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Banques : LE FARDEAU DES CRÉDITS IMPAYÉS

Les créances en souffrance seraient de 300 milliards de Fcfa au niveau des 17 banques et établissements financiers

 banque developpement mali bdm siege etablissement batimentLes institutions financières participent activement au financement de l’économie nationale à travers les crédits accordés aux agents économiques. Conformément à leurs missions classiques, les banques collectent des ressources (compte courant, épargne, à terme…) auprès de différentes catégories de la clientèle. Elle redistribue les fonds des déposants aux clients demandeurs de crédits contre une rémunération juste et supportable. Ce partage est le socle de l’activité bancaire.

Une banque s’expose à la banqueroute si les débiteurs refusent ou peinent à s’acquitter de leurs engagements, ou si la banque ne prend pas la précaution d’accorder des crédits sains. Quel est donc l’impact des crédits impayés sur le système bancaire et les établissements financiers ? Que font les banques des titres de garanties hypothécaires au cas où un débiteur n’arrive pas à honorer ses engagements ?

Tout d’abord, il faut savoir qu’on appelle un crédit impayé tout prêt bancaire dont la date d’échéance n’a pas dépassé six mois. On parle de crédit douteux quand la probabilité de remboursement devient très faible et quand le délai d’échéance excède six mensualités (six mois + un jour). Les crédits immobilisés s’apparentent aux impayés. Ce sont des prêts dont la banque, de commun accord, a accepté de proroger le délai de paiement sur une période plus longue. Cet ensemble plus les crédits litigieux et irrécouvrables forment les créances en souffrance.

Les créances en souffrance seraient de 300 milliards de Fcfa au niveau des 17 banques et établissements financiers du pays. Ce niveau serait un peu supérieur à la moyenne de l’Union économique et monétaire ouest africain (UEMOA).

Pourtant, la BCEAO et la commission bancaire veillent au respect strict du dispositif prudentiel en matière de crédit. Si les pertes dépassent le niveau des fonds propres, la commission bancaire, de par sa mission de contrôle, exige immédiatement la recapitalisation de la banque. Cette commission pourrait retirer l’agrément d’exercice si la banque n’appliquait pas cette mesure coercitive.

En septembre 2015, le Conseil national du crédit tirait la sonnette d’alarme. « Le niveau des immeubles saisis ou adjugés en faveur des banques maliennes est aujourd’hui très élevé avec une norme qui est aux alentours de 15%. » Mamadou Igor Diarra, à l’époque, ministre de l’Economie et des Finances et président du Conseil national du crédit, faisait remarquer que cette situation « pose un problème parce que les banques n’ont pas pour vocation de garder les immeubles ».

Pourquoi les banques exigent-elles alors des titres de garantie hypothécaire ? Le directeur du département commercial et marketing de la Banque nationale pour le développement de l’agriculture (BNDA), Souleymane Waigalo, répond que le titre foncier pris en garantie hypothécaire matérialise la confiance mutuelle entre la banque et son client. Il n’en demeure pas moins que c’est un moyen de pression pour amener le débiteur à s’acquitter de sa dette au cas où ses affaires périclitent. « Vendre la maison d’un client devrait constituer une dernière voie à utiliser pour une banque », estime-t-il, ajoutant que ce cas figure peut arriver.

Défaut de liquidité. Le directeur de la Banque Atlantique Mady Compaoré évalue à 5 milliards de Fcfa le montant total des créances en souffrance, soit 3% des crédits octroyés par sa banque en 2015. Pour le patron de la Banque Atlantique, c’est l’activité qui est la première garantie d’un crédit car c’est elle qui crée suffisamment de ressources permettant de faire face au service de la dette. Il comprend que des raisons indépendantes de la volonté du débiteur peuvent compromettre le respect du délai de remboursement. Mady Compaoré illustre son propos par les dégâts matériels et économiques causés aux clients et à leurs installations suite à la crise sécuritaire. Des pertes qui sont à l’origine de certaines provisions constituées par sa banque.

Si un client n’arrive pas à respecter les échéances de remboursement, la banque en subit les conséquences. Cela s’appelle l’impact des crédits impayés sur les banques et établissements financiers. « Les crédits impayés immobilisent l’argent de la banque, réduisent ses résultats et baissent le niveau de ses fonds propres », explique Souleymane Waïgalo.

La stagnation de ses ressources réduit la marge de manœuvre d’une banque. Le pire scénario c’est le défaut de liquidité. Pour compenser le déficit, la banque constitue des provisions qui impactent ses résultats à hauteur du montant des engagements impayés. « C’est l’effet de contagion », analyse Souleymane Waïgalo.

Le total des engagements impayés depuis plus de six mois est retranché du résultat annuel de la banque. Le chef marketing de la BNDA donne un exemple. « Quand les engagements douteux de la banque s’élève à 30 milliards de Fcfa, elle doit constituer 30 milliards de provision. » Il est possible que la banque soit inapte à rembourser l’argent des clients si l’institution ne possède pas 30 milliards de fonds propres.

Autre impact des crédits impayés, indique Souleymane Waïgalo, l’incapacité de la banque à réaliser les investissements nécessaires à son développement. « Si vous faites des pertes qui baissent vos fonds propres, vos capacités d’investir sont limitées », précise le banquier.

Aussi, la baisse du niveau des fonds propres fait chuter la majorité des ratios bancaires. C’est en fonction des fonds propres que sont généralement calculés les ratios bancaires. La diminution progressive du niveau des fonds propres à cause du cumul année après année des créances en souffrance, limite la capacité de la banque à faire de nouveaux crédits. Ainsi, les opérateurs économiques et autres agents économiques partenaires de cette banque seront incapables de faire marcher leurs affaires.

L’une des rares alternatives qui s’offrent à une banque frappée par une incapacité de faire crédit, par exemple, c’est la vente des biens immeubles saisis ou assignés en sa faveur. Il n’existe pas d’institutions spécialisées dans ce type de vente au Mali. Les services juridiques et contentieux des banques publient au besoin des avis de vente publique de parcelles ou de maisons.

Mais les banques ont souvent du mal à vendre les biens saisis sur les débiteurs à cause des obstacles dus aux réalités socio – culturelles. Les acquéreurs potentiels seraient réticents, arguant que c’est immoral de racheter les biens appartenant à une personne en difficulté financière. « N’importe qui pourrait se retrouver dans une situation embarrassante, un jour ou l’autre », soutiennent les âmes sensibles. Mais les affaires sont les affaires.

C. M. TRAORE

Source : L’ Essor

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