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Faits divers : LES COXEURS VONT DE MAL EN PIS

Faits divers

 

Daouda et Sidiki considéraient que leur travail ne pouvait entretenir leur train de vie. Ils ont accumulé les mauvais choix

Les chemins vers la délinquance sont multiples et chacun de ceux qui font le choix de la marginalité a sa manière de les emprunter. Sans tomber dans la sociologie facile, on pourrait distinguer deux grandes catégories de malfaiteurs. La première comprend les malfrats qui sous l’effet de leurs fréquentations et leur environnement social vont presqu’inévitablement (serait-on tenté de dire) vers le délit, puis vers le crime. Puis il y a les autres qui la plupart du temps obéissent au principe selon lequel l’occasion fait le larron et qui glissent progressivement vers la commission des actes de plus en plus graves. Ce sont la plupart du temps des gens qui abandonnent la possibilité d’avoir une vie normale et laborieuse pour céder à l’attrait du gain rapide et de la vie facile. Comme l’ont fait les deux protagonistes de notre histoire du jour, Sidiki et Daouda.

Le tandem avait commencé son association dans une activité des plus ordinaires à la gare routière de Sogoniko. Puis il avait viré au vol pour finir par le braquage à  main armé. C’est le choix de cette dernière forme de banditisme qui a signé le glas (provisoire ?) de la courte carrière des deux jeunes délinquants.

Les faits. Daouda et Sidiki abordent tous deux la vingtaine d’année. A première vue, rien ne les distingue vraiment des dizaines de jeunes gens qui se croisent et de recroisent tous les jours dans la grande cour de la gare routière de Sogoniko. C’est d’ailleurs là que les deux garçons se sont rencontrés et ont lié amitié. Comme nous l’avons déjà eu à le dire dans de précédents articles, cette gare est un lieu particulier où s’entrecroisent à côté des usagers toutes sortes de personnes qui souvent survivent au jour le jour grâce à l’argent qu’elles tirent de leurs activités. La gare a aussi comme particularité de faire côtoyer des braves gens qui triment dur et des voyous aux aguets de la moindre occasion de se faire de l’argent.
 UNE PETITE RENOMMEE. Au tout début, Daouda et Sidiki n’appartenaient pas au monde des délinquants. Ils faisaient partie de la catégorie des débrouillards. Sans pratiquer une activité vraiment épuisante, ils misaient sur leur dynamisme pour boucler de manière satisfaisante leurs journées. Ils faisaient les « coxeurs » pour les conducteurs de la place. Cela les obligeait à venir très tôt à l’autogare pour attraper les premiers passagers des autobus. Les Bamakois sont familiers de ces jeunes gens qui vous agrippent à votre sortie d’un véhicule individuel pour vous mener presque d’autorité vers le bus de votre destination. Le principe du travail est très simple. Le coxeur reçoit une commission pour chaque passager qu’il amène. Il a le choix d’être payé à la pièce, c’est-à-dire à la livraison du client ; ou à la journée quand un paiement global lui est fait pour sa prestation.

Nos deux jeunes gens avaient opté pour la seconde variante. Celle-ci avait en effet l’avantage de démontrer qu’ils avaient le goût de la performance et surtout elle créait des liens de fidélité entre eux et certains des transporteurs. Des liens qui permettaient de s’échanger de petits arrangements et de collaborer en toute confiance. Ce furent d’ailleurs que nos deux garçons usèrent dans leurs opérations délictuelles. Au cours des premiers mois de leur activité, Daouda et Sidiki  travaillaient plutôt bien. Ils avaient acquis une petite renommée, bénéficiaient de l’estime d’un nombre croissant de gérants de compagnies de transports et avaient parmi les passagers des clients qui se tournaient vers eux pour le choix des bus. Dans ces conditions, pourquoi le tandem a-t-il dévié ? Personne n’a pu nous donner des réponses précises à cette question. Mais beaucoup supposent que les jeunes gens, comme beaucoup d’éléments de leur génération,  ont vite succombé aux attraits de la fête. L’argent était certes bien gagné, mais trop vite dépensé. Et les besoins nouveaux se créaient tous les jours.

Tous ceux qui connaissaient les deux coxeurs sentirent à un certain moment un changement d’attitude de la part de ces derniers. Daouda et Sidiki étaient beaucoup moins pugnaces dans la gestion des clients, leurs performances professionnelles baissaient et on les voyait errer sans but dans l’autogare. En fait, le duo avait décidé d’arrondir ses revenus en faisant main basse sur tout ce qui avait de la valeur et qui n’était pas suffisamment surveillé. Ils ne négligeaient rien : téléphones, pièces de rechange de véhicules, pièces de tissus, bagages divers. Comme l’auto-gare n’est peuplée ni de naïfs, ni d’aveugles, le tandem commença à devenir suspect aux yeux de nombreuses personnes qui travaillaient à la place de Sogoniko. Mais très longtemps les voleurs avaient eu l’intelligence de ne jamais se faire prendre sur le fait.

Toutefois comme leurs besoins de liquide devenaient toujours pressants, ils finirent par prendre des risques de plus en plus grands et par commettre une imprudence. Leur acte de trop fut de cibler l’une des compagnies de transport les plus en vue de la cour. Daouda et Sidiki avaient eux-mêmes longtemps collaboré avec cette compagnie et ils étaient connus de tout le personnel. Le jour où ils perpétrèrent leur coup, les deux garçons sont arrivés encore plus tôt que d’habitude à la gare. Ils se sont dirigés vers les locaux de leurs «  patrons ». A cette heure de la journée, ils savaient n’y trouver grand monde, excepté le gardien. Tel fut le cas. Les deux lascars saluèrent cordialement le vigile et pénétrèrent d’un pas assuré dans les locaux. Le gardien, qui voyait le tandem côtoyer tous les jours mécaniciens, apprentis et conducteurs de la compagnie, se garda de demander aux garçons la raison de leur venue. Nos deux lascars firent une rapide inspection des lieux et repérèrent ce qui les intéressait. Ils ressortirent au bout de quelques courtes minutes. Ils s’éloignèrent de quelques mètres, puis Daouda revint brusquement à grands pas vers les locaux. Il indiqua au gardien qu’il avait oublié un objet personnel à l’intérieur et qu’il partait le récupérer.

Deux parmi d’autres. Une fois dans la place, le jeune homme alla droit à une pièce où les mécaniciens de la compagnie déposaient les pièces de rechange des véhicules. Le voleur s’empara d’une batterie neuve qui attendait d’être montée sur un des véhicules de la compagnie. Il s’en saisit et la fit passer par une fenêtre à son complice qui s’était déjà positionné derrière le bâtiment. La disparition de l’objet sera découverte quelques heures plus tard et les deux garçons, qui savaient qu’ils seraient inévitablement soupçonnés, avaient pris le large. Le vol de batterie aurait coûté son poste à l’agent de sécurité.

Entretemps, le duo avait mis fin à sa double activité. Il avait brûlé ses vaisseaux lors de son dernier vol et il n’était plus question pour lui de retourner faire le coxeur dans aucune des autogares bamakoises. Les garçons décidèrent donc de grimper un échelon supplémentaire dans le vol. Avec l’argent du butin ramassé pendant des mois à Sogoniko, ils avaient fait depuis un certain temps l’acquisition d’une arme artisanale, sans cependant bien savoir l’usage qu’ils en feraient.

Après une courte discussion, ils décidèrent de prendre comme terrain de chasse les plages de Missabougou et de Magnambougou. En ces temps de canicule quasi insupportable, nombreux sont les résidents des quartiers riverains qui partent à la recherche d’un peu de fraicheur sur les berges du fleuve. Certains y restent jusqu’à une heure avancée de la nuit. C’étaient ces personnes qui constituèrent la nouvelle cible de nos lascars. Mais ces derniers étaient loin de se douter que les responsables de la compagnie victime de leur dernier vol n’avaient pas enterré l’affaire de la disparition de la batterie. Ils avaient mené leur propre enquête. Au début, pour eux, Daouda et Sidiki étaient deux suspects parmi plusieurs autres. Mais plus l’investigation avançait, plus les informations négatives s’accumulaient sur l’évolution observée ces derniers temps chez le tandem. Un anonyme particulièrement bien renseigné indiqua l’acquisition d’une arme à feu par le duo qui, détail révélateur, avait complètement déserté l’autogare.

Les responsables de la compagnie jugèrent les informations recueillies trop graves pour que la police ne soit pas informée. Les policiers du 13e arrondissement firent très vite le rapprochement entre la disparition des suspects de Sogoniko et les agressions perpétrées sur les berges de Missabougou et de Magnambougou. Ils ont activé leurs  « pions » pour recueillir le maximum d’informations sur le tandem. Les limiers ont ainsi pu organiser une descente en milieu de semaine dernière sur la berge de Missabougou. Coincés, les désormais ex-coxeurs pouvaient difficilement échapper. Pris dans la nasse des patrouilleurs, ils ont tous deux été conduit par l’inspecteur principal Moïse Baya et ses hommes dans leurs locaux. Le duo pouvait difficilement se défendre tant les preuves accumulées contre lui étaient accablantes. En fin de semaine dernière, le chef de la brigade des recherches du commissariat avait déjà diligenté le dossier pour renvoyer Daouda et Sidiki devant le tribunal de grande instance de la Commune VI. Ainsi s’est arrêtée la courte carrière de deux jeunes délinquants qui n’ont pas eu la patience de vivre à la sueur de leur front.

MH.TRAORE

Source : L’ Essor

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