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Entre Nous : Des os en travers des gorges !

Le Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de la commune III du district de Bamako a informé, dans un communiqué en date du 27 mars 2020, de la réouverture du dossier d’achat de l’avion présidentiel et de la fourniture d’équipements et de matériels aux forces armées de défense et de sécurité du Mali. Le magistrat du Parquet précise que l’affaire, classée sans suite par son prédécesseur, a été ‘’dépoussiérée’’ sur instructions écrites du ministre de la Justice et des Droits de l’homme, Garde des sceaux, lequel a clairement fait cas de la réouverture de ce dossier sur le plateau de la télévision nationale.

C’est dans ce cadre que Mahamadou Camara, Directeur de cabinet de la Présidence de la République et Nouhoun Kouma ont été inculpés et placés sous mandat de dépôt par un juge d’instruction du Pôle économique et financier de Bamako. Par la même occasion, le Procureur du Pôle économique et financier de Bamako a souligné que les dossiers concernant Soumeylou Boubèye Maïga, Moustapha Ben Barka et Mme Bouaré Fily Sissoko, ministres de la République à l’époque, ont été transmis au Procureur général près la Cour Suprême pour transmission à l’Assemblée nationale pour une éventuelle mise en accusation devant la Haute Cour de Justice.
Cette incarcération est comme une arête de poisson coincée dans la gorge de certaines personnalités au sommet de l’Etat. Il ressort du compte-rendu de mission d’une délégation conjointe du Syndicat autonome de la Magistrature (SAM) et du Syndicat libre de la Magistrature (SYLIMA) ayant échangé avec le Parquet du Pôle économique et financier que «la détention de Mahamadou Camara a fortement déplu au haut sommet de l’État ». A qui fait-on allusion ? Au Chef de l’Etat ? Au Premier ministre ? A des membres du gouvernement ?
Si la farouche résistance du corps de la magistrature aux diverses pressions (médiatiques et politiques) augure une nouvelle ère pour les justiciables maliens, les agissements au sommet de l’Etat visant à torpiller cette procédure judiciaire doivent être dénoncés avec la dernière rigueur par la société civile notamment, le Barreau dont le silence est à la fois incompréhensible et inexplicable. Il faut interpeller le Président de la République, Président du Conseil supérieur de la Magistrature, Ibrahim Boubacar Kéïta sur la portée de certaine de ses déclarations publiques.
Lors de la dernière rentrée solennelle des cours et tribunaux du Mali, le président du Conseil supérieur de la magistrature qu’il est a vigoureusement répliqué au Procureur général près la Cour suprême. En voici quelques morceaux choisis : « Cela est constant et avéré. Le Parquet n’a jamais été aussi indépendant. Aucune injonction présidentielle. Monsieur le ministre Garde des sceaux peut en témoigner. Liberté absolue, confiance totale aux magistrats qui ont mission de distribuer la justice. Cela est constant, patent et avéré. Ma dernière audience avec le ministre de la Justice, Garde des sceaux en dehors du conseil des ministres, date de la session du Conseil supérieur de la magistrature. Pour le conseil, je lui ai entièrement donné carte blanche pour les nominations qu’il souhaite faire dans la mission que je lui ai confiée. Je suis un chef d’Etat à l’aise, un président du Conseil supérieur de la magistrature à l’aise». Sacré IBK ! Un vrai maître de l’équivoque, pour reprendre une expression de notre confrère Vincent Hugues du journal français « L’Express ».
De la lecture du compte-rendu de mission SAM-SYLIMA, on peut facilement déduire que l’Exécutif fera tout son possible pour enterrer cette affaire. Compte tenu du rang des personnalités soupçonnées et surtout de leur proximité avec le Président de la République au moment des faits, il n’est pas évident que la nouvelle Assemblée nationale vote leur mise en accusation. Or, il suffit que l’Assemblée nationale refuse de voter cette mise en accusation pour que la justice abandonne tout. En attendant, Mahamadou Camara dont les soutiens mènent une campagne médiatique contreproductive, va faire les frais d’une probable guerre entre l’Exécutif et le Judiciaire.
L’ancien Procureur de la République en charge du Pôle économique et financier, Mamadou Bandiougou Diawara, n’avait-il pas raison lorsqu’il disait que la Constitution du 25 février 1992 contient les germes de l’impunité ?

Chiaka Doumbia

Le Challenger

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