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A la rencontre de la tradition: La perception de la mort et les pratiques funéraires en pays dogon/ Mali

Les villages du plateau et de la falaise sont dotés d’au moins deux à trois sépultures d’après nos informateurs.

Ces sépultures ont été créées ou aménagées par les premiers occupants. Elles constituent un des quatre piliers du village dogon. Pour fonder un village, les Dogon observent deux éléments fondamentaux qui conditionnent la fondation d’un village :

  • L’existence d’un point d’eau, son accessibilité et sa permanence.
  • La disponibilité ou la possibilité d’aménager une sépulture.

Si ces deux conditions sont réunies, le village peut être créé.

A côté de ces deux éléments constituant les deux piliers, s’ajoutent deux autres piliers qui sont : la maison des menstrues et le toguna ou anagney ou yonjomu.

Les tombeaux sont sacrés, leur accès est interdit aux femmes et aux enfants. Les tombeaux varient selon les villages et selon les localités mais on peut les regrouper en deux :

Les tombeaux du plateau et les tombeaux des falaises.

Les tombeaux du plateau :

Sur le plateau, la nature n’offre pas partout des grottes naturelles prédisposées à servir de sépulture. Compte tenu de cette réalité, nous avons deux types de tombeau : le tombeau offert par la nature et celui creusé par l’homme ressemblant aux hypogées d’Egypte.

Concernant le tombeau offert par la nature, l’homme n’aménage que la porte d’entrée, alors que concernant le tombeau artificiel, il faut le creuser au pied d’un monticule de pierre pour obtenir une grotte artificielle. Sur le plateau, les tombeaux disposent de deux fermetures intercalées et superposées pesant plus de cent kilogrammes.

Les tombeaux des falaises :

Dans les  falaises, généralement les cavernes aménagées par les « Tellems » situées en altitude qui servent de tombeau.

  Les enterreurs

En milieu dogon traditionnel, il existe des spécialistes en matière d’inhumation appelée « iyèyohemu ». Ils ont été initiés aux techniques et aux rites d’enterrement. En cas de mort d’Homme, ce sont ces enterreurs qui sont chargés d’inhumer le corps. Il est à signaler que n’est pas enterreur qui le veut, à en croire le vieux Enelou de Ningari. Pour l’être, il faut remplir un certain nombre de critères entre autres, la discrétion, la non- possession de sorcellerie, la maîtrise de soi. Les enterreurs sont les seuls autorisés à consommer les dons offerts aux défunts lors de leur voyage pour la tombe.

 Les cérémonies funéraires :

En milieu dogon, si une personne meurt, l’annonce est faite en première position à la famille maternelle du défunt ou de la défunte. Cela s’explique du fait que c’est la mère qui met au monde l’enfant et quand ce dernier meurt, elle est la première à être informée et on ne peut enterrer le corps sans qu’il ne soit inspecté par la famille maternelle.

Traditionnellement, chez les Dogon, le décès d’une personne d’un certain âge est annoncé au grand public par des coups de fusil, exception faite au décès des personnes appartenant à la communauté des masques ou de certains vieux, surtout en falaise. En ce qui concerne ces genres de personne, leur mort est annoncée par les cris du masque-mère (namasugô i na ou imna na selon les dialectes dogon).

L’inhumation chez les Dogon :

 

Les préparatifs de l’inhumation commencent par l’ouverture du tombeau. Celui-ci peut rester ouvert pendant 6 heures de temps au maximum pour que  le gaz carbonique  libère  la grotte.

Dès que le tombeau est prêt à recevoir le corps et que la famille maternelle eût fini son travail d’inspection et ait ordonné l’inhumation, on peut déjà mettre le corps dans un linceul de cotonnade blanc et l’emballer avec une couverture en noir blanc apportée par la famille maternelle du ou de la défunte pour la circonstance.

En milieu traditionnel dogon, avant d’enterrer une personne décédée, on la rase d’abord et on recueille sa chevelure qu’on garde dans une grotte spéciale appelée « bodugalubodu ». Nous avons cherché à savoir pourquoi rase-t-on les morts ? Raison évoquée par nos interlocuteurs, c’est pour ne pas empoisonner les enterreurs lors du prochain enterrement qui se passera dans la même grotte et surtout quand on sait que les cheveux ne désintègrent pas facilement.

Une fois, les préparatifs finis, on organise la cérémonie de levée du corps. Cette cérémonie regroupe des femmes et des hommes venus de tous les coins proches et ensemble, ils accompagnent le corps jusqu’à cent à deux cents mètres du tombeau.

Là, on dépose le corps pour lui rendre un dernier hommage en lui offrant coton, monnaie, cauris, mil, etc. pour qu’il se serve à l’au-delà.

Après ce dernier hommage, les femmes retournent à la maison et le corps poursuit son chemin jusqu’au tombeau où il est reçu par les enterreurs. A l’intérieur de la tombe, on fait coucher le corps en le faisant face à l’Est s’il est masculin, à l’Ouest s’il est féminin.

Après avoir posé le corps, les enterreurs ressortent de la grotte et referment avec la double fermeture.Une fois l’enterrement fini, les enterreurs rentrent au domicile du défunt ou de la défunte pour présenter les condoléances. Après cette étape, les manifestations funéraires s’organisent à la place publique appelée « gunnu ou tai ».  Là, se passe le « yimu yonnu » ou certains l’appellent « jan kômbô” qui consiste à faire une simulation de guerre avec armes à feu et armes blanches.

Le deuil est décrété pour une semaine de 5 jours.

Après la levée de deuil, à chaque fin de l’hivernage, on organise une cérémonie appelée « guinangolo » au cours de laquelle on rend encore hommage aux morts. En attendant leur mise à l’ombre, les disparus resteront au soleil jusqu’au « Jemu » (cérémonie funéraire au cours de laquelle on conduit les âmes des morts à l’ombre et au paradis).

Hamadoun Ouologuem, chercheur à l’Académie Malienne des Langues (AMALAN)

SOLONI

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