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G5 Sahel : ce Tchad avec lequel il faut compter

DATA. Alors que le président Déby a menacé de retirer ses troupes des opérations en Afrique, que représente le Tchad sur les terrains d’opérations ?

idriss déby itno président tchad

Le sommet du G5 Sahel, qui réunit les chefs d’État de ces cinq pays membres (Mauritanie, Niger, Mali, Burkina Faso et Tchad), se tient ce dimanche à Bamako. Objectif : définir l’orientation de la lutte contre le terrorisme, mais aussi aborder l’épineuse question du financement. Sur ce sujet, le président tchadien Idriss Déby Itno a clairement annoncé sa position quelques jours avant l’ouverture de cet événement : le Tchad pourrait revoir son engagement militaire au Sahel et ne pas participer à la force conjointe de l’organisation si un soutien financier significatif n’était pas apporté à son pays.

Le Tchad sur cinq fronts

Récapitulons. À ce jour, le Tchad est engagé en effet dans trois opérations de maintien de la paix de l’ONU. Son contingent est majoritairement déployé au sein de la Minusma, la force des Nations unies au Mali. Dans une moindre mesure, on retrouve une présence militaire tchadienne au sein de la Monusco (République démocratique du Congo) et de la Minustah (Haïti). Concernant les opérations régionales, le Tchad a intégré la Force multinationale mixte (FMM) placée sous l’égide de l’Union africaine. Celle-ci a pour objectif de lutter contre la secte Boko Haram au Niger, au Nigeria et dans la région du lac Tchad. Enfin, une force mixte Tchad-Soudan est également active à la frontière entre les deux pays depuis 2010.

Les Tchadiens dans une zone difficile au Mali

Plus précisément, le contingent tchadien au sein de la Minusma est reparti dans le secteur nord du pays entre trois villes : Kidal, Tessalit et Aguelhoc. « Ce n’est pas un hasard si les Français ont demandé aux Tchadiens d’intervenir dans cette zone difficile d’accès », explique le général de division Jean-Paul Deconinck, qui commande les Casques bleus au Mali. Et d’ajouter : « Les conditions de vie et de travail sont très rudes et les soldats tchadiens sont tout à fait adaptés. Ils ont également un contact très facile avec la population, car ils parlent arabe. »

Un constat partagé par Hamit Barkaï, ancien officier de l’armée tchadienne aujourd’hui en exil en France. « C’est l’une des seules armées à être habituée à combattre dans des conditions arides », explique-t-il, avant de se rappeler les années 1980 où les soldats « ont perfectionné leurs techniques et leur endurance lorsque le pays traversait une période de guerre ».

LIRE aussi : Antiterrorisme : ce qu’il faut savoir des mesures en Afrique de l’Ouest

Le Tchad, un contributeur très important

C’est au sein de la Force multinationale mixte (FMM) que les bataillons tchadiens sont les plus nombreux avec près de 4 000 militaires, mais, au total, ils sont 5 423 soldats tchadiens à être déployés en Afrique. Sur le plan international, si l’on compare les contingents des 128 pays participant aux différentes opérations des Nations unies, le pays de Toumaï est le 17e contributeur. Il est le troisième contributeur de la Minusma, derrière le Bangladesh et le Burkina Faso. À l’échelle du continent africain, seuls 24 États fournissent des moyens militaires.

Tchad : une perception mouvante

La large présence des militaires tchadiens dès 2013 au Mali a permis à ce pays d’Afrique centrale de se façonner une image de puissance militaire sur le continent. « Le Tchad est passé d’un pays en guerre à un pays considéré comme un potentiel facteur de stabilité dans la région », analyse Marielle Debos, maître de conférences en sciences politiques et spécialiste des questions militaires tchadiennes. « Ce nouveau rôle permet à Idriss Déby de passer sous silence les violations des droits humains faites dans son pays, de faire oublier la dernière élection présidentielle qui a été entachée d’irrégularités et de se constituer une rente diplomatique », nuance l’auteur du livre Le Métier des armes au Tchad.

L’armée tchadienne est pourtant de plus en plus vivement critiquée. Dernier exemple en date : un rapport Mapping de la Minusca (anciennement Misca, la force dans laquelle des soldats tchadiens sont intervenus à partir de 2013 jusqu’en 2015) recense des centaines d’exactions et de crimes commis en Centrafrique. « C’est une armée formée pour combattre, elle n’est pas formée aux missions de maintien de la paix », constate l’experte.

Des pertes humaines considérables

Mais si le Tchad est largement engagé militairement sur le continent, il en paie aussi un lourd tribut humain. D’après les dernières données mises en ligne par les Nations unies et l’Union africaine, 125 militaires tchadiens ont perdu la vie sur le terrain des opérations en Afrique.

Un coût financier difficile à évaluer sur fond de baisse des ressources

Autre front sur lequel le Tchad se bat : le front des moyens financiers. Aucun chiffre n’est publié à ce jour, ce qui rend difficile une évaluation du coût des opérations militaires pour le Tchad. En tout cas, une chose est sûre : le président tchadien Idriss Déby a affirmé qu’il ne pourra plus investir aussi massivement si son pays n’est pas aidé financièrement. « Tout cela coûte excessivement cher et, si rien n’est fait, le Tchad sera malheureusement dans l’obligation de se retirer », a déclaré le chef de l’État dans une longue interview accordée au Monde/RFI/TV5 Monde à la fin de ce mois de juin.

Pour avoir une idée des sommes engagées, il y a d’ailleurs lieu de se référer à titre indicatif au chiffre donné par l’ONU à propos du budget global prévu pour la Minusma pour la période 2016-2017, soit 933 millions de dollars. « Si des mesures militaires sont à prendre, ce sera en concertation avec l’État tchadien. Les états-majors ne vont jamais prendre le risque de retirer unilatéralement un contingent sans aucune forme de préavis », explique le général Jean-Paul Deconinck.

L’urgence n’est plus seulement militaire, elle est aussi financière

Ces mises en cause ont lieu au moment où le Tchad traverse une grave crise économique depuis la chute des cours du pétrole en 2014. « Le Tchad est intervenu dans l’urgence en 2013 au Mali qui était sous la menace terroriste. Mais, aujourd’hui, nous ne sommes plus dans une situation d’urgence militaire et la situation financière du pays morose. Il faut donc réajuster les besoins, mais aussi que les États, qui ont plus de moyens, épaulent les pays contributeurs en difficulté », détaille Hamit Barkaï.

Publié le 02/07/2017 à 05:31 – | Le Point Afrique

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