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Exclue du dîner officiel du 27e sommet Afrique-France : Rokia Traoré s’illustre par une belle leçon de dignité

Après avoir scrupuleusement répété pendant des semaines afin de préparer sa prestation avec la chorale de sa Fondation Passerelle (créée en 2009), Rokia Traoré a eu la désagréable surprise d’apprendre qu’elle ne faisait finalement pas partie de la production musicale du dîner offert par Ibrahim Boubacar Kéita et son épouse au palais présidentiel de Koulouba. C’était le 13 janvier 2017 à l’occasion du 27e Sommet Afrique-France.

rokia traore artiste malienne chanteuse

Informée, quelques heures avant l’événement, qu’elle et des artistes venus d’autres pays africains pour la circonstance ne sont plus les bienvenus, Rokia a fait preuve d’une incroyable dignité en s’adressant au chef de l’Etat sur les réseaux sociaux (voir encadré). La Rossignole du Bélédougou, Rokia Traoré, s’est aussi adressée à tous les fans qui l’ont soutenue sur les réseaux sociaux en apprenant la discrimination dont elle venait d’être victime avec sa chorale.

«Merci de votre soutien à tous.

En fait, je suis triste, mais pas découragée. Il faudrait beaucoup plus pour en arriver à perturber mon courage et ma détermination. Cependant, il était important, pour moi, d’exprimer qu’on ne traite pas les gens ainsi lorsqu’on leur a fait appel et qu’il y a eu une réponse en toute politesse et enthousiasme. Par ailleurs, mon invitation au couple présidentiel du Mali est sincère. Aussi longtemps que Monsieur Ibrahim Boubacar Keïta sera président du Mali, nous aurons besoin de son soutien afin de pouvoir mener la culture malienne là où elle rendra le plus et le mieux service au Mali en contribuant à son avancée.

J’aurais eu la même réaction avec n’importe quel président malien démocratiquement élu. J’espère sincèrement que Monsieur le président aura mon message et qu’il acceptera de nous accompagner, nous aussi acteurs de la musique contemporaine malienne qui contribuons à faire que le Mali soit également dans le présent en s’appuyant sur de fortes bases traditionnelles, et pas uniquement dans le passé et la tradition qui paralyse, enclave, entrave. Le Mali a un beau passé, mais nous devons être dans notre présent, celui du monde et en être fier, nous devons encourager de jeunes artistes à nous donner leurs visions du futur. Monsieur le président, Madame, lorsque vous en aurez terminé avec le sommet, moi-même et les artistes accompagnés par la Fondation Passerelle, serions heureux que vous répondiez à notre invitation. Vive le Mali !»

Nomination de “Né So” (Chez moi) aux Victoires de la Musique 2017 dans la catégorie “Musiques du monde” avec “Far from home” (Loin de la Maison) de Calypso Rose et “Musique de France” d’Acid Arab. Un trophée que cette patriote engagée avait remporté en 2009, avec “Tchamantché” (2007). Et le trophée lui avait été remis le samedi 28 février 2009 au Zénith de Paris lors des 24es Victoires de la musique. La star du Bélédougou avait également récolté un disque d’or avec son 3e album, “Bowmboï” (2002).

En dehors des distinctions nationales, ce disque d’or était la 3e consécration internationale de Rokia Traoré à l’époque. En effet, elle avait déjà été lauréate du Prix RFI-Musiques du monde, en 1997, avec “Mouneïssa” et sacrée “Meilleur espoir” de la musique africaine aux “Kora Awards” en 2001 avec “Wanita” sorti en 2000. C’est à propos de cet artiste talentueux et ambassadrice du Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) que nos confrères de RFI écrivaient récemment : “Entre tradition et modernité, Rokia Traoré trace un chemin particulier dans la création africaine, et malienne en particulier. Si elle ne renie pas du tout ses origines, elle adapte sa musique à son temps et à ses préoccupations sans à priori ni contrainte. Elle mène sa barque avec maestria et talent, parcourant le monde inlassablement pour présenter sa musique”.

C’est donc incompréhensible, voire révoltant qu’on la prive d’une prestigieuse opportunité de présenter sa musique et son travail de formation des talents en herbe aux dirigeants africains et français. Et de surcroît, chez elle, à Bamako, à Koulouba, le palais présidentiel !

Moussa BOLLY

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Encadré : «À Monsieur le président de la République du Mali

Monsieur le président, avec la chorale de la Fondation que j’ai créée en 2009, nous avons eu le plaisir de répéter scrupuleusement ces dernières semaines afin de préparer notre prestation pour vous lors du dîner des chefs d’Etat que vous offrez ce soir vous et la première Dame au palais présidentiel de Koulouba. Je viens d’être informée, quelques heures avant l’événement, que moi-même, ainsi que des artistes venus d’autres pays africains pour la circonstance ne ferons finalement pas partie de la production musicale lors de ce dîner.

Ce qui m’a fait le plus grand plaisir à travers cette opportunité liée au Sommet France-Afrique était le fait de pouvoir pour la première fois, Monsieur le président, vous faire entendre vous et la première Dame le travail musical et artistique que j’entreprends depuis quelques années avec des artistes maliens dans le cadre de ma Fondation totalement portée par moi et quelques amis qui aiment la culture malienne. Ma déception est grande, d’autant qu’aucune explication ne m’a été donnée à cette annulation tardive. Je tiens néanmoins à ce que vous puissiez voir et entendre le travail de la Fondation Passerelle.

La culture est un des piliers importants du Mali que nous bâtissons. Hélas, d’une manière extrêmement désagréable, j’ai appris que vous ne vouliez pas de ma prestation à votre dîner présidentiel, cependant je persiste à croire qu’il est d’une grande importance que vous soyez au courant de ce que j’ai pu faire avec de jeunes artistes depuis 2009, il est important que nous puissions vous informer de tout ce que nous ne pourrons jamais faire sans votre soutien à vous, mais également celui de la première Dame.

Aussi, permettez-moi, Monsieur le président, de vous inviter ainsi que la première Dame à assister au concert que nous donnerons dans l’espace culturel Passerelle, lieu de la Fondation Passerelle à Missabougou, la dernière semaine du mois d’avril 2017, dans le cadre de la Semaine du jazz, un des projets de la Fondation Passerelle. Je vous souhaite une agréable soirée et vous adresse mes salutations respectueuses…»!

Rokia Traoré

Le 13 janvier 2017

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