Les sages du Mali disent qu’il faut connaître les personnes avant de les aimer. Si le départ d’Oumar Tatam Ly de la Primature suscite encore beaucoup d’interrogations et commentaires, il aura également surpris le président de la République qui l’a toujours «considéré comme son fils». Mais à «l’impossible, nul est tenu».
Oumar Tatam Ly aura trop encaissé. C’est pourquoi avant de partir, il a écrit une lettre de démission en bonne et due forme. Le grand commis de l’Etat ne trouvera pas à redire là-dessus, d’autant que tout départ d’un Premier ministre obéit à ce sacro-saint principe en raison du fait qu’il travaille sur le programme d’un président élu.
Au-delà de la lettre de démission, il y a une petite note qui explique en plusieurs points les raisons profondes de son départ. Il y a d’abord le fait qu’il n’est que «chef d’orchestre de nom», car tout revenait au président de la République. Et c’est ce qui est à l’origine de l’inefficacité de l’action gouvernementale. Pis, en 6 mois, il devrait y avoir au moins 24 Conseils des ministres, au lieu d’une douzaine. Nuitamment, s’il vous plaît ! Selon la petite note de M. Ly, 77% des décisions des Conseils des ministres, à part les nominations à titre individuel, n’ont pas été appliquées, parce que le président est toujours en mission. Des missions coûteuses qui n’apportent rien en retour au contribuable malien.
En effet, avant son investiture, IBK a sillonné 7 pays uniquement pour annoncer qu’il sera investi le 19 septembre 2013. Ces missions ont coûté cher à l’Etat malien. Après avoir pris fonction, il a été partout dans le monde avec des tailles de délégations qui dépassent tout commentaire. Tout juste après sa prise de fonction, IBK a envoyé ses plus proches collaborateurs en France pour s’habiller. En outre, 75% des dépenses des ministres n’ont servi qu’à renfoncer le Rpm, à redynamiser les comités, sous-sections et sections Rpm à travers le pays. Ainsi, des structures mortes ont été ressuscitées, au moyen de l’achat des consciences pendant les législatives.
La petite note nous apprend également que la victoire du Rpm aux législatives a été appuyée par tous les ministres, qui ont battu campagne avec les biens de l’Etat. Le mot d’ordre était alors : «Si on perd les législatives, vous allez tous perdre vos postes ministériels». C’est pourquoi la Maison des Artisans brûlait pendant que la ministre de l’Artisanat et du Tourisme était en campagne à Koutiala. Les sinistrés ne l’ont vue que le 18 décembre 2013, alors que l’incendie avait commencé le 15 décembre 2013, jour même du 2ème tour des législatives. Tout cela pouvait passer, selon la petite note, si le président de la République n’effectuait pas ses multiples voyages à l’image d’un Magellan II.
Accoutrement extravagant ! La Chancelière allemande n’a-t-elle pas été surprise de voir les habillements du président malien ? En raison de ses dépenses sans parcimonie, sans compter sa maison en reconstruction, IBK a coûté plus cher à l’Etat malien en six petits mois qu’ATT en 5 ans. Le vrai changement auquel les Maliens aspirent, n’est pas possible avec IBK, car c’est un homme qui ne sait pas travailler. Pour preuve, en 6 mois, il n’a posé aucun acte majeur dans le cadre du développement ; même les actions en justice respirent la vengeance, sous la houlette d’un ministre de la Justice qui continue à défendre ses clients dans différents dossiers. N’a-t-il pas récemment voyagé pour aller défendre les intérêts de San Zou dans un dossier d’exploitation minière ? Sans compter les multiples dossiers qu’il impose aux magistrats pour satisfaire ses clients.
L’ancien Premier ministre Oumar Tatam Ly pensait qu’IBK incarnait le changement, travaillait pour le bonheur des Maliens et l’honneur du Mali. Mais, en six mois, ne s’est-il pas trompé sur lui ? En tout cas, le désormais ex-Premier ministre n’a pas été récompensé de ses efforts, lui qui a élaboré le programme économique du candidat IBK à l’élection présidentielle de 2013. Au demeurant, le président malien pouvait être un pilote, à défaut d’être commandant de bord, car en six mois, il a dû beaucoup apprendre puisqu’étant toujours dans les avions. Chose que même les présidents des pays les plus riches au monde ne font pas ; eux qui, au moins, ont leur avion présidentiel.
Après tout ce qui s’est passé pendant les 7 mois, les législatives avec l’imposition de son fils comme président de la Commission défense ; les incendies des marchés de Bamako ; la reconstruction de son domicile ; l’achat de belles voitures et d’habits ; les voyages inutiles et coûteux pour le contribuable malien ; l’achat d’un avion en cette période de crise ; la situation au Nord non réglée surtout à Kidal ; ne voyant aucun acte allant dans le sens du changement souhaité, sans oublier la guerre ouverte entre lui et les membres du Rpm et le fils d’IBK, Oumar Tatam Ly a préféré jeter l’éponge.
Cela nous rappelle cette célèbre phrase d’un homme politique lors de la crise politique de 1997 : «IBK n’est pas fait pour diriger un pays, c’est un baroudeur qui ne prend en compte les préoccupations de personne, sauf ce qui lui passe par la
tête».
L’histoire retiendra qu’Oumar Tatam Ly n’a passé que 6 mois à la Primature, mais qu’il a démissionné en gardant en mémoire qu’il avait en face de lui un homme qui veut transformer ses rêves du passé en réalité. Peu importe le reste !
Kassim TRAORE
SOURCE: Le Reporter
