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Mohamed Ousmane Ag Mohamedoune : « Je demande au gouvernement de se réveiller pour nourrir les gens qui se trouvent sur des zones où le feu est éteint avant qu’ils n’allument eux aussi le feu ! »

Bamako-19/9/2015- Chef du premier mouvement de la CMA à apposer sa signature sur l’accord issu du processus d’Alger le 15 Mai dernier à Bamako, Mohamed Ousmane Ag Mohamedoune est l’actuel patron de la coalition pour le peuple de l’azawad(CPA). Un mouvement armé dissident de la CMA qui a fondé la COMPIS 15 à Bamako avec le Ganda-Izo et le CMFPR2. Et si Mohamed a décidé de s’installer depuis Mai à Bamako, c’est « parce qu’il ne peut en être autrement », selon sa propre expression. Même installé à Bamako en attendant la mise en œuvre de l’accord, Mohamed bouge beaucoup. De temps à autre, il se rend sur le terrain où son mouvement se réclame plus de 1.200 combattants. Visiter les réfugiés pour prendre leurs aspirations, est aussi une des préoccupations de ce quadragénaire. Dans son hôtel à Bamako, Mohamed nous a reçus vendredi soir pour nous livrer des détails sur les menaces qui pèsent sur l’accord d’Alger II. Outre ce dernier point et celui des élections d’octobre, le coordinateur de la compis 15 parle aussi de la situation des réfugiés, du présent et de l’avenir du nord du Mali en général.

Mohamed Ousmane Ag Mohamedoune rebelle touareg mnla azawad cma cpa

Interview

 -Où en sommes-nous avec la mise en œuvre de l’accord ?

-Mohamed Ousmane Ag Mohamedoune :D’abord, je tiens à vous dire que la dernière réunion du comité de suivi de l’accord a été véritablement une réunion de travail. Et nous avons senti que nous avons travaillé. Certaines sous-commissions auxquelles du travail a été confié ont travaillé et présenté au comité les rapports qu’ils ont établis. On peut donc dire que le comité de suivi de l’accord a commencé à faire sa mission. Ce qui est aussi important c’est que lors de la dernière réunion, il a été décidé à ce qu’il n’y ait plus de blocage au niveau du comité. En outre, le comité de suivi accepte désormais toutes les parties. La seule problématique qui demeure réside au niveau des quotas de représentativité au sein du comité.

Entretemps, que font vos combattants sur le terrain ?

En ce qui concerne les combattants de la Cpa, autrefois membres de la cma avant de cofonder  la compis 15, nous avons signé l’accord depuis le 15 mai, et puisque nos amis de la cma ont vu en notre engagement à la paix un mal, il y a eu des difficultés à nous associer. Or, étant donné que nous avons la liberté de nous engager  en fonction des intérêts de nos populations, nous avons décidé de nous retrouver dans une autre coordination appelée la compis 15. Et nos droits en tant que mouvements signataires sont garantis. Donc, pour en venir à votre question, je vous dis que nos combattants de la cpa et de la compis 15 en général sont dans la logique d’observation de la paix dans l’attente du cantonnement.

Où sont-ils regroupés au juste ?

Ils sont regroupés dans des bases bien connues. Il s’agit de : Assarane, Hassilabiad, foyta, Tissilit, et Lerneb. Ils sont aussi dans des zones telles que Bamba, Temerrad, dans la zone de Inzawa à Gao, à menaka et à Faffa. De façon générale, nous avons nos combattants dans ces zones. Nous sommes dans la logique de regroupement et nous ne participons à aucune action de violence comme celles qui se déroulent entre la cma et la plateforme.

Quel commentaire faites-vous de violences qui ne cessent d’éclater entre la cma et la plateforme ?

Nous pensons que ce sont des actions qui doivent s’arrêter car ce qui se passe actuellement sur le terrain n’est pas un combat pour la défense des intérêts des populations. On est tenté de penser que c’est un conflit entre gangs. Puisque l’intérêt de la population c’est la mise en œuvre de l’accord, la paix et non la guerre.

Alors qu’est-ce qui bloque la mise en œuvre effective d’un accord déjà approuvé et signé par toutes les parties prenantes ?

Évidemment, il y a des choses liées à la validation même du budget du Comité de suivi de l’accord qu’il va falloir  régler. Vous savez, les sous-comités doivent par exemple travailler presqu’en plein temps, mais on a l’impression qu’ils siègent au rythme du comité de suivi.  Ce qui n’est pas normal. Même le comité de suivi doit se réunir plusieurs fois dans le mois. Il ne doit pas seulement s’en tenir aux seules réunions ordinaires mensuelles. En clair, les sous-comités et le comité ne parviennent pas jouer convenablement leurs rôles comme il le faut parce que le budget du CSA n’est pas encore approuvé. Il faut dire qu’aujourd’hui, il se pose un problème de ressources pour le fonctionnement du CSA. On ne sait pas qui doit mettre la main à la poche.  Autrement dit, il s’est installé un handicap causé dû au problème de budget devant faire fonctionner les structures chargées de la mise en œuvre de l’accord.

Et que fait la médiation dans tout ça ?

En fait, nous, nous pensons même que le facteur de blocage provient de la médiation, sinon il n’y a pas aujourd’hui de raison que le problème de représentativité ne soit jusque-là pas tranchée. La médiation étant souveraine, la position du gouvernement étant connue, la médiation n’a qu’à trancher cette question afin d’aboutir au règlement du problème de budget parce qu’un budget ne se fait pas au hasard.

En fait, quelle est votre position par rapport à la tenue annoncée des élections régionales et communales en octobre prochain ?

Notre position par rapport aux élections dans le contexte actuel est formelle. La cpa, dans le contexte actuel, ne veut d’élections ni communales ni régionales. Et la compis 15 au nom de laquelle je parle aisément rejette des élections communales et régionales dans le contexte actuel pour la simple raison que les conditions de sécurité ne sont pas réunies, que des réfugiés ne sont pas encore revenues. Et si on les organise aujourd’hui, il y aura pas mal de cercles et communes qui en seront privées. Et on ne peut pas tenir des régionales en privant des cercles. Ce serait les condamner alors qu’ils auraient pu être acteurs. Cependant, du fait que la tenue de ces élections est dangereuse dans le contexte actuel, nous pensons que le Gouvernement acceptera de les reporter jusqu’à ce que les conditions soient réunies. En plus, les tenir constitue une sorte de violation de l’accord.

Faites-vous allusion à l’ambivalence qui existe entre l’actuelle loi électorale et celle qui doit émerger avec la nouvelle constitution devant naitre avec la mise en œuvre de l’accord ?

Je crois que cet accord qui est aujourd’hui le chemin par lequel on doit passer pour refaire notre Mali, prévoit une période intérimaire à l’intérieur de laquelle il y a un certain nombre de mécanismes transitoires afin de gérer ces collectivités. Effectivement, il est prévu que l’on revoit la loi électorale pour l’adapter au nouveau contexte prévu par l’accord. C’est une alternative. Je crois qu’il faut reporter les élections, prioriser l’accord, le respecter et prioriser le retour des réfugiés, créer les conditions les conditions de leur sécurité. Il ne faut donc pas ranger cet accord à côté pour dire qu’on veut refaire le Mali, parce que ça va nous rattraper plus tard.

Cela fait trois mois que l’accord est signé par toutes les parties, les personnes déplacées  ont en principe, envie de revenir. Mais à ce jour, quelle est la situation des réfugiés ?

D’abord, je tiens à dire que nous avons essentiellement trois zones de réfugiés : les réfugiés maliens de la Mauritanie, les réfugiés du Burkina et ceux du Niger. Il se trouve que ces réfugiés maliens au Niger au Burkina et en Mauritaniesont de la région de Gao  et de Tombouctou. C’est pourquoi nous disons qu’il est extrêmement important de commencer par avoir un regard régional.  Les populations qui se trouvent aujourd’hui dans le camp de M’berra en Mauritanie, elles, sont en train d’aller dans la dynamique de régionalisation.  On est en train de mettre en place les conditions afin que ceux de M’berra  qui sont tous de Tombouctou, reviennent à Tombouctou pour participer à la mise en œuvre de l’accord. On ne peut pas participer à la mise en œuvre de l’accord étant donné qu’on n’est pas chez soi. On est envahi aujourd’hui par le banditisme à Tombouctou, et c’est en revenant que les habitants de cette région pourront participer au retour de la sécurité chez eux-mêmes.

D’ailleurs, une importante délégation de nos réfugiés de M’berra, composés de chefs de tribus et de fractions, a été reçue par le ministre de la reconstruction cette semaine pour dire de vive voix au gouvernement du Mali qu’ils (réfugiés) n’attendent que les conditions soient réunies  pour retourner chez eux. Par ailleurs, nous avons aussi le cas des populations maliennes résidant en Algérie. Elles n’ont pas le même statut que les autres. Elles sont logées et se sentent même mieux que quand ils étaient au Mali.

A vous entendre, on a l’impression que les réfugiés aussi tiennent à cet accord !

Je vous confirme que cet accord appartient à ces populations. Elles ont participé à sa négociation, elles comprennent son contenu. Elles savent également que cet accord leur en est bénéfique.

Alors quelle sera l’alternative immédiate si le comité de suivi est fonctionnel dans les prochaines semaines?

En ce moment, je crois que le travail se fera car en tant que parties, nous allons jouer notre partition et suivre les plans tracés des sous-comités qui constituent le laboratoire des reformes et actions de développement qui doivent mener à la paix. Et même pour le DDR, c’est un décret présidentiel doit  mettre en place la commission spécialisée.

Votre message en quelques mots ( ?)

D’abord, mon premier message va à l’endroit du gouvernement que je demande de se réveiller. En premier lieu, qu’il prenne avec beaucoup de considération ceux qui ont donné la paix depuis le 15 mai. Nous avons perdu trop de temps en parlant de Kidal et d’Anéfis alors qu’on a oublié Tombouctou, on a oublié Gao. Cela ne doit pas durer. Il faut que l’Etat fasse un signal tendant à faire revivre les services sociaux de base dans ces zones (nord).  Les populations n’attendent que cela parce que même la nature a horreur du vide !

Pour notre part, nous disons que la compis 15 est une force incontournable et la cpa à l’intérieur est aussi une force incontournable. Nous pouvons faire la guerre s’il le faut et nous pouvons imposer la paix s’il le faut. On ne peut pas passer tout notre temps à cesser le feu en oubliant que des endroits où le feu est cessé, il peut s’allumer si on n’y fait rien… Nous sommes pour une libre administration, une régionalisation.

L’onu, l’union africaine, la cedeao et la France, tout le monde nous a dit qu’il n’y a que cet accord, et pas de séparation. Alors, on l’a signé, mais qu’est-ce qu’on attend pour le mettre en œuvre ?

Enfin, je dis, il faut éteindre le feu là où il s’allume, et il faut aussi nourrir les gens qui se trouvent sur des zones où le feu est éteint avant qu’ils n’allument eux aussi le feu !

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