformes structurelles en profondeur, les réajustements nécessaires à la réduction de la mal gouvernance et de l’impunité des crimes économiques et de sang, qui, finalement, semblent de plus en plus banalisés et encouragés. Toutefois, c’est faire insulte aux Maliens en tentant de leur faire croire que l’ancien régime était mieux, oubliant aussi que si avant c’était bon, c’était aussi en partie grâce à ceux qui gouvernent actuellement. La situation n’est pire qu’avant. Ce sont juste les acteurs et le contexte global qui ont changé.

Société civile inféodée

Quid  de la société civile ? Elle n’est exempte de critiques quant à sa responsabilité dans la crise globale de la société malienne actuelle. Bien au contraire, l’on y voit du tout. L’on y rencontre des organisations crédibles, d’autres sans ligne de conduite ni principes et valeurs. Certaines organisations de la société civile ne sont que de vulgaires porte-voix de politiciens en manque de publicité, qui les instrumentalisent pour atteindre leurs funestes ambitions. D’autres sont des sans-emplois qui ont trouvé dans la société civile, l’opportunité de mobiliser des moyens de subsistance. On peut y ajouter ces grosses boîtes de captation des ressources des partenaires au développement, dont la contribution réelle à l’amélioration du vivre-ensemble est plus que douteuse.

Il existe, certes, des organisations de la société civile qui jouent effectivement leurs rôles dans l’animation de la vie publique nationale et le développement économique et social au niveau local et national. Mais, les tonneaux vides font plus de bruits et entachent l’action des structures crédibles.

Paul N’GUESSAN

Mali Horizon

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