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Affaire des « bérets rouges »: Sanogo reste en prison

Retour à la case départ, au propre comme au figuré, dans le procès dit du général Sanogo. La première saison de la saga, projetée, s’achève au cinquième épisode, faute d’expertise avec en toile de fond une pluie d’exceptions de la défense. En dépit de la pugnacité et de la détermination du parquet général à sauver les meubles. Une courte victoire de la défense qui s’en délecte à travers force effets de manche. Et pour cause ! A sa demande, la cause et les parties sont renvoyées à la prochaine session d’assise !

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Ce jeudi, il pesait sur le théâtre Lamissa Bengaly comme une atmosphère de happy end. La foule n’était point celle des jours précédents. Normal, beaucoup de supporters du général, qui ont épuisé leurs provisions, ont préféré regagner Bamako… A force de servir le même casting, le procès commençait par griser, même les confrères dépaysés.
En effet, comme dans les épisodes précédents, on s’était quitté avant-hier mercredi sur des demandes de la défense que la Cour devrait trancher. Parmi ces requêtes, exceptions de procédure « in limine litis », il y a notamment le renvoi de la présente session d’assises à une prochaine session. A l’appui de sa demande, la défense a avancé :

1. la violation de l’article 283 du Code de procédure pénale qui rend «obligatoire» la transmission aux accusés, avant l’ouverture des assises, de pièces telles que les procès-verbaux d’enquête préliminaire ainsi que les procès-verbaux d’audition des témoins. Une formalité obligatoire qui protège et garantit les droits de la défense et dont la violation, pour la défense, amène le renvoi du dossier.
2. le défaut d’expertise médico-légale. En effet, soutient la défense, les experts, qui ont déterré les corps des victimes, au village de Diago, ne sont pas ceux commis par le juge d’instruction et ils n’ont pas prêté serment, comme la loi les y obligeait. Pire de nombreuses contradictions existent dans le rapport. Pour les avocats de Sanogo et ses 17 co-accusés, il est nécessaire pour la manifestation de la vérité que ces experts, la plupart occidentaux, comparaissent à la barre pour s’expliquer. Il faut, pour cela, renvoyer le procès car leur comparution exige un certain temps.
3. Exception d’incompétence : la défense avait enfin demandé à la Cour d’assises de se déclarer incompétente à juger cette affaire. En effet, pour elle, l’article 16 du Code de justice militaire donne au tribunal militaire le pouvoir exclusif de «juger les crimes de droit commun et les crimes spécifiquement militaires» commis par les militaires «en temps de paix comme en temps de guerre». Puisse que dans l’Affaire dite des bérets rouges, les accusés, comme les victimes, sont tous militaires et les crimes sont censés avoir été commis dans des casernes à la suite de combats entre militaires, c’est donc la justice militaire qui doit connaître de l’affaire. Or, le tribunal militaire de Bamako est fonctionnel depuis 2011 et a jugé plusieurs affaires impliquant des militaires. Enfin, explique Me Cheick Oumar Konaré, le code de justice militaire est une loi spéciale qui, en droit, prime sur la loi ordinaire, c’est-à-dire sur le code de procédure pénale.
La nuit portant conseil, revenant à l’audience, hier, aux environs de 12 heures, et statuant sur les demandes formulées, la Cour rejette l’exception d’incompétence soulevée par la défense. Mais accédant à sa requête, relative à la comparution des experts notamment, elle décide de renvoyer l’affaire à la prochaine session.
Prévue pour 11heures, l’audience d’hier a commencé avec une bonne heure de retard. C’est à 12h05 que la Cour fait son entrée. Sur les demandes de la défense, le président Mahamadou Berthé et ses collègues avaient deux options :
-soit donner droit aux demandes de la défense : se déclarer incompétente à juger le général Sanogo et ses co-accusés et donc à accepter de leur accorder la liberté provisoire.
-soit rejeter l’exception d’incompétence : retenir la plénitude de la compétence de la Cour d’assises à connaître de tout crime et donc retenir la cause et les parties devant elle.
Entre les deux options, la Cour a choisi de diviser la poire en deux : elle retient sa compétence à connaître de l’affaire dite du général Sanogo, mais accède à la demande de renvoi de la défense pour permettre la comparution des experts et/ou la reprise des tests ADN effectués sur les corps découverts dans la fausse commune de Diago. L’expertise a été confiée au laboratoire Mérieux de Bamako.
La partie civile, par la voix de Mme Sagara Bintou Maiga, présidente des parents des victimes, se dit prête « à faire ces tests. Les ossements sont toujours disponibles. Nous sommes déjà contents du démarrage du processus de jugement. Nous faisons toujours confiance à notre justice. La vérité sera dite dans cette affaire. Le renvoi n’est pas grave. » Bien évidemment, ce ne sera pas à la Saint glinglin !
Si la défense peut crier victoire, si petite soit-elle, celle-ci n’est pas sans conséquence, pour ses clients, qui vont devoir retourner dans leur cachot. En clair : pas de liberté provisoire pour le général Amadou Haya Sanogo et ses coaccusés. Et pour combien de temps ? De longs mois encore pour permettre au centre Mérieux de Bamako de procéder à des expertises sur les ossements. Et cela, avec des experts qui prêteront serment devant un magistrat, commis par la Cour. Combien de temps vont-t-elles durer les expertises et la mise en l’état de l’affaire encore devant une Cour d’Assises. La Cour, concernant les expertises, estime qu’elles seront réalisées dans les 45 jours qui suivent.
A l’analyse, c’est le général Sanogo et ses ex-camarades du CNDRE qui perdent la première manche de la partie. En effet, non seulement, ils n’ont pas eu l’occasion pour déballer quoi que ce soit, mais pire ; ils vont devoir encore goûter longtemps aux délices du « Ngnouf ». Entre temps, la question est : jusqu’à quand vont-t-elles durer la ferveur et la fidélité des supporters du général ?
Rendez-vous donc pour la prochaine saison du feuilleton avec les mêmes acteurs aux lieux et dates à la discrétion du ministère public. Mais pour les débats de fond…

Mohamed D. DIAWARA

 

Source: nfo-matin.

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